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Jeanne-Charlotte de Bréchard

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Jeanne Charlotte de Bréchard
Biographie
Naissance

Château de Vellerot, Saint-Pierre-en-Vaux
Décès
Nationalité
France
Activité
Autres informations
Ordre religieux
Visitation Sainte-Marie
La maison de la Galerie, où a été fondée l'ordre de la Visitation Sainte-Marie le . En haut à gauche, la chambre de Jeanne-Charlotte, à droite, celle de sainte Chantal.

Jeanne-Charlotte de Bréchard, née vers 1580 à Saint-Pierre-en-Vaux (actuelle Côte-d'Or) et morte le à Riom, est une dame française originaire de Bourgogne, troisième religieuse de l'ordre de la Visitation fondé par sainte Jeanne de Chantal et saint François de Sales.

Une enfance difficile

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Jeanne-Charlotte de Bréchard est née en 1580, au château de Vellerot, situé dans la paroisse de Saint-Pierre-en-Vaux, dans l'actuel département de la Côte-d'Or. Issue d'une noble famille de Bourgogne, elle est la dernière fille de Jean de Bréchard. Sa mère mourut peu de temps après sa naissance et la nourrice à qui on la confia eut peu de soins pour elle.

En 1589, la grande peste atteignit Vellerot. Jeanne-Charlotte fut atteinte du fléau. Alors à peine âgé de 9 ans, elle fut conduite dans une chaumière du village, avec d'autres malades. Elle guérit malgré tout, mais cette expérience lui donna une connaissance précoce de la mort et de la souffrance. Pour lui donner une éducation, son père la fit envoyer dans un monastère voisin. Mais les religieuses qui y vivaient étaient si « relâchées »[1] qu'elles préféraient se servir d'elle comme d'une servante plutôt que de l'instruire. La pauvre enfant supporta humblement tous ces tourments, jusqu'à ce que son père décide de la faire revenir au château, ayant perdu une grande partie de ses autres enfants dans les guerres ou les maladies.

Jeanne-Charlotte apprit donc d'elle-même à lire, récupérant des livres dans la bibliothèque paternelle. Son attrait pour la religion se fit très tôt sentir ; elle passa la majeure partie de son temps à aider les pauvres du village ou à prier devant l'oratoire qu'elle dressa dans sa chambre. Se sentant appelée à une vie religieuse, elle voulut entrer dans l'ordre de Sainte Claire. Son père, ne voulant pas entendre parler d'un tel projet, la rejeta comme une extravagante. Elle mit donc de côté ce pressant appel et continua ses occupations ordinaires[2].

Le chemin vers la vie religieuse

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Alors qu'elle avait 25 ans, elle eut la permission d'aller assister à un sermon donné dans une ville voisine par un religieux de Saint-François. Elle en fut si marquée qu'elle alla quérir ledit religieux et lui ouvrit son cœur sur sa vocation. Le brave homme qui connaissait les carmélites de Dijon lui promit d'en parler à la supérieure et qu'il la tiendrait informée.

Il restait encore bien des obstacles. Mais une intervention inattendue allait finalement les résoudre. La baronne de Chantal, parente de Jeanne-Charlotte, décida de l'inviter à venir dans son château. Elle avait appris le désir de Jeanne-Charlotte d'entrer en religion et le partageant elle-même depuis la perte de son mari, elle ne pouvait que mieux le comprendre. Après avoir réussi à obtenir la permission de Jean de Bréchard, la baronne de Chantal prit Jeanne-Charlotte sous sa protection.

Le religieux ayant rapporté une réponse positive du Carmel, Jeanne-Charlotte partit pour devenir postulante, mais sa santé fragile ne lui permit pas de supporter les austérités de l'ordre. Dès qu'elle le pouvait, elle se relevait malgré la fièvre pour assister aux offices. La supérieure voyait bien la ferveur de Jeanne-Charlotte, mais elle savait aussi qu'elle ne pourrait pas devenir carmélite. De retour chez madame de Chantal, Jeanne-Charlotte fit un étrange rêve semblant préciser sa vocation[3]. Après la rencontre de Madame de Chantal et de François de Sales, Jeanne-Charlotte fut également présentée au saint homme. Ce dernier apprécia grandement son humilité et sa « qualité d'âme ». Il projetait justement à cette époque la fondation d'un nouvel ordre. « Ma fille », lui dit-il un jour qu'elle le questionnait sur sa vocation, « vous contenterez-vous de courir le même prix de Madame de Chantal ? — Mon père, c'est un bonheur que je n'ose espérer ! — Or sus, ma fille, demeurez donc en paix, et ne pensez plus qu'à bien aimer celui qui vous veut toute sienne ».

