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Des aqueducs de la ville de Rome/Trad. Bailly, 1848

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Des aqueducs de la ville de Rome
(De aquæductibus urbis Romæ)


Trad. Ch. Bailly — 1848



TABLE DES MATIÈRES
(ne fait pas partie de l’ouvrage original)

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DES AQUEDUCS

DE LA VILLE DE ROME.


1. Comme toute affaire confiée par l’empereur exige les soins les plus assidus, et que, soit par une sollicitude inhérente à mon caractère, soit par fidélité et par devoir, je me sens porté non-seulement à remplir avec exactitude, mais encore à aimer les fonctions qui me sont attribuées ; et qu’en ce moment même Nerva Auguste, prince dont le zèle égale l’amour pour la république, vient de me préposer à l’intendance des eaux, en ce qui intéresse les usages, la salubrité, et même la sûreté de Rome, administration qui fut de tout temps conférée aux principaux citoyens de la ville, je crois devoir d’abord, et avant tout, ainsi que je m’en étais déjà fait une loi en d’autres circonstances, chercher à connaître ce dont je me suis chargé.

2. Il me semble, en effet, que cette connaissance est la base la plus sûre de tous nos actes, et que sans elle on ne peut juger ni de ce qu’il faut faire, ni de ce qu’il faut éviter. Il n’y a rien, à mon avis, d’aussi humiliant pour un homme qui doit être à la hauteur de ses fonctions, que de ne pouvoir les remplir sans les conseils de ses subalternes (or il ne peut échapper au besoin d’y recourir, quand il n’est pas lui-même éclairé par l’expérience). Bien que ceux-ci remplissent un rôle nécessaire au service, ils ne doivent être, en quelque sorte, que les mains ou les instruments du chef. Dans cette conviction, et selon une habitude que je me suis faite dans plusieurs de mes fonctions, tous les documents que j’ai pu recueillir concernant ma nouvelle charge, je les ai mis en ordre, et réunis comme en un seul corps, dans ce Mémoire, afin de m’en servir comme d’un guide dans mon administration. Mes autres ouvrages, fruits de ma pratique et de ma propre expérience, ont été écrits dans l’intérêt de ceux qui devaient me remplacer. Peut-être ce Mémoire sera-t-il aussi de quelque utilité à mon successeur ; mais, comme il a été fait au début de ma gestion, il est surtout destiné à m’instruire et à me diriger moi-même.

3. Et, pour prouver que je n’ai rien négligé de ce qui se rattache à la connaissance complète de mon objet, je donnerai, en premier lieu, les noms des eaux qui arrivent dans la ville ; je dirai par qui, sous quel consulat, en quelle année de la fondation de Rome chacune d’elles y a été amenée ; puis, de quels lieux et à quelle distance milliaire on l’a prise ; combien elle a exigé de canaux souterrains, de substructions et d’ouvrages en arcades. J’indiquerai ensuite la hauteur de chacune des eaux, les rapports des modules servant à en régler la distribution, et les quantités distribuées. Je dirai combien, soit hors de Rome, soit au dedans, chacun des cours d’eau fournit, selon sa force, à chaque région de la ville ; combien il y a de châteaux d’eau, publics et particuliers ; ce qu’ils donnent pour les travaux publics, pour les spectacles (appelés munera dans la classe élevée des citoyens) et pour les bassins ; ce que l’on en prend au nom de César, et ce que la faveur du prince en accorde à l’usage des particuliers ; enfin, je ferai connaître le droit de conservation des eaux, et les peines qui sanctionnent ce droit, d’après les lois, les sénatus-consultes, et les ordonnances des empereurs.

4. Jusqu’à l’an 441 de la fondation de leur ville, les Romains se contentèrent, pour leur usage, des eaux qu’ils tiraient du Tibre, des puits ou des sources. Ces dernières sont encore pour eux un objet de vénération et de culte : car on croit, comme le remarque C. Ammaranius Apollinaris, qu’elles rendent la santé aux malades. Les eaux qui arrivent maintenant à Rome sont l’Appia, l’Anio Ancien, la Marcia, la Tepula, la Julia, la Virgo, l’Alsietina, appelée aussi Augusta, la Claudia, et l’Anio Nouveau.

5. Sous le consulat de M. Valerius Maximus et de P. Decius Mus, 31 ans après le commencement de la guerre des Samnites, l’eau Appia fut amenée à Rome par le censeur Appius Claudius Crassus, depuis surnommé Cécus, qui fit aussi construire la voie Appienne depuis la porte Capène jusqu’à la ville de Capoue. Il eut pour collègue C. Plautius, qui, pour avoir recherché les veines de cette eau, reçut le surnom de Venox. Mais celui-ci abdiqua la censure au bout de dix-huit mois, trompé par son collègue, qui avait promis d’en faire autant, et Appius eut seul l’honneur de donner son nom à cette eau ; on dit même qu’il prolongea sa censure, à force de subterfuges, jusqu’à l’entier achèvement de la route et de l’aqueduc. L’eau Appia est prise dans la terre de Lucullus, entre le septième et le huitième milliaire de la route de Préneste, à l’extrémité d’un détour de 780 pas sur la gauche. Depuis sa source jusqu’aux Salines, lieu voisin de la porte Trigémine, son parcours est de 11 190 pas, dont 11 130 en canaux souterrains, et 60 tant sur des substructions que sur des arcades, jusqu’à la porte Capène. Près de la Vieille Espérance, sur la limite des jardins Torquatiens…, elle reçoit un embranchement de l’eau Augusta, qui lui fut donné comme un complément par Auguste, avec le surnom de Gémelles, qui convenait à cette réunion. Ce même embranchement prend naissance vers la sixième colonne milliaire de la voie Prénestine, à 980 pas sur la gauche, tout près de la voie Collatia ; et sa conduite jusqu’aux Gémelles est de 6 380 pas, en ouvrages souterrains. La distribution de l’eau Appia commence au bas de la colline de Publicius, près de la porte Trigémine, au lieu appelé les Salines.

6. Quarante ans après qu’on eut amené l’eau Appia, l’an 481 de la fondation de Rome, M’. Curius Dentatus, qui exerçait la censure avec L. Papirius Cursor, dirigea vers la ville un canal dérivé de l’Anio, et qu’on appelle aujourd’hui le Vieil Anio, consacrant à cette œuvre le prix des dépouilles enlevées dans la guerre contre Pyrrhus. C’était sous le deuxième consulat de Spurius Carvilius et de L. Papirius Cursor. Deux ans après, le sénat ordonna l’achèvement de cet aqueduc… À cet effet on créa, par un sénatus-consulte, un duumvirat composé de Curius, qui avait commencé les travaux, et de Fulvius Flaccus. Cinq jours après cette création, Curius mourut, et Fulvius eut seul la gloire de terminer l’ouvrage. Le Vieil Anio est pris au-dessus de Tibur, à 20 milles de la porte… Là une partie de son eau est détournée au profit des Tiburtins. La longueur de cet aqueduc est, ainsi que le niveau l’a exigé, de 43 000 pas, dont 42 779 en conduits souterrains, et 221 en travaux au-dessus de terre.

7. Cent vingt-sept ans après, c’est-à-dire l’an 608 de la fondation de Rome, sous le consulat de Ser. Sulpicius Galba et de L. Aurelius Cotta, les aqueducs de l’Appia et de l’Anio étant endommagés par la vétusté, et les eaux diminuées par les détournements frauduleux des particuliers, Marcius, qui, alors préteur, rendait la justice dans les affaires entre les citoyens et les étrangers, fut chargé par le sénat de réparer les canaux, et de reprendre les eaux usurpées. En outre, comme l’accroissement de Rome en réclamait une quantité plus considérable, le sénat confia à Marcius le soin d’amener, s’il était possible, de nouvelles eaux dans la ville, au moyen d’aqueducs plus grands. Ce fut lui qui conduisit au Capitole, par des canaux et des travaux au-dessus de terre, l’eau qui, du nom de son auteur, fut appelée Marcia. On lit dans Fenestella qu’il fut accordé à Marcius, pour cette construction, 8 400 000 sesterces ; et, comme sa préture expirait avant l’achèvement des travaux, elle fut prorogée pour un an. Dans ce temps les décemvirs, consultant sur d’autres objets les livres Sibyllins, trouvèrent, dit-on, que ce n’était point l’eau Marcia, mais l’Anio, qui devait être conduit au Capitole (telle est, du moins, la tradition la plus accréditée). Lepidus porta l’affaire devant le sénat, en parlant au nom du collége des décemvirs, sous le consulat d’Appius Claudius et de Q. Cécilius. Trois ans après, cette question fut traitée de nouveau par L. Lentulus, sous le consulat de C. Lélius et de Q. Servilius ; mais, dans les deux circonstances, le crédit de Marcius Rex prévalut, et, par conséquent, l’eau Marcia fut conduite au Capitole. Elle est prise vis-à-vis la trente-sixième colonne milliaire de la voie Valérienne, au bout d’un détour de 3 000 pas, que l’on fait sur la droite en venant de Rome. À gauche du trente-huitième milliaire de la voie Sublacensis (qui fut pavée pour la première fois sous le principat de Néron), cette eau, dans un espace de 200 pas…, est d’une couleur très-verte. Son parcours, depuis sa source jusqu’à Rome, est de 61 710 pas et demi, dont 54 247 et demi en canaux souterrains, 7 400 en ouvrages au-dessus de terre, qui comprennent 463 pas d’arcades établies loin de la ville, en plusieurs endroits de la vallée du Peuple Romain ; plus près de la ville, à compter du septième milliaire, 528 pas en substructions, et le reste, 6 472 pas, en arcades.

8. L’an de Rome 627, sous le consulat de M. Plautius Hypséus et de Fulvius Flaccus, les censeurs Cn. Servilius Cépion et L. Crassus Longinus, surnommé Ravilla, amenèrent dans la ville, et au Capitole, l’eau appelée Tepula, prise dans la terre de Lucullus, lieu qui appartient, selon quelques-uns, au territoire de Tusculum. On trouve la tête de l’aqueduc vers le dixième milliaire de la voie Latine, en faisant à droite, quand on vient de Rome, un détour de 2 000 pas. C’est de là qu’elle est conduite, dans son propre canal, jusque dans la ville.

