Brutus capitolin
Le Brutus capitolin (en italien Bruto capitolino) ou « Pseudo Brutus » est un buste de bronze typique de la période de la république romaine. Il est considéré souvent comme représentant le consul Lucius Junius Brutus , et est généralement daté de la fin du IVe au début du IIIe siècle av. J.-C., mais peut-être aussi plus tardif, du IIe siècle av. J.-C.[1] ou du début du Ier siècle av. J.-C. Le buste mesure 69cm de hauteur et est actuellement situé dans la salle des Triomphes des musées du Capitole à Rome[2]. Traditionnellement considéré comme un exemple précoce de portraiture romaine, peut-être réalisé par un artiste étrusque influencé par la sculpture hellénistique contemporaine du portrait, il peut s'agir d'une « œuvre archaïsante du Ier siècle av. J.-C. »[3]. La tête romaine a été pourvue d'un buste en bronze recouvert d'une toge à la Renaissance[4].
Date |
Vers |
---|---|
Type |
Statue en bronze |
Technique |
Bronze (procédé indirect à la cire perdue) |
Hauteur |
69 cm |
No d’inventaire |
S 1183 |
Localisation |
Rome |
Les sculptures de bronze romaines sont très rares parce qu'elles ont souvent été fondues à diverses époques pour récupérer la matière première.
Histoire
modifierCe bronze a été découvert à Rome en 1500 et associé sans véritables preuves à Lucius Junius Brutus, le fondateur mythique de la République romaine. La statue est actuellement conservée au palais des Conservateurs des Musées du Capitole à Rome où elle a rejoint les collections dans la seconde moitié du XVIe siècle[5].
Il fut légué en 1564 à la ville de Rome par le cardinal Rodolfo Pio. Son identification en tant que représentation de l'ancien homme d'État romain Lucius Junius Brutus a d'abord été formulée par des antiquaires qui l'ont examiné à la Renaissance, sur la base de leurs lectures de historiographie latine. Cependant, il n'y a aucune preuve directe qu'il représente Brutus[6].
Le premier dessin du buste a été réalisé par l'artiste néerlandais Maarten van Heemskerck entre 1532 et 1536 ; il a été décrit pour la première fois par écrit en 1549[7].
Le buste a été conservé sur la colline du Capitole et à partir de 1627 dans le palais des Conservateurs (Musées du Capitole), jusqu'à ce que le pape Pie VI le remette à la Première République (France) en 1797. Il a ensuite été utilisé dans le cortège triomphal de Napoléon Bonaparte à Paris en juillet 1798[8].Il a finalement été rendu au palais des Conservateurs en 1816, où il est resté depuis[8].
Authentification et datation
modifierPremières hypothèses lors de la découverte
modifierLes spéculations selon lesquelles le buste était censé représenter Lucius Junius Brutus ont commencé avec les écrits du naturaliste italien du XVIe siècle Ulisse Aldrovandi. L'antiquaire et éditeur néerlandais du XVIIe siècle de Lactance Gallaeus Servatius a allégué qu'une pièce de monnaie romaine frappée pendant le consulat de Brutus représentant Lucius Junius Brutus, frappée par Marcus Junius Brutus à la suite de l'assassinat de Jules César présentait des traits faciaux similaires à ceux du buste[9]. L'historien de l'art allemand du XVIIIe siècle Johann Joachim Winckelmann n'était pas le seul parmi ses contemporains à penser que le buste ne représentait pas réellement Brutus ; l'antiquaire italien Ennius Quirinus Visconti a exprimé des doutes sur le fait qu'il représente vraiment Brutus et a tenu à souligner que la tête et le buste n'étaient pas à l'origine faits ensemble ou l'un pour l'autre. Cette idée a été suggérée pour la première fois au XVIIe siècle lorsque certains antiquaires ont envisagé que la tête appartenait à l'origine à une plus grande statue de bronze qui se trouvait autrefois sur la colline du Capitole[8].