La Visitation

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Ces mots annonçaient la fondation de l'ordre de la Visitation Sainte-Marie, dont madame de Chantal et Jeanne-Charlotte seraient les premières recrues. Arrivé à Annecy en 1610, François de Sales les installa dans la maison dite de la Galerie. La petite troupe fut rejointe par une autre recrue, Jaqueline Favre, et toutes trois ensemble, elles commencèrent le l'institut de la Visitation.

Lors du commencement, François de Sales voulut leur apprendre l'humilité et la résilience. Il fit passer en premier madame de Chantal, mais préféra accorder à Jaqueline Favre la place de seconde religieuse de l'ordre malgré les protestations de madame de Chantal. Il savait bien que Jeanne-Charlotte se soumettrait humblement à sa décision. C'est ainsi qu'elle devint non la seconde, mais la troisième sœur de l'ordre.

Elle occupa les fonctions d’économe, d'infirmière et de maîtresse des novices. Quand madame de Chantal et François de Sales durent s'absenter pour des raisons familiales, elle eut la charge de diriger la galerie.

Rapidement, la réputation de la Visitation Sainte-Marie dépassa les frontières et il fallut songer à s'étendre au-delà du monastère d'Annecy.

Les fondations

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Ancien monastère de la Visitation de Riom (1640), vue de l'aile Sud. Actuellement (établissement des maristes[4]).

La Mère de Bréchard fut appelée à fonder plusieurs monastères :

  • la Visitation de Moulins en 1616 ;
  • la Visitation de Nevers en 1620 ;
  • la Visitation de Riom en 1623.

L'arrivée à Moulins se fit dans une grande pauvreté. Les sœurs, pensant que la fondation était assurée, n'avaient rien emporté. Mais la bienfaitrice n'avait en réalité acheté qu'une simple maison, sans meubles ni vivres. La mère de Bréchard dirigea donc dans un premier temps cette communauté dans la plus parfaite pauvreté. L'humilité et la ferveur des religieuses faisaient de cette simplicité une joie, et, bien vite, l'argent finit par arriver. On fit construire un premier monastère et une chapelle, que la mère de Bréchard voulut aussi belle que possible. (Cette chapelle fut plus tard remplacée par l'actuelle chapelle de la Visitation de Moulins.)

Après le succès de Moulins, il fut question d'une fondation à Nevers où les autorités souhaitaient la venue de la Mère de Bréchard pour l'établissement. Cependant, à Moulins, personne ne souhaitait son départ craignant que cela fût un rude coup pour la jeune communauté. Défense fut même faite à quiconque de transporter les Visitandines. La Mère de Bréchard dut donc renoncer à fonder le monastère en personne. Mais elle envoya quelques religieuses de confiance sous la direction d'une sœur d’Annecy. Elles partirent de nuit sur un bateau arrivé après l'avertissement. La communauté put donc être fondée, et même si la Mère de Bréchard n'en fut pas la première supérieure, on la reconnaît comme étant la fondatrice.

Moulins étant finalement bien implantée, on laissa partir la Mère de Bréchard pour la ville de Riom dans le Puy-de-Dôme où l'on souhaitait depuis longtemps recevoir les Visitandines. Mais les consuls de la ville s'opposèrent à l'arrivée de la Visitation, le nombre de monastères dans la ville ayant plus que doublé en une vingtaine d'années. Les habitants, eux, étaient divisés, craignant une hausse des taxes. Il fallut toute la persévérance et l'humilité de la Mère de Bréchard pour vaincre les hostilités et rassurer les habitants. La Visitation de Riom fut inaugurée le , jour de la fête de l'Immaculée Conception, en présence de Jeanne de Chantal elle-même[5]. Le monastère attira vite un grand nombre de postulantes et la Mère de Bréchard devint une personnalité et une conseillère très appréciée par les Riomois[6].