9. Plus tard, sous le deuxième consulat de César Auguste, qui avait pour collègue L. Volcatius, l’an de Rome 719, M. Agrippa, alors édile après son premier consulat, recueillit les sources d’une autre eau, vers le douzième milliaire de la voie Latine, à 2 000 pas sur la droite quand on vient de Rome, et conduisit par l’aqueduc Tepula cette même eau, qui fut appelée Julia, du nom de celui qui l’avait découverte ; toutefois, l’aqueduc ayant deux canaux distincts, la Tepula conserva son nom. Le parcours de l’eau Julia est de 15 426 pas, dont 7 000 en ouvrages au-dessus de terre, qui comprennent eux-mêmes 528 pas de substructions établies dans la partie rapprochée de Rome, en deçà du septième milliaire, et 6 472 en arcades, formant le reste de la longueur. Près de la source de l’eau Julia, il en coule une autre appelée Crabra. Agrippa ne l’avait pas prise, soit qu’il en fît peu de cas, soit qu’il voulût la laisser aux habitants de Tusculum, qui en avaient joui jusqu’alors : en effet, toutes les maisons de campagne situées sur ce territoire se la distribuent chaque jour, et la reçoivent alternativement dans des proportions déterminées. Mais nos fontainiers, moins désintéressés qu’Agrippa, s’en emparèrent comme d’un supplément destiné à la Julia ; et c’était moins pour augmenter celle-ci que pour en faire des distributions à leur profit. Il s’ensuivit que l’eau Crabra fut abandonnée par ordre de l’empereur, et rendue aux Tusculans, qui, maintenant, sont peut-être étonnés de ce retour, ignorant à qui ils sont redevables d’une abondance à laquelle ils n’étaient plus habitués ; et l’eau Julia, dont les détournements subreptices ont été repris, eut dès lors tout son volume, même en temps de grande sécheresse. La même année Agrippa restaura les aqueducs, presque en ruine, de l’Appia, de l’Anio, de la Marcia, et apporta un soin particulier à pourvoir la ville de bon nombre de fontaines.

10. Après son troisième consulat, sous celui de C. Sentius et de Q. Lucretius, Agrippa, 13 ans après avoir ramené à Rome l’eau Julia, y fit aussi parvenir l’eau Vierge, qu’il prit dans la terre de Lucullus. Ce fut le cinquième jour des ides de juin qu’elle coula pour la première fois dans la ville. On lui donna le nom de Vierge, parce qu’une jeune fille en montra quelques veines à des soldats qui cherchaient de l’eau, et qui, fouillant d’après ses indications, en trouvèrent une grande quantité. On voit dans un petit temple érigé près de la source, une peinture qui rappelle cette origine. La prise d’eau est vers le huitième milliaire de la route de Collatie, dans des lieux marécageux. Un bassin de briques revêtues de ciment reçoit les différentes sources de cette eau, qui, accrue encore par quelques affluents, parcourt un espace de 14 105 pas, comprenant un canal souterrain de 12 865 pas, plus 1 240 pas d’ouvrages au-dessus de terre, dont 540 en substructions sur plusieurs points, et 700 en arcades. Les affluents coulent dans des conduits souterrains, dont la longueur totale est de 1 405 pas.

11. Quel est le motif qui a déterminé Auguste, prince si prévoyant, à introduire à Rome l’eau Alsietina, qu’on nomme aussi Augusta ? Je l’ignore, car cette eau n’offre aucun agrément : elle est peu salubre, et le peuple n’en tire aucun profit. Peut-être a-t-il voulu éviter de conduire des eaux plus utiles dans la Naumachie, qu’il faisait construire alors, et à laquelle il destina exclusivement cette eau Alsietina ; il accorda même le trop-plein de la Naumachie pour l’irrigation des jardins situés plus bas, et pour différents usages des particuliers. Cependant, les quartiers au delà du Tibre sont forcés, pendant qu’on répare les ponts, ce qui arrête les eaux en deçà du fleuve, de recourir à l’eau Alsietina pour alimenter leurs fontaines publiques. Elle est dérivée du lac Alsietinus, près du quatorzième milliaire de la voie Claudienne, à 6 500 pas sur la droite. Son aqueduc a de longueur 22 172 pas, dont 358 en arcades.

12. Pour suppléer à l’eau Marcia dans les temps de sécheresse, Auguste amena dans l’aqueduc de celle-ci, par un conduit souterrain, une autre eau non moins bonne, qui fut appelée Augusta, du nom de son auteur. Elle prend sa source au delà de celle de l’eau Marcia, à laquelle elle se joint par un canal de 800 pas.

13. Dans la suite, comme ces sept aqueducs ne paraissaient pas suffisants pour les besoins publics et les plaisirs des particuliers, C. César Caligula, qui succéda à Tibère, en commença deux autres la seconde année de son règne, sous le consulat de M. Aquillius Julianus et de P. Nonius Asprenas, 789 ans après la fondation de Rome. Les travaux furent achevés d’une manière très-somptueuse, et inaugurés par Claude pendant le consulat de Sylla et de Titianus, l’an de Rome 803, aux calendes d’août. On donna le nom de Claudia à celle de ces deux eaux qui est tirée des fontaines Cérulea et Curtia ; elle est presque aussi bonne que l’eau Marcia. L’autre fut appelée Nouvel Anio, afin que l’on pût distinguer, par leurs dénominations, les deux eaux dérivées de l’Anio. Cette dernière est la plus abondante de toutes. Le nom de Vieil Anio fut donné à la plus ancienne des deux.

14. L’eau Claudia est prise vers le trente-huitième milliaire de la voie Sublacensis, à 300 pas sur la gauche. Elle est le produit de deux sources très-abondantes et très-belles que l’on nomme, l’une Cérulea, à cause de sa couleur bleuâtre, et l’autre Curtia. Elle reçoit aussi la source appelée Albudina, dont l’eau est tellement bonne, que, réunie à la Marcia, toutes les fois que celle-ci a besoin de supplément, elle ne lui fait rien perdre de sa qualité par son mélange. Comme la Marcia paraissait suffisamment pourvue, on amena dans l’aqueduc Claudia une dérivation de l’eau Augusta, dont le réservoir, cependant, resta ouvert du côté de la Marcia, de manière que, quand le canal de celle-ci ne pourrait la recevoir, elle coulât dans celui de la Claudia. La longueur de ce dernier est de 46 406 pas, dont 36 230 en conduits souterrains, et 10 176 en ouvrages au-dessus de terre, savoir 3 076 pas en arcades dans plusieurs endroits rapprochés de la source, et, plus près de la ville, en deçà du septième milliaire, 609 pas en substructions, plus 6 491 en arcades.

15. Vers le quarante-deuxième milliaire de la voie Sublacensis, le Nouvel Anio est dérivé de la rivière de ce nom, qui, traversant des terres cultivées et un sol gras, détrempe ses rives, et a, même hors des temps de pluie, des eaux limoneuses et troubles. C’est pourquoi on a établi à la tête de l’aqueduc une piscine épuratoire, où l’eau, en sortant de la rivière, se repose et se clarifie avant d’entrer dans son canal ; encore arrive-t-elle trouble dans la ville après chaque pluie qui survient. À cette conduite on a réuni le ruisseau appelé Herculien, qui a son origine vers le trente-huitième milliaire de la même voie, vis-à-vis les sources de la Claudia, lesquelles sont au delà de la rivière et du chemin. Ce ruisseau est naturellement très-pur ; mais il perd, par ce mélange, le mérite de sa limpidité. Le parcours du Nouvel Anio est de 58 700 pas, dont 49 300 en conduits souterrains, et 9 400 en ouvrages au-dessus de terre, savoir 2 300 pas en substructions ou en arcades sur plusieurs points de la partie supérieure, et, plus près de la ville, en deçà du septième milliaire, 609 pas en substructions, plus 6 491 en arcades. Ces arcades, qui sont les plus élevées, ont en certains endroits une hauteur de 109 pieds.

16. Comment comparer à ces constructions si nombreuses et si vastes, exigées par cette immense quantité d’eau, les Pyramides, évidemment inutiles, ou les ouvrages oiseux et trop vantés des Grecs ?

17. Il ne m’a point paru hors de propos d’indiquer la longueur de chacun des aqueducs, en observant celle des diverses espèces d’ouvrages qui leur appartiennent : car, mon administration ayant pour objet principal la conservation de ces canaux, il faut que celui à qui elle est confiée sache quelles sont les parties qui nécessitent les plus grandes dépenses. Nous n’avons pas borné nos soins à visiter nous-même tous les aqueducs ; nous en avons fait faire des dessins, où l’on voit les vallées avec leur profondeur, et les rivières que ces canaux traversent, ainsi que les montagnes aux flancs desquelles sont appliqués ceux-là même dont l’entretien et les réparations exigent la surveillance la plus active. À l’aide de ces dessins nous pouvons, pour ainsi dire, voir les objets eux-mêmes, et délibérer sur ce qu’il convient de faire, comme si nous étions sur les lieux.

18. Toutes les eaux arrivent dans Rome à des hauteurs différentes : il en résulte que quelques-unes alimentent des lieux élevés, et que d’autres ne peuvent atteindre certaines éminences, telles que les collines, que les décombres provenant de fréquents incendies ont encore exhaussées. Cinq de ces eaux ont un niveau assez élevé pour se répandre dans toutes les parties de la ville ; mais elles ne sont pas poussées par une égale force de pression. La plus haute est le Nouvel Anio, ensuite la Claudia, en troisième ordre la Julia, en quatrième la Tepula, et en dernier lieu la Marcia, dont la source est cependant aussi élevée que celle de la Claudia ; mais les anciens Romains lui ont laissé, en l’amenant, peu d’élévation, soit qu’ils ne connussent pas encore l’art de niveler avec précision, soit parce qu’ils enfouissaient les conduits, dans le dessein d’ôter à l’ennemi la possibilité de les couper, alors qu’ils avaient souvent des guerres à soutenir contre les peuples de l’Italie. Maintenant, comme on le voit déjà en plusieurs endroits, quand un conduit est ruiné par la vétusté, on abandonne le détour souterrain qu’exigeaient les vallées, et l’on fait passer les eaux sur des substructions et des arcades, pour en abréger le parcours. Le Vieil Anio est, par sa hauteur, au sixième rang ; et il parviendrait aussi à des endroits élevés de la ville, s’il était soutenu par des massifs et des arcades, que nécessiteraient les vallées et les régions basses qu’il aurait à traverser. Vient ensuite le niveau de l’eau Vierge, et après, celui de l’Appia. Prises dans les champs voisins de Rome, ces deux dernières ne pouvaient avoir autant de hauteur que les autres. Enfin, la moins élevée est l’Alsietina, qui se distribue dans la région au delà du Tibre, et même dans les parties les plus basses.

