Dérivés de 2 , 3 -dihydrofuro [3 , 2 -b] pyridine, leur préparation et leur application en thérapeutique.
La présente demande à pour objet des composés répondant à la formule générale (I)
dans laquelle
R-L représente un atome d'hydrogène, un groupe (C1-C6) alkyle ou un groupe phényl (Cx-C4) alkyle éventuellement substitué, R2 représente un atome d'hydrogène ou un groupe (Ci-Cg) alkyle, et
R3 , R4 et R5 représentent chacun, indépendamment l'un de l'autre, un atome d'hydrogène ou d'halogène ou un groupe trifluorométhyle, cyano, hydroxy, (Cx-Cg) alkyle ou (C-L-Cg) alcoxy.
Les deux atomes de carbone par lesquels le cycle pyrrolidine et le cycle furo [3 , 2 -jb] pyridine sont liés sont asymétriques ; un composé selon 1 ' invention peut donc exister sous forme d'isomère optique pur (R, R) , (R, S) , ( S, R) ou ( S, S) ou d'un mélange de tels isomères.
Un composé selon l'invention peut également exister à l'état de base libre ou de sel d'addition à un acide.
Des composés intéressants sont ceux dans lesquels Rx et R2 représentent chacun un atome d'hydrogène ou un groupe alkyle, de préférence un groupe methyle, et R3 , R4 et R5 représentent chacun un atome d'hydrogène ou d'halogène, de préférence le chlore, ou un groupe (C-L-C^ alkyle, de préférence methyle, ou (C1-C4) alcoxy, de préférence méthoxy.
Schéma
Conformément à 1 ' invention on peut préparer les composés de formule générale (I) par un procédé illustré par le schéma ci-dessus.
On fait réagir d'abord un 2-halogénopyridin-3-ol de formule générale (II), dans laquelle R3 , R4 et R5 sont tels que définis ci -dessus et X représente un atome d'halogène, avec
le 2-éthynylpyrrolidine-l-carboxylate de 1, 1-diméthyléthyle de formule (III), dans les conditions d'une réaction de Castro-Stephens, comme décrit dans J. Org . Chem . (1966) 31 4071, ou bien en présence de cuivre (I) , comme décrit dans Synthesis (1986) 749-751, pour obtenir le dérivé cyclisé de formule générale (IV) . Pour certains composés, tous les substituants R3 , R4 et R5 ne peuvent pas être présents dès le début de la synthèse ; dans ces cas , leur introduction peut se faire à partir du composé de formule générale (IV) , dans laquelle R3 , R4 et R5 représentent chacun un atome d'hydrogène, selon toutes méthodes connues, par exemple celle décrite dans J. Net . Chem . (1996) 33 1051-1056, éventuellement après activation de l'azote du cycle pyridine par formation du N-oxyde correspondant. Ensuite on déprotège l'azote du cycle pyrrolidine pour obtenir le composé de formule générale (V) . On soumet ce dernier à une hydrogénation catalytique pour obtenir le composé de formule générale (VI) et finalement, et si on le désire, on effectue une alkylation à l'azote du cycle pyrrolidine par toute méthode connue, par exemple une methylation selon la méthode de Eschweiler-Clarke (formaldéhyde et acide formique) ou par une amination réductrice en présence d'un aldéhyde et de cyanoborohydrure de sodium, ou encore une acylation, pour former un amide, suivie d'une réduction en présence d'un agent réducteur tel que 1 ' hydrure double de lithium et d ' aluminium.
Les 2-halogénpyridin-3-ols sont disponibles dans le commerce ou peuvent être préparés selon toutes méthodes connues de l'homme du métier.
Les (S)- et (R) -2-éthynylpyrrolidine-l-carboxylate de 1,1- diméthyléthyle peuvent être préparés à partir de la proline (S) ou (j) par la méthode de Corey-Fuchs, décrite dans Tetrahedron Letters (1990) 31(28) 3957-3960.
Les exemples qui vont suivre illustrent la préparation de quelques composés de l'invention. Les microanalyses élémentaires, et les spectres I.R. et R.M.Ν. confirment les struc-
tures des composés obtenus.
Les numéros indiqués entre parenthèses dans les titres des exemples correspondent à ceux de la 1ère colonne du tableau 1 donné plus loin, Dans les noms des composés, le tiret "-" fait partie du mot, et le tiret "_" ne sert que pour la coupure en fin de ligne ; il est à supprimer en l'absence de coupure, et ne doit être remplacé ni par un tiret normal ni par un espace.
Exemple 1 (Composés N°l et 2) .
Diastéréoisomères de la (2 S) -2-pyrrolidin-2-yl-2 , 3 -dihydro_ furo [3,2 -jfc>] pyridine .