La fin de vie

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Après avoir été deux fois supérieure du monastère de Riom, elle finit par déposer la charge, contrainte par ses maladies. Malgré tout, pour s'occuper des projets de la construction d'un nouveau monastère, elle surmonta une dernière fois ses douleurs. Quand l’on vint lui dire qu’elle s’en allait tout doucement, elle s’exclama prenant dans ses bras la supérieure : « Ne craignez pas ma chère mère que cette nouvelle m’afflige, au contraire, je ne puis recevoir plus douce consolation ! »

La supérieure s’étant retirée, une joie extraordinaire illumina son visage. Elle redit aux sœurs présentes toute la joie qu’elle avait d’aller voir le Seigneur, combien ses fautes étaient grandes, mais combien la miséricorde de Dieu l’était plus encore. Puis elle poursuivit, répétant ces mots : « Oh la douce parole ! Il faut déloger du bannissement ! Moi, misérable, j’irai voir mon Dieu ! »

Elle mourut entourée de la communauté le mercredi [7].

Morte en réputation de sainteté, il est rapidement question de commencer son procès de béatification. Sept ans après sa mort, son corps est retrouvé intact (incorruptibilité). De nombreux miracles auraient été obtenus par son intercession[8].

En 1709, son procès est ouvert à Rome mais mis en attente au profit de la cause de son amie Jeanne de Chantal (les deux causes avaient été envoyées ensemble) ; il ne pourra reprendre à cause de la Révolution française[9].

Une nouvelle tentative est engagée au siècle dernier, mais elle retombe dans l'oubli durant la période du concile Vatican II.

Aujourd'hui

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Après le départ des Visitandines de Riom en 1972, le souvenir de Jeanne-Charlotte s'est progressivement éteint à Riom et elle est bien oubliée aujourd'hui.

En , deux passionnés décident de créer l'association des Amis de la Mère de Bréchard[10], qui cherche à faire connaître son histoire.

L'intercession de la Mère de Bréchard est toujours demandée par certaines personnes dans les lieux où elle a vécu, ainsi que dans les monastères de la Visitation, même si tous attendent l'avis de l'église sur le sujet. Ainsi, les Visitandines de Riom écrivaient au siècle dernier que si la Mère de Bréchard était quelquefois qualifiée de « vénérable » ou de « bienheureuse », ce n'était en aucun cas pour devancer la décision de l'église, mais bien par tradition et respect pour la « Bonne-Mère »[11].

Notes et références

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  1. C'est-à-dire qu'elles étaient devenues beaucoup moins rigoureuses avec les règles de leur ordre.
  2. Vie manuscrite de la mère de Bréchard, archives d'Annecy.
  3. Les commencements de la Visitation, manuscrit autographe de la Mère de Bréchard.
  4. Institution Sainte-Marie Site de l'institution Sainte-Marie de Riom.
  5. Lettres de sainte Jeanne de Chantal.
  6. Archives départementales du Puy-de-Dôme.
  7. Édouard Éverat, Le monastère de la Visitation Sainte-Marie de Riom et Jeanne-Charlotte de Bréchard.
  8. Édouard Éverat, Vie de Jeanne-Charlotte de Bréchard, liste des miracles.
  9. Françoise-Madeleine de Chaugy, Les vies des quatre premières Mères de l'ordre de la Visitation Sainte-Marie.
  10. Site de l'qssociation.
  11. Archives de la Visitation d'Annecy.

Bibliographie

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  • Édouard Éverat, « Vie de Jeanne-Charlotte de Bréchard, troisième fille de l'ordre de la Visitation Sainte-Marie, fondatrice des monastères de Moulins et de Riom », Mémoires de l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Clermont-Ferrand, Clermont-Ferrand, t. XXXIX,‎ , 283 p.
  • Édouard Éverat, « Le monastère de la visitation Sainte-Marie de Riom et Jeanne-Charlotte de Bréchard : étude historique », Mémoire de l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Clermont-Ferrand « Fascicule cinquième »,‎ , p. 50-98.
  • Marie-Agnès Laplace, Jeanne-Charlotte de Bréchard et la Visitation au dix-septième siècle. Vie et œuvres. Contribution à l'étude du renouveau de la littérature de spiritualité au début du dix-septième siècle (thèse de doctorat en littérature française), Limoges, .
  • Jean-Baptiste Ledys, « L'étrange destinée du corps de la fondatrice du couvent des Visitandines, à Riom », La Montagne,‎ (lire en ligne).

Liens externes

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