19. Près du septième milliaire de la voie Latine, six de ces eaux sont reçues dans des piscines couvertes, où, suspendant en quelque sorte leurs cours, elles déposent leur limon. Là leur volume est reconnu, au moyen de mesures qui y sont placées. Trois d’entre elles, la Julia, la Marcia et la Tepula (celle-ci qui avait été détournée, comme nous l’avons dit plus haut, pour être reçue dans l’aqueduc de l’eau Julia, sort maintenant de la piscine de cette dernière en quantité déterminée, et coule dans son propre canal, et sous son nom), ces trois eaux, dis-je, quittant leurs piscines respectives, vont prendre place sur les mêmes arcades. La Julia y occupe le canal supérieur ; au-dessous est celui de la Tepula, sous lequel, enfin, se trouve celui de la Marcia. Parvenues au niveau de la pente du Viminal, elles entrent sous terre l’une à côté de l’autre, et coulent ainsi jusque vers la porte Viminale, où elles reparaissent ; mais auparavant une partie de la Julia est dérivée dans la direction de la Vieille Espérance, et va se répandre dans les châteaux d’eau du mont Célius. La Marcia se jette en partie derrière les jardins de Pallante, dans le ruisseau appelé Herculien, et traverse le Célius. Son aqueduc, qui ne fournit rien à cette colline, parce que son niveau est trop bas, aboutit au-dessus de la porte Capène.

20. Le Nouvel Anio et la Claudia passent de leurs piscines sur de hautes arcades, où le Nouvel Anio occupe le conduit le plus élevé, et qui se terminent derrière les jardins de Pallante ; de là les eaux sont conduites dans la ville par des tuyaux, sauf une partie de la Claudia, que les arcades appelées Néroniennes transportent à la Vieille Espérance. Ces arcades, passant par le mont Célius, vont se terminer près du temple de Claude. Tout le volume d’eau qu’elles conduisent se distribue sur le Célius, sur le Palatin, sur l’Aventin, et dans la région au delà du Tibre.

21. En deçà du quatrième milliaire, dans la direction de la voie Latine à la voie Lavicane, le Vieil Anio passe entre des arcades. Il a aussi une piscine épuratoire ; et, vers le deuxième milliaire, une partie de ses eaux entre dans le canal appelé Octavien, qui aboutit au quartier de la voie Neuve, près des jardins Asiniens, d’où elle se distribue aux environs. Quant à l’aqueduc principal de l’Anio Vieux, il passe près de la Vieille Espérance, entre par la porte Esquiline, et répand ses eaux dans la ville par des canaux élevés.

22. L’eau Vierge, l’Appia et l’Alsietina n’ont pas de ces réservoirs ou piscines. Les arcades de l’eau Vierge commencent au-dessous des jardins de Lucilius et finissent au champ de Mars, en face des Septes. Le canal de l’Appia, dirigé sous le mont Célius et sous l’Aventin, reparaît, comme nous l’avons dit, au bas de la descente de Publicius. L’aqueduc de l’Alsietina se termine derrière la Naumachie, pour laquelle il semble avoir été construit.

23. Après avoir indiqué pour chacun des aqueducs, les noms de leurs auteurs, la date de leur construction, ensuite leurs origines et les diverses longueurs de leurs conduits, ainsi que la hauteur relative de leurs niveaux, j’ai pensé qu’il n’était point hors de propos de les reprendre tous séparément, de faire connaître l’énorme quantité d’eau qu’ils fournissent non-seulement aux usages et aux besoins du public et des particuliers, mais encore à leurs plaisirs ; le nombre des châteaux d’eau, les régions que parcourent les conduits, l’eau qui se distribue tant hors de la ville qu’à l’intérieur, et de dire combien il en est accordé pour les réservoirs ; pour les spectacles, pour les travaux publics, combien au nom de César, et combien pour l’usage des particuliers. Mais, avant de donner l’énumération des quinaires, des centenaires, et des autres modules qui constituent la mesure des eaux, il est rationnel, selon moi, d’indiquer leur origine, leur valeur et leur signification ; et, après avoir donné la règle qui sert à déterminer leurs rapports et leur formation, je montrerai comment j’ai découvert des erreurs, et quel procédé j’ai suivi pour les rectifier.

24. Les modules ont d’abord été établis d’après les doigts ou d’après les onces. On compte par doigt dans la Campanie et dans presque toute l’Italie ; l’once est en usage… Le doigt est, comme on sait, la seizième partie du pied, l’once la douzième. Et, de même qu’il y a une différence entre l’once et le doigt, on trouve aussi dans le doigt deux formes diverses. On distingue le doigt carré et le doigt rond. Le carré est de trois quatorzièmes de ses parties plus grand que le rond ; et celui-ci est de trois onzièmes des siennes plus petit que le carré, à cause du retranchement des parties angulaires.

25. Vint ensuite un module qui ne tire son origine ni de l’once, ni d’aucune des deux espèces de doigts, et qui fut mis en usage à Rome par Agrippa, selon l’opinion de quelques-uns, et selon d’autres, par les plombiers placés sous l’autorité de l’architecte Vitruve. Il fut adopté à l’exclusion des autres, et reçut le nom de quinaire. Ceux qui font Agrippa auteur de ce module, disent qu’on l’appela quinaire, parce qu’on réduisit en une seule mesure cinq petits modules anciens, appelés points, au moyen desquels on distribuait autrefois l’eau quand elle était en faible quantité. Ceux qui l’attribuent à Vitruve et aux plombiers, se fondent sur ce qu’une lame de plomb de cinq doigts de largeur, arrondie en forme de tube, fait un tuyau de cette mesure. Mais cette manière de l’apprécier est peu exacte : car, lorsqu’on courbe cette lame, la partie intérieure se resserre, et la partie extérieure s’étend. Ce qu’il y a de plus probable, c’est que le nom de quinaire vient du diamètre, qui est de cinq quarts de doigt, proportion qui s’applique également aux autres modules jusqu’au vicenaire, chacun d’eux prenant son accroissement de l’addition successive d’un quart de doigt au diamètre : ainsi le senaire a six quarts de doigt de diamètre, le septenaire sept, et ainsi de suite jusqu’au vicenaire.

26. Tout module s’évalue, soit par le diamètre, soit par le périmètre, soit par l’aire de l’entrée du tuyau ; c’est ce qui fait connaître sa capacité. Pour saisir plus facilement la différence que présentent l’once, le doigt carré, le doigt rond et le quinaire, nous prendrons pour base le quinaire lui-même, module le mieux déterminé, et le plus généralement adopté. Ainsi, le module de l’once a de diamètre un doigt et un tiers de doigt : il contient un quinaire et plus d’un huitième de quinaire, c’est-à-dire un quinaire plus un huitième, trois scrupules deux tiers. Le doigt carré, réduit en rond, a de diamètre un doigt, un huitième de doigt et un scrupule : il contient les trois quarts d’un quinaire, plus une demi-once et un sicilique. Le doigt rond a un doigt de diamètre : il équivaut à sept onces et demie et un sixième d’once de quinaire.

27. Au reste, il y a pour les modules dérivés du quinaire deux modes d’accroissement. Le premier est la multiplication du quinaire lui-même, c’est-à-dire l’admission de plusieurs quinaires dans le même orifice, d’où il résulte que la grandeur de cet orifice est en raison du nombre des quinaires. Mais, par un usage généralement observé de nos jours, quand il a été fait concession de plusieurs quinaires, au lieu de les conduire tous dans un même tuyau, qui serait trop souvent percé le long des chemins, on les réunit dans un château d’eau, où l’on en fait la répartition.

28. L’autre mode d’accroissement n’est point basé sur le nombre des quinaires, mais sur la mesure du diamètre ; de là vient le nom des modules, ainsi que l’augmentation de leur capacité. Par exemple, un quinaire au diamètre duquel on ajoute un quart de doigt, devient un senaire, dont, toutefois, la capacité n’augmente pas dans la proportion indiquée par ce mot, puisqu’il ne contient qu’un quinaire, cinq onces et un sicilique ; et, au moyen de cette addition successive d’un quart de doigt aux diamètres, comme on l’a dit plus haut, on obtient les septenaires, les octonaires, jusqu’aux vicenaires.

29. Vient ensuite la supputation qui a pour base le nombre des doigts carrés contenus dans l’aire, c’est-à-dire dans l’orifice de chaque module. C’est de là aussi que les tuyaux prennent leur dénomination : car celui dont l’aire, ou l’orifice arrondi, contient vingt-cinq doigts carrés, est appelé tuyau de vingt-cinq. On forme de même le trentenaire, et, par l’augmentation successive des doigts carrés, on s’élève jusqu’au tuyau de cent vingt.

30. Dans le tuyau vicenaire, les deux manières de compter, dont il est la limite, offrent presque le même résultat : car, d’après le calcul établi pour les premiers modules, son diamètre, étant de cinq doigts entiers, contient vingt quarts de doigt ; et, selon l’évaluation de la seconde série des modules, ce même tuyau donne un peu moins de vingt doigts carrés.

31. La proportion des tuyaux quinaires, jusqu’à celui de cent vingt, est établie pour tous les modules comme nous l’avons indiqué, et reste la même dans tous les cas : d’ailleurs, elle est conforme à celle des modules déterminés par les règlements de notre très-invincible et très-pieux empereur. Aussi, soit que l’on adhère à la raison, soit qu’on se soumette à l’autorité, les modules ainsi consacrés font loi. Cependant, les fontainiers, tout en observant le plus souvent la règle reconnue, ont modifié quatre modules, le duodénaire, le vicenaire, le centenaire, et celui de cent vingt.

32. L’erreur n’est pas grande sur le duodénaire, module qui est d’ailleurs peu en usage : ils ont ajouté à son diamètre une demi-once et un sicilique de doigt, et ont ainsi augmenté d’un quart de quinaire sa capacité. Dans les trois autres modules, le changement est plus considérable : ils réduisent d’un demi-doigt le diamètre du vicenaire, ce qui ôte à sa capacité trois quinaires et une demi-once : c’est le module, ainsi réduit, qu’ils emploient le plus souvent dans les distributions d’eau. Quant au centenaire, et à celui de cent vingt, dont ils se servent toujours pour recevoir l’eau, ils ne les diminuent pas, mais ils les augmentent : ils ajoutent au diamètre du centenaire deux tiers de doigt et une demi-once et donnent ainsi de trop à sa capacité 10 quinaires et demi, une demi-once et un sicilique. Enfin, ils ajoutent au diamètre du tuyau de cent vingt, trois doigts sept onces et demie, et à sa capacité, 65 quinaires, trois quarts et un sicilique.