1.1. ( S) -2-Furo [3 , 2-Jb] pyridin-2 -ylpyrrolidine-1-carboxylate de 1 , 1-diméthyléthyle . Dans un ballon tricol de 100 ml, on dissout, sous atmosphère d'argon, 2,0 g (10,24 moles) de (S) -2-éthynyl-l-pyrrolidine_ carboxylate de 1 , 1-diméthyléthyle et 2,26 g (10,24 mmoles) de 2-iodopyridin-3 -ol dans 50 ml de pyridine. On ajoute 0,88 g
(6,15 mmoles) d'oxyde de cuivre (I) et on chauffe le milieu à reflux pendant 24 h.
On filtre la solution sur. papier et on évapore le solvant sous pression réduite. On purifie le résidu par chromato- graphie sur gel de silice en éluant avec un mélange 60/40 puis 50/50 de cyclohexane et d'acétate d'éthyle. On obtient ainsi 2,43 g de produit sous forme d'huile épaisse . [α]D°= -102,6° (c=l,CHCl3).
1.2. Dichlorhydrate de (S) -2-pyrrolidin-2-ylfuro [3 , 2-Jb] _ pyridine . Dans un ballon de 100 ml, on dissout 2,25 g (7,80 mmoles) de (S) -2-furo [3 , 2-jb] pyridin-2-ylpyrrolidine-l-carboxylate de 1, 1-diméthyléthyle dans 20 ml de dichloromethane et on ajoute 17,8 ml (0,156 mole) d'acide trifluoroacétique . Il se produit un dégagement gazeux. Après 24h d'agitation, on évapore le solvant, on reprend le résidu dans l'eau et on alcalinise la solution obtenue par addition d'une solution aqueuse de soude concentrée. On extrait au dichloromethane pour obtenir le produit brut sous forme d'huile, que l'on purifie par chromatographie sur gel de silice en éluant avec un mélange 95/5/0,5 de dichloromethane , éthanol et ammoniaque, pour obtenir le produit pur sous forme de base. On forme le chlorhydrate par addition d'acide chlorhydrique dans 1 ' éthanol .
On obtient ainsi 1,35g de produit. Point de fusion : 174-175°. [α]ξ,° = -9° (c=l, CH3OH) .
1.3. Diastéréoisomères de la (2 S) -2-pyrrolidin-2-yl-2 , 3- dihydrofuro [3,2 -b] pyridine . Dans un ballon tricol de 1 1 on introduit 6,0g (22,97 mmoles) du dichlorhydrate de (S) -2-pyrrolidin-2-ylfuro [3 , 2 -b] pyridine dans 400 ml d' éthanol. On ajoute 3 g de palladium sur charbon à 10% et on effectue une hydrogénation catalytique pendant 10 h.
On élimine le catalyseur par filtration, on évapore le solvant sous pression réduite et on purifie les produits de la réaction par chromatographie sur gel de silice en éluant avec un mélange 96/4/0,4 de de dichloromethane, éthanol et ammoniaque. On obtient ainsi 0,22 g du diastéréoisomère le moins polaire (composé N°l) sous forme de base. Point de fusion : 79-81°C, [α] 2 Ό° = +63,7° (c=l, CHC13) , et 1,2 g du diastéréoisomère le plus polaire (composé N°2) sous forme de base. On dissout celle-ci dans l' éthanol et on traite par une solution d'acide chlorhydrique dans l' éthanol pour obtenir, après cristallisation dans la butanone, 1,56 g de produit sous forme de dichlorhydrate . Point de fusion : 171-173°, [α] ^ = -75,9° (c=l, CH3OH) .
Exemple 2 (Composé N°6) .
(-)-Tartrate de (2S) -2- (l-méthylpyrrolidin-2-yl) -2 , 3-dihydro_ furo [3,2 -jb] pyridine .
Dans un ballon de 250 ml on dissout 0,6 g (2,19 mmoles) du diastéréoisomère le plus polaire du dichlorhydrate de (2S) - 2-pyrrolidin-2-yl-2 , 3-dihydrofuro [3 , 2-b] pyridine obtenu lors de l'étape précédente dans 100 ml d' éthanol, puis on ajoute 250 μl (4,38 mmoles) d'acide acétique et 3,55 ml (4,38 mmoles) d'une solution aqueuse de formaldéhyde à 37%. On refroidit à 0°C et on ajoute 0,275 g (4,38 mmoles) de cyano. borohydrure de sodium et on agite le mélange pendant 3 h. On évapore le solvant sous pression réduite et on alcalinise le milieu par addition d'ammoniaque concentrée. On évapore la solution obtenue et on purifie le résidu par chromatographie sur colonne de gel de silice en éluant avec un mélange 90/10/1 de dichloromethane, éthanol et ammoniaque pour obtenir le produit sous forme de base .
On reprend celle-ci dans l' éthanol et on ajoute 0,235 g d'acide tartrique. Après evaporation du solvant sous pression réduite on obtient 0,70 g de produit sous forme de solide hygroscopique . Point de fusion : 70-71°C. [α] ° = -107,3° (c=l, H20) .
Le tableau qui suit illustre les structures chimiques et les propriétés physiques de quelques composés de l'invention.