Recherches contemporaines
modifierUne œuvre d'inspiration hellénistique
modifierLes érudits plus récents du XXe siècle se sont moins préoccupés de savoir s'il s'agissait ou non d'un portrait idéalisé de Brutus et plus préoccupés de la datation et de la provenance exactes du buste. Il a été reconnu comme étant d'Italie centrale, avec une influence claire de la sculpture et du portrait grecs de l'ère hellénistique de la première moitié du IIIe siècle av. J.-C.[8]. Il peut, ainsi, provenir d'une statue en pied. Il a peut-être été réalisé pour honorer une personnalité publique contemporaine de l'expansion de Rome au IIIe siècle av. J.-C.[10]. Cependant, pour d'autres, il est tout à fait possible de faire descendre la datation à l'aube de l'époque impériale romaine, et de le dater au « plus tard au début du premier siècle av. J.-C., quand il était à la mode de créer des « portraits » imaginaires vivants, des premières célébrités romaines » et des hommes illustres du passé mythique de Rome[11], comme cela serait suggéré par le « traitement des détails »[3].
Les érudits plus récents du XXe siècle se sont moins préoccupés de savoir s'il s'agissait ou non d'un portrait idéalisé de Brutus et plus préoccupés de la datation et de la provenance exactes du buste. Il a été reconnu comme étant d'Italie centrale, avec une influence claire de la sculpture et du portrait grecs de l'ère hellénistique de la première moitié du IIIe siècle av. J.-C.[8]. Il peut, ainsi, provenir d'une statue en pied. Il a peut-être été réalisé pour honorer une personnalité publique contemporaine de l'expansion de Rome au IIIe siècle av. J.-C.[10]. Cependant, pour d'autres, il est tout à fait possible de faire descendre la datation à l'aube de l'époque impériale romaine, et de le dater au « plus tard au début du premier siècle av. J.-C., quand il était à la mode de créer des « portraits » imaginaires vivants, des premières célébrités romaines » et des hommes illustres du passé mythique de Rome[11], comme cela serait suggéré par le « traitement des détails »[3].
Un portrait d'ancêtre, du milieu de la République
modifierGilles Sauron[12] constate que ce portrait « est loin de l'expressivité à laquelle atteignaient les portraitistes grecs contemporains ». Il le situe dans ce moment où les progrès de l'hellénisation, au IVe siècle AEC, s'accompagne avec la multiplication des dédicaces de statues sur le forum. L'installation de ces statues impressionnantes sur la place centrale de Rome coïncide avec ce moment où les grandes familles romaines du milieu de la République sont contraintes d'accepter l'égalité des droits politiques arrachée par la plèbe à ces grandes familles, les patriciens. Ces dernières revendiquent des vertus, ancestrales, de dignité et de gravité qui sont bien manifestées dans ce portrait. Gilles Sauron fait aussi remarquer que le personnage porte la barbe. Or, dès le début du IIIe siècle AEC, le port de la barbe était devenu une rareté à Rome. Le sarcophage (daté vers 280-270) d'un certain Scipion, aïeul de Scipion l'Africain, porte le surnom de Barbatus[13], ce qui témoigne, en effet, d'un usage de la barbe devenu exceptionnel à cette époque. Donc, selon Gilles Sauron, « Le pseudo-Brutus pourrait être l'image d'un ancêtre d'une grande famille romaine du milieu de la République. »[14]
Description
modifierUn portrait psychologique
modifierLes traits du personnage traduisent une recherche de réalisme physionomique, tendant à voir dans ce buste un portrait authentique. Les expressions faciales relèvent d'une volonté de réaliser un portrait psychologique, insistant sur la gravité et la tension idéale de l'homme politique romain, mesuré, probe, vertueux et sobre. Le visage possède une expression dure, asymétrique par sa contraction, tournée vers l'horizon, sérieuse, concentrée, et combine de plus des éléments d'origine grecque au niveau de la chevelure. Le portrait, s'il est effectivement très comparable au portrait de Lucius Junius Brutus figurant sur les pièces de monnaie de la fin de la République, est toutefois partiellement idéalisé, ayant été exécuté presque deux siècles après - au moins - la vie du protagoniste de la chute de la monarchie romaine[15]. Il s'agirait donc davantage d'une reconstruction de l'apparence et des qualités psychologiques de la personne, partant d'un archétype / carton plus ancien. Il n'est pas impossible que ce portrait ait eu pour source d'inspiration un masque de cire ou un portrait familial conservé dans les résidences familiales des Junii.