33. Ainsi, d’un côté, en réduisant le vicenaire, avec lequel ils distribuent ordinairement, et, d’autre part, en en augmentant le centenaire et celui de cent vingt, modules avec lesquels ils reçoivent toujours, les fontainiers gagnent sur le centenaire 25 quinaires, dix onces un sixième, et sur celui de cent vingt, 84 quinaires, une once, un sicilique. Le calcul peut le prouver aussi bien que le fait, qui est évident : car pour le vicenaire, que César a fixé à seize quinaires, ils n’en donnent que treize ; et, ce qui est également certain, après avoir augmenté le centenaire, ils le réduisent, pour les distributions, à la quantité la plus faible, s’autorisant de ce que César a, par ses règlements, arrêté la distribution à 81 quinaires et demi pour le centenaire, et à 97 quinaires, neuf onces pour le tuyau de cent vingt, comme si ces modules ne pouvaient fournir davantage.

34. En somme, il y a 25 modules. Tous sont dans une juste proportion, et conformes aux règlements, à l’exception des quatre que les fontainiers ont changés. En général, les objets compris dans un même système de mesure doivent tous avoir entre eux des rapports fixes et immuables : il y a ainsi dans tout l’ensemble une harmonie constante. De même que, par exemple, la relation du setier et du cyathe se trouve encore entre le muid, le setier et le cyathe lui-même, ainsi la multiplication du quinaire doit conserver dans les modules plus grands une progression régulière ; autrement, si l’on réduit la capacité des modules qui servent aux distributions, et que l’on augmente celle des modules par lesquels on reçoit l’eau, il est clair qu’il n’y a plus là une erreur, mais bien une fraude.

35. Il faut noter que, si l’eau vient d’un lieu élevé, et ne franchit que peu d’espace, elle fournit même plus que son module ; et que, au contraire, lorsqu’elle arrive d’un lieu plus élevé, par conséquent avec moins de charge, et de plus loin, le défaut de vitesse lui fait donner moins que son module : il convient donc d’agrandir ou de diminuer, en raison du déchet ou de l’excédant, les tuyaux de distribution.

36. La position du calice a aussi son importance. Placé de niveau, et formant angle droit avec le courant, il donne la quantité déterminée : s’il présente directement son ouverture au cours de l’eau, et qu’il soit incliné, il en prend trop ; si, étant placé de côté, il revient en arrière et en se relevant, au lieu d’être incliné, il donnera peu, et avec lenteur. Le calice est un module d’airain, qui prend son ouverture dans le canal ou dans le château d’eau, et auquel s’adaptent les tuyaux de distribution. Sa longueur doit être de 12 doigts au moins, et son orifice, c’est-à-dire sa capacité, proportionné à la quantité d’eau qu’il doit fournir. On a sans doute imaginé de le faire en bronze, parce que, grâce à la dureté de ce métal, qui ploie très difficilement, on n’a pas à craindre que les tuyaux soient élargis ou resserrés.

37. Ces modules, au nombre de 25, dont 15 seulement sont d’un fréquent usage, vont être décrits ci-après, conformément au système d’évaluation que nous avons indiqué ; et nous rectifierons les quatre modules altérés par les fontainiers. C’est ce même système qu’on devra suivre pour établir tous les tuyaux dont on aura besoin ; ou bien, si on laisse subsister ceux qui ont été altérés, il faudra aussi les évaluer d’après le nombre réel des quinaires qu’ils fourniront.

38. Les modules qui ne sont pas en usage sont désignés ici même, et… Le module de l’once a de diamètre un doigt et un tiers : il contient un quinaire et un peu plus d’un huitième, c’est-à-dire une once et demie de quinaire, trois scrupules deux tiers. Le doigt carré a sa longueur et sa largeur égales. Réduit en rond, il a de diamètre un doigt, une once et demie et un scrupule ; il contient neuf onces et demie et un sicilique de quinaire. Le doigt rond a un doigt de diamètre, et fournit sept onces et demie et un soixante-douzième de quinaire.

39. Le tuyau quinaire a de diamètre un doigt et un quart, et son périmètre est de trois doigts, onze onces, 3 scrupules ; il contient un quinaire.

40. Le senaire a un doigt et demi de diamètre, et de circonférence quatre doigts, huit onces et demie et un scrupule ; il donne un quinaire, cinq onces et un sicilique.

41. Le septenaire a un doigt trois quarts de diamètre, et son périmètre est de 5 doigts et demi ; il contient un quinaire onze onces et demie. Il n’est pas en usage.

42. L’octonaire a deux doigts de diamètre ; son périmètre est de six doigts, trois onces un tiers. Il donne deux quinaires et demi, une demi-once et un sicilique.

43. Le dénaire a de diamètre deux doigts et demi, et de périmètre sept doigts, dix onces et un sicilique ; il contient quatre quinaires.

44. Le duodénaire a trois doigts de diamètre, et son périmètre est de 9 doigts, cinq onces, 2 scrupules ; il contient cinq quinaires trois quarts. Il n’est pas en usage. Les fontainiers avaient porté son diamètre à trois doigts, une demi-once et un sicilique, et sa capacité à six quinaires.

45. Le quindénaire a de diamètre trois doigts trois quarts, et de circonférence 11 doigts, neuf onces un tiers ; il donne 9 quinaires.

46. Le vicenaire a cinq doigts de diamètre, et son périmètre est de 15 doigts, huit onces et demie. Il contient 16 quinaires. Les fontainiers avaient réduit son diamètre à quatre doigts et demi, et sa capacité à 12 quinaires, onze onces et demie.

47. Le tuyau de vingt-cinq doigts carrés a de diamètre 5 doigts, sept onces, dix-sept scrupules, et son périmètre est de 17 doigts, huit onces trois quarts ; il contient 20 quinaires, quatre onces et demie. Il n’est pas en usage.

48. Le tuyau de trente doigts a de diamètre 6 doigts, deux onces un sixième, et de périmètre, 19 doigts, cinq onces ; son produit est de 24 quinaires, cinq onces un tiers.

49. Le tuyau de trente-cinq doigts a de diamètre 6 doigts, huit onces, 3 scrupules, et de circonférence 20 doigts, onze onces trois quarts ; il produit 28 quinaires, six onces un quart. Il n’est pas en usage.

50. Le tuyau de quarante doigts a de diamètre 7 doigts, une once, seize scrupules, et de circonférence 22 doigts, cinq onces ; il donne 32 quinaires, sept onces un sixième.

51. Le tuyau de quarante-cinq doigts a de diamètre 7 doigts, six onces, vingt scrupules, et de circonférence 23 doigts, neuf onces un tiers. Il contient 36 quinaires deux tiers ; il n’est pas en usage.

52. Le tuyau de cinquante doigts a de diamètre 7 doigts, onze onces trois quarts ; son périmètre est de 25 doigts et trois quarts d’once ; il contient 40 quinaires, neuf onces.

53. Le tuyau de cinquante-cinq doigts a de diamètre 8 doigts, quatre onces, dix scrupules ; son périmètre est de 26 doigts, trois onces et demie. Il contient 44 quinaires, neuf onces, vingt scrupules ; il n’est pas en usage.

54. Le tuyau de soixante doigts a de diamètre 8 doigts, huit onces, vingt et un scrupules, et de circonférence, 27 doigts, cinq onces et demie. : il donne 48 quinaires, dix onces, seize scrupules.

55. Le tuyau de soixante-cinq doigts a de diamètre 9 doigts, une once et un sextule ; son périmètre est de 28 doigts, six onces, vingt-deux scrupules ; il contient 52 quinaires, onze onces et demie. Il n’est pas en usage.

56. Le tuyau de soixante-dix doigts a de diamètre 9 doigts, cinq onces un tiers ; son périmètre est de 29 doigts deux tiers. Il fournit 57 quinaires et une demi-once.

57. Le tuyau de soixante-quinze doigts a de diamètre 9 doigts, neuf onces et un sicilique, et de circonférence 30 doigts, huit onces un tiers ; il contient 61 quinaires, une once et un tiers. Il n’est pas en usage.

58. Le tuyau de quatre-vingts doigts a de diamètre 10 doigts, une once, deux scrupules, et de circonférence 31 doigts, huit onces un tiers ; il contient 65 quinaires, deux onces, un sicilique.

59. Le tuyau de quatre-vingt-cinq doigts a de diamètre 10 doigts, quatre onces, vingt scrupules, et de périmètre, 32 doigts, huit onces, un sextule ; il contient 69 quinaires, trois onces, un sextule. Il n’est pas en usage.

60. Le tuyau de quatre-vingt-dix doigts a de diamètre 10 doigts, huit onces, onze scrupules, et de périmètre, 33 doigts, sept onces, quatorze scrupules ; il fournit 73 quinaires un tiers.

61. Le tuyau de quatre-vingt-quinze doigts a 11 doigts de diamètre ; son périmètre est de 34 doigts, six onces, seize scrupules ; il contient 77 quinaires, cinq onces. Il n’est pas en usage.

62. Le tuyau centenaire a de diamètre 11 doigts, trois onces, dix scrupules, et de circonférence 35 doigts, cinq onces, dix scrupules ; il prend 81 quinaires, cinq onces, vingt scrupules. Les fontainiers portaient son diamètre à 11 doigts, onze onces, vingt-deux scrupules, et sa capacité à 92 quinaires, quatorze scrupules.

63. Le tuyau de cent vingt doigts a de diamètre 12 doigts, quatre onces, huit scrupules, et de circonférence 38 doigts, dix onces ; il fournit 97 quinaires, neuf onces, dix scrupules. Les fontainiers portaient son diamètre à 15 doigts, onze onces, vingt scrupules, et sa capacité à 163 quinaires, six onces, 16 scrupules, ce qui équivaut au produit de deux tuyaux centenaires.

64. Après avoir donné sur les modules tous les détails nécessaires, nous allons faire connaître la quantité d’eau que chacun des aqueducs a paru recevoir d’après les règlements des princes, et celle qu’il a distribuée jusqu’au moment de notre administration ; puis la quantité que nous avons trouvée nous-mêmes, par de scrupuleuses recherches, sous la bienveillante autorité de Nerva, notre très-bon et très-consciencieux prince. Les règlements portaient en tout 12 755 quinaires, et il en était fourni 14 018 : la distribution offrait donc un excédant de 1 263 quinaires sur la quantité reçue dans les réservoirs. Étonné d’une pareille irrégularité (car il me semble que le principal devoir de ma charge est de m’enquérir du fidèle emploi, aussi bien que de la quantité des eaux), je m’empressai d’examiner comment il se faisait que nous fournissions plus d’eau qu’il n’y en avait dans tout notre patrimoine, pour ainsi parler. Ayant donc entrepris, avant tout, de mesurer les eaux à la tête des conduites, j’ai trouvé que le volume total excédait de beaucoup, c’est-à-dire de 10 000 quinaires environ, celui que portent les règlements : je le démontrerai en passant en revue les aqueducs l’un après l’autre.