Tableau
Pour tous les composés, la configuration de l'atome marqué "a" est soit R, soit S, mais n'a pas été déterminée ; dans la colonne "b" sont indiquées les configurations de l'atome marqué "b" dans la formule ci-dessus.
Dans la colonne "Sel", "-" désigne un composé à l'état de base, 2HC1 désigne un dichlorhydrate et "Tar." désigne un D-tartrate .
Les composés de l'invention ont fait l'objet d'essais qui ont mis en évidence leurs propriétés thérapeutiques.
Ainsi ils ont été étudiés quant à leur affinité vis-à-vis des récepteurs nicotiniques selon les méthodes décrites par
Anderson et Arneric, Eur. J. Pharmacol (1994) 253 261, et par Hall et coll., Brain Res . (1993) 600 127.
On décapite des rats mâles Sprague Dawley de 150 à 200 g et on prélève rapidement la totalité du cerveau, on l'homogénéise dans 15 volumes d'une solution de sucrose à 0,32 M à 4°C puis on le centrifuge à 1000 g pendant 10 min. On élimine le culot, et on centrifuge le surnageant à 20000 g pendant 20 min à 4°C. On récupère le culot et on l'homogénéise à l'aide d'un broyeur Polytron™ dans 15 volumes d'eau bidistillée à 4°C, puis on le centrifuge à 8000 g pendant 20 min. On élimine le culot et on centrifuge le surnageant et la couche de peau ("buffy coat") à 4000 g pendant 20 min, on récupère le culot, on le lave avec de l'eau bidistillée à 4°C et on le centrifuge encore une fois avant de le conserver à -80°C.
Le jour de l'expérience on décongèle lentement le tissu et on le met en suspension dans 3 volumes de tampon. On fait incuber 150 μl de cette suspension membranaire à 4°C pendant 120 min en présence de 100 μl de [3H] cytisine 1 nM dans un volume final de 500 μl de tampon, en présence ou en absence de composé à tester. On arrête la réaction par filtration sur des filtres hatman GF/B™ préalablement traités avec de la polyéthylèneimine, on rince les filtres avec deux fois 5 ml de tampon à 4°C, et on mesure la radioactivité retenue sur le filtre par scintigraphie liquide. On détermine la liaison non spécifique en présence de (-) -nicotine à 10 μM ; la liaison non spécifique représente 75 à 85% de la liaison totale récupérée sur le filtre. Pour chaque concentration de composé étudié on détermine le pourcentage d'inhibition de la liaison spécifique de [3H] cytisine, puis on calcule la CI50, concentration de composé qui inhibe 50% de la liaison spécifique. Les CI50 des composés de l'invention se situent entre 0,01 et 100 μM.
Les résultats des essais biologiques effectués sur les composés de l'invention montrent qu'ils sont des ligands cholinergiques puissants et sélectifs pour les récepteurs nicotiniques .
Ces résultats suggèrent l'utilisation des composés dans le traitement ou la prévention des désordres liés à un dysfonctionnement des récepteurs nicotiniques, notamment au niveau du système nerveux central ou du système gastro- intestinal.
Au niveau du système nerveux central ces désordres comprennent les altérations cognitives, plus spécifiquement mnésiques, mais également attentionnelles, liées à la maladie d'Alzheimer, au vieillissement pathologique (Age Associated Memory Impairment, AAMI) , au syndrome Parkinsonien, à la trisomie 21 (Down's syndrome), au syndrome alcoolique de Korsakoff, aux démences vasculaires (multi-infarct démentia, MID) . Les composés de l'invention pourraient également être utiles dans le traitement des troubles moteurs observés dans la maladie de Parkinson ou d'autres maladies neurologiques telles que la chorée de Huntington, le syndrome de Tourette, la dyskinésie tardive et 1 ' hyperkinésie . Les composés de l'invention peuvent également constituer un traitement curatif ou symptomatique des accidents vasculaires cérébraux et des épisodes hypoxiques cérébraux. Ils peuvent être utilisés dans les cas de pathologies psychiatriques : schizophrénie, dépression, anxiété, attaques de panique, comportements compulsifs et obsessionnels.
Ils peuvent prévenir les symptômes dus au sevrage au tabac, à l'alcool, aux différentes substances induisant une dépendance, telles que cocaïne, LSD, cannabis, benzo- diazépines . Enfin ils peuvent être utiles pour le traitement de la douleur.
Au niveau du système gastro- intestinal les composés de l'invention pourraient être utiles dans le traitement de la
maladie de Crohn, de la colite ulcéreuse, du syndrome du côlon irritable et de l'obésité.
A cet effet les composés de l'invention peuvent être présentés sous toutes formes de compositions appropriées à l'administration entérale, parentérale ou transdermique, telles que comprimés, dragées, gélules, capsules, suspensions ou solutions buvables ou injectables telles que sirops ou ampoules, timbres transdermiques ("patch"), etc, associés à des excipients convenables, et dosés pour permettre une administration journalière de 0,01 à 20 mg/kg.