Un exemple possible de statuaire « médio-italique »
modifierSi on compare le buste à d'autres têtes statuaires relevant du style médio-italique (comme la tête de Fiesole au Louvre, le buste de San Giovanni Lipioni du Cabinet des Médailles, ou l'Arringatore de Florence), on note comme principal point commun un souci des proportions et de l'anatomie générale. Ce qui est différent, cependant, c'est le rendu des détails, qui dans le cas du Brutus, sont tout sauf un élément accessoire : en effet leur rendu minutieux et sec indique incontestablement une relation stylistique avec le portrait hellénistique du début du IIIe s. av. J.-C., donnant la datation la plus communément acceptée pour l'œuvre[15]. À cette même époque, Rome est irriguée par une forte influence en provenance du monde macédonien et épirote, ses contacts avec le sud de l'Italie (majoritairement grec et hellénisé) sont intenses, réguliers. Rome est de fait en passe de dominer toute la péninsule, les grandes familles romaines à l'œuvre derrière cette politique d'expansion auraient ainsi voulu soutenir leurs projets en s'inspirant des grandes figures du passé romain pour réaffirmer la légitimité de Rome à s'étendre dans la péninsule, du fait de l'ancienneté de sa puissance[15].
La tête faisait sûrement partie d'une statue plus grande, à taille humaine, aujourd'hui perdue.
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Brutus Capitolin de face
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Brutus Capitolin (profil droit)
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Brutus Capitlon (profil 3/4 gauche)
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Brutus Capitolin (3/4 droit)
Notes et références
modifier- (en)/(it) Cet article est partiellement ou en totalité issu des articles intitulés en anglais « Capitoline Brutus » (voir la liste des auteurs) et en italien « Bruto capitolino » (voir la liste des auteurs).
- Brilliant (2002), p. 55.
- Capitoline Brutus. Musei Capitolini . consulté le 25 août 2016.
- Strong, p. 47
- « Boston Museum of Fine Arts loan exhibition "Visiting Masterpieces: The Capitoline Brutus" », Mfa.org,
- Commune di Roma, Les musées capitolins, guide, p. 16.
- Brilliant (2002), pp. 55–6.
- Holliday (1996), pp. 235–36.
- Holliday (1996), p. 236.
- « Libertas: The Coins of Brutus », www.humanities.mq.edu.au (consulté le ).
- (en) Barbara E. Borg, A Companion to Roman Art, John Wiley & Sons, , 104 p. (ISBN 9781405192880, lire en ligne)
- Rasmussen, Tom, "Early Roman Art", in Henig, Martin (ed), A Handbook of Roman Art, p. 23, Phaidon, 1983, (ISBN 0714822140)
- Gilles Sauron est professeur d’archéologie romaine à l’Université de Paris-Sorbonne depuis 2003 : [1] : Sorbonne Université.
- « Sarcophage de Scipion Barbatus », sur Musée Pio-Clementino (consulté le ).
- Gilles Sauron, « Tête dite de Brutus », sur Encyclopædia Universalis (consulté le )
- Ranuccio Bianchi Bandinelli et Mario Torelli.
Bibliographie
modifier- Ranuccio Bianchi Bandinelli et Mario Torelli, L'arte dell'antichità classica, Etruria-Roma, Utet, Torino 1976.
- Commune di Roma, Les musées capitolins, guide, Milan, Mondadori Electa S.p.A., , 221 p. (ISBN 978-88-370-6260-6).
- Brilliant, Richard. (2002). Portraiture, reprint edition. London: Reaktion Books Ltd.
- Crawford, Michael, (1974), Roman Republican Coinage, Cambridge University Press.
- Holliday, Peter. (1996). "Capitoline Brutus", in Nancy Thomson de Grummond (ed.) An Encyclopedia of the History of Classical Archaeology. Routledge: London & New York. (ISBN 978-0313220661).
- Strong, Donald, et al., Roman Art, 1995 (1st edn. 1976), Yale University Press (Penguin/Yale History of Art), (ISBN 0300052936).