65. L’eau Appia est inscrite dans les règlements pour 841 quinaires, quantité qui n’a pu être constatée à la tête de l’aqueduc, parce que cette eau est formée de deux ruisseaux différents ; mais, vers le lieu appelé les Gemelles, en deçà de la Vieille Espérance, où l’aqueduc reçoit un canal dérivé de l’Augusta, j’ai trouvé un volume d’eau de cinq pieds de hauteur, et d’un pied trois quarts de largeur : l’aire est de huit pieds trois quarts, et donne 2 240 doigts carrés, qui font 1 825 quinaires, c’est-à-dire 984 de plus que ne portent les règlements. Il fournissait 704 quinaires, c’est-à-dire 137 de moins que la quantité voulue par les règlements, et 1 121 de moins que ne donne la mesure prise aux Gemelles. Il est vrai qu’il se perd une certaine quantité d’eau par la faute du canal ; et, comme il est profondément enterré, il est difficile d’y reconnaître les pertes ; ce n’est qu’en évaluant la quantité qui se distribue dans les diverses parties de la ville, qu’on peut juger de celle qui s’échappe ; mais aussi nous avons découvert dans l’intérieur de Rome des tuyaux non autorisés. Hors de la ville, l’Appia est à l’abri de tous abus, parce que son niveau est bas, et que son canal entre sous terre à partir de 50 pieds de la prise d’eau.

66. Les règlements attribuent à l’Anio Vieux une quantité de 1 441 quinaires. À la tête de l’aqueduc j’en ai trouvé 4 398, indépendamment de la quantité dérivée en faveur des Tiburtins, dans le canal qui leur appartient. C’est 2 957 quinaires de plus qu’il n’en est porté dans les règlements. Il se distribuait de cette eau, avant qu’elle arrivât dans la piscine épuratoire, 262 quinaires ; la quantité reçue dans le bassin est évaluée, par les mesures qui y sont placées, à 2 362 quinaires ; il y avait donc, entre la tête de l’aqueduc et le réservoir, une perte de 1 774 quinaires. À partir du réservoir, il se distribuait 1 348 quinaires, quantité qui surpassait de 169 celle que les règlements, avons-nous dit, déclaraient reçue dans les réservoirs, mais inférieure de 1 014, comme nous l’avons déjà remarqué, à celle que peut recevoir l’aqueduc. Enfin, la perte totale entre la prise d’eau et le réservoir, et au-dessous du bassin, était de 2 788 quinaires. J’imputerais cette différence à une erreur de mesure, si je n’avais découvert les détournements frauduleux.

67. L’eau Marcia est évaluée dans les règlements à 2 162 quinaires. À la tête de l’aqueduc j’en ai trouvé 4 690, c’est-à-dire de plus qu’il n’en est porté dans les registres. Avant l’arrivée des eaux dans la piscine épuratoire, il en était distribué 95 quinaires ; on donnait, en outre, à la Tepula un supplément de 92 quinaires, et un de 164 à l’Anio : en somme, 351 quinaires étaient distribués au-dessus du réservoir. À la quantité d’eau reçue dans ce bassin, et réglée par les mesures qu’on y a placées, si l’on ajoute celle qui, passant à côté du bassin, se réunit à la première, dans un même canal, sur les arcades de l’aqueduc, on aura 2 944 quinaires. Enfin, l’eau distribuée au-dessus du réservoir, et celle qui arrive sur les arcades, forment un total de 3 295 quinaires ; il y a donc, sur la quantité consignée dans les règlements, un excédant de 1 133 quinaires, et sur celle que j’ai constatée à la tête de l’aqueduc, un déficit de 1 395. Il se distribuait au-dessous du bassin 1 840 quinaires, c’est-à-dire 227 de moins qu’il n’en est porté dans les règlements, et 1 104 de moins qu’il n’en arrive du bassin sur les arcades. La somme de ce qui se perdait, soit entre la prise d’eau et le réservoir, soit au-dessous du réservoir, était de 2 499 quinaires, dont nous avons découvert l’usurpation en plusieurs endroits, comme dans les autres aqueducs. Il est évident que ce n’est pas l’eau qui manque, puisque, à la tête de l’aqueduc, outre la quantité que nous avons constatée d’après sa capacité, il y a un trop-plein de 300 quinaires.

68. L’eau Tepula est inscrite dans les règlements pour 400 quinaires. Cette eau n’a pas de sources qui lui appartiennent ; elle se forme de quelques veines détournées de l’eau Julia. C’est donc au réservoir de celle-ci qu’il faut prendre la tête de l’aqueduc Tepula : car il reçoit d’abord de ce bassin 190 quinaires ; et, aussitôt après, 92 de l’eau Marcia ; enfin 163 de l’Anio Neuf, vers les jardins d’Epaphroditus, ce qui fait en tout 445 quinaires, c’est-à-dire 45 de plus qu’il n’en est porté dans les règlements, quantité qui se retrouve dans la distribution.

69. L’eau Julia est portée dans les règlements pour 649 quinaires. Il a été impossible de la jauger à la tête de l’aqueduc, parce qu’elle est formée de plusieurs eaux recueillies successivement ; mais, vers le sixième milliaire, toute cette eau est réunie dans un réservoir où l’on a constaté, par des mesures certaines, un volume de 1 206 quinaires, ce qui fait 557 de plus qu’il n’en est inscrit. Elle reçoit, en outre, près de la ville, derrière les jardins de Pallante, 162 quinaires de l’eau Claudia. La Julia reçoit donc en tout 1 368 quinaires, dont 190 se rendent dans la Tepula, et 803 sont distribués sous le nom de Julia. Cette distribution totale de 993 quinaires en présente 344 de plus qu’il n’en est porté sur les règlements, et 213 de moins que la quantité reconnue dans le réservoir, différence que nous avons retrouvée chez ceux qui ont fait des détournements sans l’autorisation du prince.

70. L’eau Vierge est inscrite pour une quantité un peu inférieure à 752 quinaires. On n’a pu en déterminer la mesure à la tête de l’aqueduc, parce qu’elle est formée de plusieurs eaux recueillies dans un canal où elle coule trop lentement ; mais, près de la ville, vers le deuxième milliaire, dans une terre qui appartient maintenant à Cejonius Commodus, où cette eau a un cours plus rapide, je l’ai jaugée, et j’ai trouvé 2 504 quinaires, c’est-à-dire 1 752 de plus qu’il n’en est inscrit. Mon opération peut être facilement vérifiée par tout le monde, car la distribution, qui est de 2 504 quinaires, répond à la mesure que j’ai trouvée.

71. L’Alsietina reçoit un volume d’eau qui n’est point évalué dans les règlements, et dont jusqu’ici on n’a pu reconnaître la mesure, parce qu’elle dépend de la quantité que les fontainiers ont dérivée du lac Alsietinus, et ensuite du lac Sabatinus, dans les environs de Careias. L’Alsietina fournit aux distributions 392 quinaires.

72. L’eau Claudia, plus abondante que les autres, est fort exposée à la fraude. Les règlements ne lui attribuent pas plus de 2 855 quinaires, tandis que j’en ai trouvé à la tête de l’aqueduc 4 607, c’est-à-dire 1 752 de plus. Or l’évaluation que je donne est d’autant plus certaine, que, vers le sixième milliaire, dans un réservoir où sont placées des mesures incontestables, j’ai trouvé 3 312 quinaires, 457 de plus qu’il n’en est porté dans les règlements, indépendamment des concessions de faveur faites au-dessus du réservoir, et de nombreux détournements subreptices que nous avons découverts, et qui diminuent de 1 295 quinaires la quantité que l’on devrait trouver. La fraude est encore manifeste dans la distribution ; elle ne s’accorde, après tant d’infractions, ni avec les registres, qui font loi, ni avec les mesures que nous avons constatées à la tête de l’aqueduc, ni même avec celles du réservoir. En effet, il ne se distribue que 1 750 quinaires, c’est-à-dire 1 505 de moins qu’il n’en est supputé dans les règlements, 2 857 de moins que la quantité mesurée par nous à la tête de l’aqueduc, et même 1 562 de moins que ce qui a été constaté dans le réservoir. Aussi, comme cette eau arrivait pure à Rome, dans son propre canal, on la réunissait, une fois entrée dans la ville, à celle de l’Anio Neuf, mélange qui devait avoir pour résultat de tromper, et sur la quantité d’eau reçue, et sur la quantité distribuée. S’il en est qui pensent que j’exagère le volume des eaux recueillies, je dois les avertir que les sources appelées Curtia et Cérula sont tellement suffisantes pour fournir à l’aqueduc de l’eau Claudia les 4 607 quinaires dont j’ai fait mention, qu’elles ont encore un trop-plein de 1 600. Il est possible, et je ne le nie point, que ce superflu n’appartienne pas à ces deux sources : il proviendrait alors de l’Augusta, qui, destinée primitivement à fournir, quand elle est assez abondante, un supplément à la Marcia, a été ajoutée à la Claudia, bien que le canal de celle-ci ne puisse même pas recevoir toute son eau.

73. L’Anio Neuf était inscrit dans les règlements pour 3 263 quinaires. L’ayant jaugé à la tête de l’aqueduc, j’en ai trouvé 4 738, c’est-à-dire 1 475 de plus que ne portent les règlements. Quand je signale ce surplus, quelle meilleure preuve donnerai-je de l’absence de passion en moi, que ces règlements eux-mêmes, sur lesquels figure, dans la distribution, la plus grande partie de ces derniers quinaires ? En effet, on voit une distribution de 4 211 quinaires sur les mêmes règlements, qui en portent seulement 3 263 d’eau reçue dans le réservoir. D’ailleurs, j’ai découvert que l’on dérobait non-seulement les 527 quinaires formant la différence entre la mesure que j’ai donnée et ce qui est distribué, mais même une quantité beaucoup plus grande, ce qui prouve que mon chiffre est encore au-dessous de la réalité. La raison en est que l’eau, qui coule avec force en s’échappant d’une rivière abondante et rapide, accroît son volume par sa vitesse.

