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Diatribe

genre littéraire antique

La diatribe (du grec ancien διατριβή, diatribē, « passe temps », et de là « discussion (philosophique) »[1]) est un genre littéraire antique, pratiqué notamment par les cyniques et les stoïciens. Il s'agit de dialogues (en général fictifs) à visée morale, qui prenaient souvent une forme polémique et violente[1] : c'est cette dernière caractéristique qui explique l'évolution vers le sens actuel du mot.

La diatribe dans la littérature et la philosophie antiques

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Définition classique

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Le mot « diatribe » signifie d'abord en grec ancien « passe-temps », puis « entretien » avant de désigner, mais plus tard, la forme écrite donnée à cet entretien. C'est donc au terme d'une longue évolution que ce terme en est venu à désigner au IIIe siècle av. J.-C. un genre littéraire[2]. Chez l'un de ses représentants importants, le philosophe cynique Bion de Borysthène (335-245; généralement tenu comme étant à l'origine même de cette forme littéraire[3]) la diatribe est « un exposé qui interpelle sur un ton familier un interlocuteur imaginaire et met en œuvre tout un arsenal rhétorique de questions, de personnifications, de comparaisons tirées de la vie quotidienne et d'anecdotes pour donner plus d'efficacité à la leçon morale[2]. »

La diatribe prend donc la forme d'un dialogue avec un interlocuteur en général fictif. Visant à la prédication morale, elle traite de lieux communs de l'éthique. On voit aussi qu'elle use des procédés de la rhétorique et, pour renforcer ses effets sur un auditoire constitué d'un large public non spécialisé, recourt, selon le cas, à l'ironie, à l'invective et à la polémique. Parmi les philosophes qui ont pratiqué ce genre, on peut citer Télès[2], chez les cyniques, et Musonius Rufus, chez les stoïciens.

Mais la diatribe ne plut pas à tout le monde; ainsi, selon Diogène Laërce[4], Ératosthène reprochait à Bion d'avoir « le premier revêtu la philosophie d'une robe à fleurs »[2]. Toutefois, relève Suzanne Saïd, le discours philosophique a clairement été influencé par le même Bion, comme on peut le voir dans le titre Diatribes (« Entretiens »), donné par Arrien aux notes qu'il a prises durant les enseignements du philosophe stoïcien Épictète[2].

Critique de cette définition

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Le philologue allemand Halbauer a montré[Où ?] en 1911 que le concept de « diatribe » comme genre dans les littératures de l'Antiquité était en fait une construction de la critique de la fin du XIXe siècle. Car le mot grec διατριβή (diatribē) ne désignait pas un genre littéraire ; il s'appliquait de manière assez vague à l'activité pédagogique et aux écrits en rapport avec elle[Note 1]. La situation scolaire (réelle ou fictive) et le rapport maître-disciple seraient alors l'élément essentiel pour justifier la qualification de diatribe[5]. C'est en ce sens qu'Arrien a publié sous le titre de ∆ιατριϐαί (« Diatribes », traduit par « Entretiens ») des notes prises alors qu'il suivait les cours d'Épictète. La brève définition qu'en donne Laurent Pernot[6] va d'ailleurs dans ce sens: « leçon en vif sur des sujets moraux ».

On peut remarquer que les auteurs XVIIe et XVIIIe siècles écrivant en latin, qui utilisent parfois le mot latin diatribe dans le titre de leurs ouvrages[Note 2], prennent ce mot dans un sens très large (discours, discussion, dissertation), mais parfois avec une intention polémique[Note 3].

La diatribe aujourd'hui

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Une diatribe est un texte ou un discours qui attaque de façon virulente une personne ou une institution. C'est une critique amère, violente, voire injurieuse. Elle est alors synonyme de pamphlet, de libelle (que Voltaire définissait un « petit livre d'injures »[7]), et peut se rapprocher de la satire[1].

Plusieurs hommes de lettres, tels Émile Zola ou Victor Hugo, s'exprimaient sous cette forme dans divers journaux. La lettre ouverte J'accuse... ! d'Émile Zola, parue dans le journal l'Aurore, en est un bon exemple[réf. nécessaire].

Notes et références

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  1. Dans un sens technique, le mot « diatribe » désignait aussi une figure de rhétorique.
  2. Mentionnons: Johann Friedrich Gronovius, Athanasius Kircher, Johann Ernst Immanuel Walch.
  3. Citons: Johann Caspar Eisenschmidt, Friedrich Spanheim l'Ancien.

Références

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  1. a b et c « Diatribe », sur cnrtl.fr (consulté le )
  2. a b c d et e Suzanne Saïd, Monique Trédé, Alain Le Boulluec, Histoire de la littérature grecque, Paris, PUF, coll. « Quadrige Manuels », 2019 [4e éd. mise à jour], 724 p. (ISBN 978-2-130-82079-6), p. 369-372
  3. Bultman 1910, p. 6
  4. Livre IV, 52 [lire en ligne (page consultée le 9 août 2023)]
  5. Le point sur la question a été fait par Pedro Pablo Fuentes González, 1998, chap. VI : « Le genre littéraire : la question de la "diatribe" », p. 46 et suiv. (V. Bibliographie)
  6. Laurent Pernot, La Rhétorique dans l'Antiquité, Paris, Le Livre de Poche, , 351 p. (ISBN 978-2-253-90553-0), p. 99
  7. Voltaire, « Libelle » in Dictionnaire philosophique, 1764. [lire en ligne (page consultée le 4 août 2023)]

Voir aussi

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Bibliographie

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  • André Oltramare, Les origines de la diatribe romaine, Lausanne - Paris, Payot, , 315 p. (présentation en ligne)
  • Émile Bréhier, Histoire de la philosophie, vol. I : L'Antiquité et le Moyen Âge, Paris, Félix Alcan, , 788 p. (lire en ligne)
  • (de) Rudolf Bultman, Der Stil der paulinischen Predigt und die kynisch-stoische Diatribe [« Le style de la prédication paulinienne et la diatribe cynico-stoïque »], Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, , 110 p. (lire en ligne)
  • Pedro Pablo Fuentes GONZÁLEZ, Les diatribes de Télès, Paris, Vrin, coll. « Histoire des doctrines de l’Antiquité classique » (no 23), , 640 p. (ISBN 978-2-711-61350-2, présentation en ligne)
  • (en) Abraham J. Malherbe, « MH ΓENOITO (by no means) in the Diatribe and Paul », The Harvard Theological Review, vol. 73, nos 1/2,‎ , p. 231-240 (lire en ligne Accès payant )