74. Sans doute on remarquera que nos mesures présentent une quantité d’eau beaucoup plus grande que celle qui était portée dans les règlements. Cette différence a pour cause l’erreur de ceux qui, dans l’origine, ont fait avec peu d’exactitude l’évaluation de chacune des eaux. Je ne puis croire que ce soit par crainte des sécheresses de l’été qu’ils se sont à ce point éloignés de la vérité ; car, ayant pris mes mesures précisément au mois de juillet, je me suis convaincu que chacune des eaux conservait pendant tout le reste de l’été la quantité que j’ai indiquée plus haut. Enfin, quelle que soit la cause première de l’erreur, ce qu’il y a de bien constaté, c’est qu’il y avait une perte de 10 000 quinaires, tandis que les princes réglaient leurs libéralités sur l’évaluation inscrite dans les registres.

75. Une autre cause de cette différence, c’est que la quantité d’eau qu’on trouve à la tête des aqueducs arrive fortement diminuée dans les réservoirs, et plus encore dans la distribution. Cela vient de la fraude des fontainiers, que nous avons surpris à détourner les eaux des canaux publics pour l’usage des particuliers. En outre, la plupart des possesseurs des terres qui avoisinent les aqueducs percent les parois des canaux, et il en résulte que les eaux destinées au public sont interceptées au profit des particuliers, même pour arroser des jardins.

76. Mais à l’égard de tous les désordres de ce genre, on ne peut rien dire de plus ni de mieux que ce qui a été dit par Célius Rufus, dans son discours sur les Eaux. Que ne puis-je signaler, sans offenser personne, tous les abus qui se commettent encore aujourd’hui avec la même audace ! J’ai trouvé des champs arrosés, les tavernes, les salles de festin, et même tous les lieux de débauche, en possession de fontaines jaillissantes. Quant aux eaux qui se distribuaient les unes pour les autres, sous de faux titres, ce sont des fraudes moins graves. Cependant, parmi les abus qui semblaient exiger répression, il faut noter celui qui avait lieu dans le voisinage des monts Célius et Aventin. Ces deux collines faisaient usage des eaux Marcia et Julia avant que la Claudia y fût amenée. Mais, après que l’empereur Néron eut fait conduire la Claudia, au moyen d’arcades fort élevées, jusqu’auprès du temple de Claude, pour de là être distribuée, les premières eaux, loin d’être augmentées, disparurent. Attendu qu’il ne fit point construire de nouveaux châteaux d’eau pour la Claudia, et qu’il se servit des anciens, ceux-ci conservèrent leurs noms, quoiqu’ils ne reçussent plus les mêmes eaux.

77. J’en ai dit assez sur le volume des eaux, sur l’augmentation nouvelle qu’elles ont reçue, et sur les fraudes et les abus dont elles étaient l’objet. Reste maintenant la distribution, que j’ai trouvée, pour ainsi dire, réunie en masse, et même établie sous de faux noms ; je vais l’exposer par ordre, en indiquant les noms des eaux, la quantité qu’elles fournissent chacune, et les quartiers qu’elles desservent. Je sais que cette énumération peut paraître aride, et même fatigante, mais nous la donnerons aussi courte que possible, seulement de manière à ne priver d’aucune espèce de documents relatifs à ma charge, ceux qui voudront connaître les choses principales, sans s’occuper des détails.

78. Il se fait une distribution de 14 018 quinairesTous ceux qui, fournis par certains aqueducs en supplément d’autres eaux, semblent être compris deux fois dans la distribution, n’entrent qu’une fois dans l’évaluation totale. De toute cette quantité il se distribue hors de la ville 4 063 quinaires, dont 1 718 au nom de César, et 2 345 en faveur des particuliers. Les 9 955 autres quinaires étaient distribués dans l’intérieur de la ville entre 247 châteaux d’eau. Il en était pris 1 707 quinaires et demi au nom de César, 3 847 pour les particuliers ; pour les usages publics, 4 401, dont 279 pour 19 camps ; 2 401 pour 95 ateliers publics, 386 pour 39 lieux de spectacle, et 1 335 pour 591 bassins. Je vais établir maintenant la répartition des quinaires fournis par chacun des aqueducs aux différentes régions de la ville.

79. De ces 14 018 quinaires, qui font, ainsi que nous l’avons établi, la somme de toutes les distributions, l’eau nommée Appia en donnait seulement 5 hors de la ville, parce que le niveau de sa source est peu élevé ; le reste de cette eau, porté à 699 quinaires, était distribué à l’intérieur de la ville, par les mesureurs, dans les régions ii, viii, ix, xi, xiii et xiv, au moyen de 20 châteaux d’eau. De cette quantité, 151 quinaires étaient pris au nom de César, 194 pour les particuliers, et pour les usages publics 354, dont 3 quinaires pour un camp, 123 pour 14 établissements publics, 2 pour un lieu de spectacle, et 226 pour 92 bassins.

80. De l’Anio Vieux il était distribué hors de la ville, au nom de César 104 quinaires ; pour les particuliers, 404 ; le reste, qui était de 1 102 quinaires et demi, se partageait dans la ville entre les régions i, iii, iv, v, vi, vii, viii, ix, xii, xiv, par 35 châteaux d’eau. Il en était pris 60 quinaires au nom de César, 490 pour les usages des particuliers, et pour les usages publics 552, dont 50 pour un camp, 196 pour 19 établissements publics, 88 pour 9 spectacles, et 218 pour 94 bassins.

81. L’eau Marcia fournissait hors de la ville, au nom de César, 269 quinaires, et pour les particuliers 568. Le reste, s’élevant à 1 098 quinaires, se partageait dans l’intérieur de la ville, entre les régions i, iii, iv, v, vi, vii, viii, ix, x, xiv, au moyen de 51 châteaux d’eau. Il en était pris au nom de César 116 quinaires ; pour les particuliers, 543 ; pour les usages publics, 439, dont 41 pour 4 camps, 41 pour 15 ateliers publics, 104 pour 12 lieux de spectacle, et 253 pour 113 bassins.

82. De l’eau Tepula il se distribuait hors de la ville, au nom de César, 58 quinaires, et 56 pour les particuliers ; le reste, évalué à 331 quinaires, était partagé dans la ville entre les régions iv, v, vi, vii, par 14 châteaux d’eau. On en prenait au nom de César 34 quinaires ; pour les particuliers, 247 ; pour les usages publics, 50, dont 12 pour un camp, 7 pour 3 ateliers publics, et 31 pour 13 bassins.

83. L’eau Julia fournissait hors de la ville 85 quinaires au nom de César, et 121 pour les particuliers ; le reste, qui est de 597 quinaires, se distribuait dans la ville entre les régions ii, iii, v, vi, viii, x, xii, par 17 châteaux d’eau. De cette quantité, 18 quinaires étaient pris au nom de César ; 196 pour les particuliers, et 383 pour le public, dont 69 pour 3 camps, 182 pour 10 ateliers publics, 67 pour lieux de spectacle, et 65 pour 28 bassins.

84. Sous le nom d’eau Vierge, il était fourni hors de la ville 200 quinaires ; le reste, évalué à 2 304 quinaires, était partagé dans la ville entre les régions vii, ix, xiv, au moyen de 18 châteaux d’eau. Il en était distribué 549 quinaires au nom de César, 338 pour les particuliers, et 1 417 pour le public, dont 26 pour 2 lieux de spectacle, 61 pour 25 bassins ; et pour 16 ateliers publics, 1 330, y compris 460 quinaires que cette eau verse dans l’euripe, auquel elle a donné son nom.

85. L’Alsietina fournit 392 quinaires, quantité qui se consomme toute hors de la ville, savoir : 254 quinaires au nom de César, et 138 distribués aux particuliers.

86. La Claudia et l’Anio Neuf donnaient d’abord une partie de leur eau hors de la ville, chacune par son canal particulier ; puis elles se réunissaient dans la ville. La Claudia fournissait hors de Rome 217 quinaires au nom de César, et 439 pour les particuliers ; l’Anio Neuf, 731 au nom de César, et 414 pour les particuliers. Le reste de ces deux eaux, évalué à 3 824 quinaires, se distribuait dans l’intérieur de la ville entre les 14 régions, au moyen de 92 châteaux d’eau. Il en était pris au nom de César 779 quinaires ; pour les particuliers, 1 839 ; pour le public, 1 206, dont 104 pour 9 camps, 522 pour 18 ateliers publics, 99 pour 12 lieux de spectacle, et 481 pour 226 bassins.

87. Telles ont été, jusqu’à l’empereur Nerva, l’évaluation et la distribution des eaux. Grâce à la prévoyance et au zèle consciencieux du prince, toutes les eaux qui étaient détournées par la fraude des fontainiers, ou perdues par négligence, sont aujourd’hui comme de nouvelles sources qui sont venues s’ajouter aux autres, et rendre l’abondance presque générale. Maintenant, au moyen d’une juste répartition, les régions qui étaient desservies par un seul aqueduc, reçoivent de l’eau de plusieurs, témoin les monts Célius et Aventin, où l’on n’avait conduit que de l’eau Claudia par les arcs Néroniens. Il s’ensuivait que, toutes les fois que l’aqueduc était en réparation, l’eau manquait sur ces deux collines très-peuplées, qui maintenant en reçoivent de plusieurs sources, surtout de la Marcia, qu’un grand ouvrage amène du Célius à l’Aventin. Même amélioration dans toutes les parties de la ville, où la plupart des réservoirs, tant anciens que nouveaux, reçoivent deux cours d’eau de sources différentes, afin que si, par accident, l’un des deux est arrêté, l’autre puisse y suppléer.

88. Ce soin des eaux de la part de l’empereur Nerva, le plus dévoué des princes, produit de jour en jour son effet dans Rome, cette reine et maîtresse du monde, la déesse des nations, que rien n’égale, et dont rien n’approche. On reconnaîtra encore mieux la salubrité de la ville éternelle par l’augmentation du nombre des châteaux d’eau, des travaux publics, des spectacles, des bassins ; et les particuliers ne profiteront pas moins de ces nouveaux bienfaits : il en est même qui, n’ayant usé qu’avec crainte de leurs détournements illicites, en jouiront maintenant avec sécurité par la faveur du prince. Les eaux même qui débordent des bassins sont utilisées : tout a pris l’aspect de la propreté ; on respire un air plus pur : car les causes d’insalubrité qui lui avaient fait donner anciennement une si triste renommée, ont disparu. Je n’ignore pas que je devrais joindre à cet ouvrage le règlement de la nouvelle distribution ; mais, comme j’ai subordonné ce règlement à l’augmentation que recevront les eaux, on comprendra que je ne puis le faire connaître qu’après le complet achèvement de mon travail.

89. Que dirai-je si l’empereur, mû par un zèle dont il donne tant de preuves à ses concitoyens, a pensé qu’il n’avait pas assez fait pour nos besoins et nos plaisirs, en amenant à Rome une si grande quantité d’eau, et s’il veut encore rendre cette eau plus pure et plus agréable ? Il n’est pas sans intérêt de passer en revue tous les travaux par lesquels ce prince, en remédiant aux défectuosités de quelques-unes des eaux, a augmenté l’utilité de toutes. Ainsi, notre ville n’a-t-elle pas eu de tout temps, après les moindres pluies, des eaux troubles et bourbeuses ? Cependant toutes n’ont pas cet inconvénient dès leur point de départ ; et celles qu’on prend à leurs sources ne devraient pas s’en ressentir, notamment la Marcia, la Claudia, ainsi que d’autres, dont la limpidité, parfaite à l’origine, ne peut nullement être altérée par l’effet de la pluie, si l’on établit des soupiraux sur leurs conduites.

90. Les deux cours d’eau dérivés de l’Anio conservent moins que les autres leur pureté ; souvent même la rivière d’où ils viennent se trouble en temps serein : car, bien qu’elle sorte d’un lac très-clair, elle coule ensuite entre des rives de terre légère, dont les éboulements fournissent à ses eaux de quoi se troubler avant d’entrer dans les aqueducs. C’est une chose fâcheuse qui se reproduit non-seulement après les pluies de l’hiver et du printemps, mais même après celles de l’été, dans la saison où l’agrément et même la nécessité d’avoir de l’eau limpide se font le plus sentir. L’un des deux aqueducs, le Vieil Anio, ayant son niveau plus bas que la plupart des autres, garde pour lui seul l’inconvénient que je signale.

91. L’Anio Neuf, au contraire, gâtait les autres eaux, attendu qu’il a un niveau fort élevé, et que sa grande abondance supplée à l’insuffisance de plusieurs ; mais, par la faute des fontainiers, qui conduisaient cette eau dans les autres aqueducs plus souvent qu’il ne fallait, elle altérait celles même qui étaient assez copieuses, particulièrement la Claudia, laquelle, après avoir coulé pendant plusieurs milles dans son propre canal, était mêlée à l’Anio dans l’intérieur de Rome, et, dès lors, perdait tout son mérite. On songeait peu à remédier aux inconvénients de ces eaux supplémentaires ; car, ceux qui les amenaient si maladroitement, étaient encore chargés de la distribution, tâche dont ils s’acquittaient aussi mal : nous avons même découvert que l’eau Marcia, la plus agréable par sa limpidité et sa fraîcheur, servait aux bains, aux foulons, et aux plus vils usages.

92. L’empereur jugea donc utile de séparer toutes les eaux, et de les classer de telle sorte que, d’abord, la Marcia fût entièrement réservée à la boisson, et qu’ensuite les autres fussent assignées, chacune selon sa qualité, aux usages auxquels elles seraient propres ; ainsi, pour plusieurs raisons, l’Anio Vieux, dont le niveau est moins élevé, et l’eau moins pure, fut destiné à l’arrosement des jardins, et aux plus sales usages de la ville.

93. Mais ce n’était point assez pour notre prince d’avoir rendu aux autres eaux leur abondance et leur qualité ; il lui sembla qu’on pouvait encore remédier aux défauts de l’Anio Neuf. À cet effet, supprimant la prise d’eau établie dans la rivière, il la reporta au lac situé au-dessus de la maison de campagne de Néron, à Sublaqueum, où l’eau est très-claire. L’Anio prend sa source au-dessus de Treba Augusta, et, soit parce qu’il descend de montagnes pierreuses, ne rencontrant, même autour de cette ville, que peu de terres cultivées ; soit qu’il décharge son limon dans ce lac profond, où il se jette, ombragé par les forêts élevées et épaisses qu’il traverse, il arrive en cet endroit avec des eaux très-fraîches et très-limpides. Telle est l’heureuse acquisition d’une eau qui aura toutes les qualités de la Marcia, avec une plus grande abondance, et qui remplacera l’eau sale et bourbeuse dont nous avons parlé. Une inscription désigne comme auteur de cette amélioration, César Nerva Trajan Auguste.

94. Je vais maintenant faire connaître les lois concernant la conduite et l’administration des eaux : les unes ont pour but de retenir les particuliers dans la juste mesure des concessions qu’ils ont obtenues ; les autres regardent la conservation des aqueducs. En faisant des recherches sur les anciennes lois relatives à chacun de ces deux objets, j’ai trouvé que nos ancêtres avaient sur certains points une jurisprudence différente de la nôtre. Autrefois on ne distribuait de l’eau que pour les usages publics ; et il y avait une défense ainsi conçue : « Que personne ne détourne d’autre eau que celle qui sort du réservoir, et tombe à terre » (tels sont les termes de la loi), c’est-à-dire le trop-plein du réservoir, l’eau que nous appelons perdue : encore cette eau n’était-elle accordée que pour les bains et les foulons ; et la concession était frappée d’un impôt qu’on versait dans le trésor public. Si l’on en donnait aux maisons des premiers de la ville, c’était du consentement des autres citoyens.

95. À quel magistrat appartenait le droit de donner ou de vendre l’eau ? c’est un point sur lequel les lois elles-mêmes varient : car je trouve ce droit conféré, tantôt aux édiles, tantôt aux censeurs ; cependant il paraît que, toutes les fois que la République a eu des censeurs, c’était préférablement à eux qu’on adressait les demandes, et qu’à leur défaut le pouvoir revenait aux édiles. Ce que nous avons dit prouve combien nos ancêtres avaient à cœur l’intérêt général, plutôt que les jouissances privées, puisque l’eau concédée aux particuliers constituait encore un revenu au profit de l’État.

96. Quant à l’entretien de chacun des aqueducs, je trouve qu’il était ordinairement affermé ; que l’on imposait aux entrepreneurs l’obligation d’avoir un nombre déterminé d’esclaves artisans attachés aux aqueducs hors de la ville, un nombre également déterminé dans l’intérieur de Rome, et de faire inscrire sur les registres publics les noms de ceux qu’ils devaient employer à cet objet dans chaque région ; que la réception de leur ouvrage appartenait, tantôt aux censeurs, tantôt aux édiles, et que cette charge échut même quelquefois aux questeurs, comme l’indique le sénatus-consulte rendu sous le consulat de C. Licinius et de Q. Fabius.

97. Le soin qu’on mettait à empêcher les dégradations des aqueducs, ou les détournements illicites, nous est prouvé par des documents nombreux, et par cette circonstance que l’on n’arrosait pas le grand Cirque sans la permission des édiles ou des censeurs, même les jours où l’on célébrait les jeux ; et Ateius Capiton nous apprend que cet état de choses durait encore après la création des intendants, au temps d’Auguste. Les propriétés que l’on avait arrosées, au mépris de la loi, avec l’eau destinée au public, étaient confisquées ; et, si des esclaves avaient été employés à commettre cette infraction, ils étaient confisqués également. Les lois de ce temps portent : « Que personne ne salisse à dessein l’eau qui jaillit des fontaines publiques ; celui qui l’aura salie payera une amende de 10 000 sesterces. » Par le mot oletato, il faut entendre infecter. Afin de prévenir tout délit de ce genre, les édiles curules étaient chargés de nommer dans chaque quartier deux citoyens, habitants ou propriétaires, comme préposés à la surveillance des fontaines.

98. M. Agrippa, après l’édilité qu’il exerça étant consulaire, fut le premier chargé de l’intendance perpétuelle des eaux, qui étaient, pour ainsi dire, son propre ouvrage, et qu’on devait à sa générosité. Les eaux étant alors assez abondantes, il détermina par des règlements la quantité qui serait accordée, soit aux travaux publics, soit aux réservoirs, soit aux particuliers. Il établit même à ses frais un corps d’esclaves chargés de l’entretien des aqueducs, des châteaux d’eau et des réservoirs. Auguste, à qui ces esclaves échurent en héritage, les donna à l’État.

99. Après Agrippa, sous le consulat de Q. Élius Tubéron et de Paullus Fabius Maximus, l’administration des eaux ayant été jusqu’alors abandonnée à l’arbitraire, sans législation arrêtée, des sénatus-consultes furent rendus, et une loi promulguée sur cette matière. Auguste détermina même, par un édit, les droits de ceux auxquels les règlements d’Agrippa avaient accordé de l’eau, et fit dépendre de sa bienveillance toutes les concessions. Il établit aussi les modules dont nous avons parlé ; et, afin de donner de la stabilité et de la vie à cette administration, il nomma intendant des eaux Messala Corvinus, à qui l’on donna pour adjoint Postumius Sulpicius Prétorius et L. Cominius Pedarius. Des marques de dignité attachées aux fonctions de ces nouveaux magistrats furent l’objet d’un sénatus-consulte, dont voici la teneur :

100. « Les consuls Q. Élius Tubéron et Paullus Fabius Maximus ayant fait une proposition sur la mise en fonctions de ceux qui, de l’avis du sénat, seraient nommés, par César Auguste, intendants des eaux publiques, et ayant demandé ce qu’il plaisait au sénat d’ordonner à ce sujet, il a été arrêté ce qui suit : Les intendants des eaux publiques auront, quand leurs fonctions les appelleront hors de la ville, chacun deux licteurs, trois esclaves publics, un architecte, un secrétaire, un copiste, et autant d’huissiers et de crieurs qu’il en est donné à ceux qui distribuent le blé au peuple. Lorsqu’ils exerceront leur charge dans l’intérieur de la ville, ils auront le même cortége, à l’exception des licteurs. En tout cas, les appariteurs accordés aux intendants des eaux, en vertu du présent sénatus-consulte, seront, dans les dix jours qui suivront sa promulgation, déclarés par ceux-ci au trésor. Une fois déclarés dans la forme prescrite, ces appariteurs recevront annuellement des chefs du trésor le salaire et les rations que donnent et délivrent les administrateurs des subsistances, et ils pourront toucher ce traitement comme leur étant dû légalement. Il sera fourni aux intendants des eaux toutes les tablettes, le papier et les autres objets nécessaires à leurs fonctions ; et les consuls Q. Élius et Paullus Fabius, soit ensemble, soit l’un des deux seulement, s’ils le préfèrent, feront, par le ministère des chefs du trésor, affermer ces fournitures. »

101. Il fut arrêté aussi que, comme les intendants des chemins et ceux des subsistances exerçaient leurs fonctions le quart de l’année, les intendants des eaux ne jugeraient pendant ce temps aucune affaire, ni particulière, ni publique. Les appariteurs et autres employés bien que le trésor continue de les solder, paraissent avoir cessé leur service par la négligence des intendants, qui eux-mêmes ne s’acquittaient pas de leur devoir. Le sénat avait ordonné qu’il y eût des licteurs à la disposition de ces magistrats, quand leurs fonctions les appelaient hors de la ville. Pour nous, lorsque nous parcourrons les aqueducs, notre équité et l’autorité que nous avons reçue du prince nous tiendront lieu de licteurs.

102. Puisque nous avons fait remonter notre ouvrage à la création des intendants des eaux, il n’est pas hors de propos de nommer ici ceux qui, depuis Messala jusqu’à nous, ont été investis de cette charge. À Messala succéda Atteius Capiton, sous le consulat de Silius et de Plancus ; à Capiton, Tarius Rufus, sous le consulat de C. Asinius Pollion et de C. Antistius Vetus ; à Tarius, sous le consulat de Servius Cornelius Cethegus et de L. Visellius Varron, succéda M. Cocceius Nerva, aïeul du divin Nerva, et illustre jurisconsulte ; à Cocceius succéda C. Octavius Lénas, sous le consulat de Fabius Persicus et de L. Vitellius ; à Lénas, M. Porcius Caton, sous le consulat d’Aquillius Julianus et de Nonius Asprénas ; à Caton succéda ensuite A. Didius Gallus, sous le consulat de Servilius Asinius Céler et de…, Quinctilianus ; à Gallus succéda Cn. Domitius Afer, sous le consulat de Q. Veranius et de Pompeius Longus ; à Afer, L. Pison, sous le quatrième consulat de Néron Claudius César, et le premier de Cossus, fils de Cossus ; à Pison succéda Petronius Turpilianus, sous le consulat de Verginius Rufus et de Memmius Regulus ; à Turpilianus, P. Marius, sous le consulat de Crassus Frugi et de Lecanius Rassus ; à Marius, Fonteius Agrippa, sous le consulat de L. Telesinus et de Suetonius Paullinus ; à Agrippa, Albius Crispus, sous le consulat de Silius et de Galerius Trachalus ; à Crispus, Pompeius Silvanus, sous le troisième consulat de Vespasien, et le premier de Cocceius Nerva ; à Silvanus succéda T. Ampius Flavianus, sous le consulat de Valerius Messalinus ; à Flavianus, Acilius Aviola, sous le cinquième consulat de Vespasien, et le troisième de Titus ; après Aviola, sous le troisième consulat de l’empereur Nerva et le troisième de Verginius Rufus, cette charge nous a été confiée.

103. Je vais maintenant faire connaître les obligations de l’intendant des eaux, ainsi que les lois et les sénatus-consultes qui doivent lui servir de règle. En ce qui regarde le droit de conduite chez les particuliers, il faut veiller à ce que personne ne détourne l’eau publique sans un édit de César, c’est-à-dire sans une autorisation expresse, et à ce que nul n’en détourne plus qu’il n’en a obtenu. De là il résultera que la quantité d’eau que nous avons recouvrée, comme nous l’avons dit, pourra donner lieu à l’établissement de nouvelles fontaines, et à de nouveaux bienfaits de la part du prince. Pour atteindre ce double but, il faut opposer une active surveillance aux fraudes multipliées qui se commettent. Il est nécessaire d’inspecter de temps en temps, et avec soin, les canaux hors de la ville, pour reconnaître les concessions, et d’exercer la même surveillance sur les châteaux d’eau et les fontaines publiques, afin que l’eau coule sans interruption jour et nuit ; c’est un devoir imposé à l’intendant par un décret conçu en ces termes :

104. « Les consuls Q. Élius Tubéron et Paullus Fabius Maximus ayant fait un rapport sur le nombre des fontaines publiques établies par Agrippa, soit dans l’intérieur de Rome, soit dans les édifices contigus à la ville, et ayant demandé au sénat ce qu’il lui plaisait d’ordonner à cet égard, le sénat arrête qu’il n’y a lieu ni d’augmenter, ni de diminuer le nombre des fontaines publiques constaté par ceux qui ont reçu du sénat l’ordre d’inspecter les eaux, et de compter les fontaines ; que les intendants nommés par César, sous l’autorité du sénat, veilleront à ce que les fontaines publiques coulent nuit et jour, sans interruption, pour l’usage du peuple. » Ce qu’il faut remarquer dans ce sénatus-consulte, c’est la défense faite par le sénat d’augmenter ou de diminuer le nombre des fontaines publiques. Elle a eu pour motif, ce me semble, que la quantité d’eau qui arrivait à Rome, alors qu’on n’y avait point encore amené la Claudia ni le Nouvel Anio, ne paraissait pas comporter une plus grande distribution.

105. Celui qui voudra détourner de l’eau pour son usage particulier, devra en obtenir la permission, et justifier d’un édit du prince devant l’intendant. Alors celui-ci fera promptement réaliser la concession, et chargera tout d’abord de ce soin l’intendant adjoint, affranchi de César. Ce fut, à ce qu’il paraît, Tib. Claudius qui employa le premier un adjoint, lorsqu’il eut amené le Nouvel Anio et l’eau Claudia. Il faut encore faire connaître aux fermiers les termes de l’autorisation, afin qu’ils ne puissent jamais couvrir leur négligence ou leurs fraudes d’un prétexte d’ignorance. L’intendant adjoint ne doit pas oublier, en employant les niveleurs, d’étalonner le calice du module qui aura été obtenu ; de tenir à la fidèle observation des mesures dont nous avons parlé, et d’en prendre bonne note, afin de ne pas laisser au caprice de ces agents la faculté d’admettre un calice d’une ouverture tantôt plus grande, tantôt plus petite, selon qu’ils voudront, ou non, favoriser les personnes. On ne doit pas, non plus, après cette formalité, permettre d’adapter immédiatement au calice un tuyau du plomb quelconque ; il faut que le calibre de ce tuyau soit le même que celui du calice approuvé, jusqu’à la longueur de cinquante pieds, conformément aux dispositions du sénatus-consulte ci-après :

106. « Les consuls Q. Élius Tubéron et Paullus Fabius Maximus ayant exposé que certains particuliers établissaient des prises d’eau dans les canaux publics, et ayant demandé ce qu’il plaisait au sénat d’ordonner à cet égard, il a été arrêté ce qui suit : Il ne sera permis à aucun particulier de détourner l’eau des canaux publics ; tous ceux qui auront obtenu des concessions prendront l’eau dans les châteaux d’eau. Les intendants examineront dans quel lieu, soit au dedans, soit au dehors de la ville, les particuliers pourront eux-mêmes placer des châteaux d’où ils devront conduire l’eau qui leur aura été donnée en commun, des châteaux publics, par ces mêmes intendants ; nul concessionnaire n’aura le droit d’adapter à moins de cinquante pieds du château où il prendra l’eau, aucun tuyau plus large que le quinaire. » Ce qu’il faut remarquer dans ce sénatus-consulte, c’est qu’il défend de prendre l’eau ailleurs que dans les châteaux, afin de préserver les canaux et les tuyaux publics de fréquentes dégradations.

107. Une concession d’eau n’établit aucun droit en faveur de l’héritier, de l’acheteur, en un mot, du nouveau propriétaire. Les bains, en tant qu’établissements publics, avaient depuis longtemps le privilège de conserver à perpétuité l’eau qui leur avait une fois été accordée. C’est ce que nous apprennent les sénatus-consultes, dont l’un est transcrit ci-après. Aujourd’hui la concession d’une eau quelconque doit être renouvelée pour le nouveau possesseur.

108. « Les consuls Q. Élius Tubéron et Paullus Fabius Maximus ayant fait connaître la nécessité de déterminer les droits de ceux qui, soit au dedans de Rome, soit au dehors, ont obtenu des concessions, le sénat, invité à délibérer sur cet objet, a arrêté que les propriétés de ceux qui auraient obtenu de l’eau ne conserveraient ce privilége que tant qu’elles auraient les mêmes maîtres ; et qu’il ne serait fait exception que pour les bains, et pour les concessions faites au nom d’Auguste. »

109. Quand une concession devient vacante, il en est aussitôt donné avis, et elle est consignée sur les registres, que l’on consulte pour n’accorder de l’eau à ceux qui en sollicitent, que sur la quantité disponible. On avait coutume, quand le droit cessait, de retirer tout d’abord l’eau concédée, afin de la vendre sans retard, soit au nouveau propriétaire, soit à d’autres. Notre prince a montré plus de bienveillance : ne voulant pas que les propriétés fussent tout à coup privées d’eau, il a accordé un délai de trente jours, pendant lequel ceux qui seraient intéressés à la chose… Je ne trouve pas de loi qui regarde les eaux concédées en faveur de propriétés communes à plusieurs maîtres. Cependant, en vertu d’un usage qui semble avoir force de loi, tant qu’il existe un des particuliers qui ont obtenu l’eau en commun, il reçoit toute la quantité assignée à leurs propriétés ; et l’on ne renouvelle le privilége que lorsqu’il ne reste plus aucun de ceux qui l’avaient reçu. L’eau concédée ne doit évidemment être conduite que dans les propriétés auxquelles elle a été destinée ; et on ne peut la prendre que dans le château d’eau désigné par le prince ; au reste, les lois sont formelles à cet égard.

110. On obtient aussi la jouissance des eaux appelées tombantes, c’est-à-dire provenant du trop-plein des châteaux d’eau, ou s’échappant par les défauts des tuyaux. Cette faveur n’est accordée par le prince qu’avec la plus grande réserve ; et cependant elle est pour les fontainiers un sujet de fraudes qu’il est très-important de réprimer, comme on le voit par l’extrait suivant des ordonnances :

111. « Je fais défense à tout citoyen de s’emparer de l’eau tombante, à moins qu’il n’y ait été autorisé par moi, ou par les princes mes prédécesseurs : car il est nécessaire qu’une partie de l’eau déborde des réservoirs, tant pour maintenir la salubrité dans notre ville, que pour servir à nettoyer les cloaques. »

112. Après les détails que j’ai donnés sur l’administration des eaux, en ce qui concerne les usages privés, il n’est pas inutile de signaler, comme exemples, quelques-uns des moyens que nous avons vu mettre en œuvre pour éluder les règlements les plus sages. J’ai trouvé dans la plupart des châteaux d’eau des calices d’un diamètre plus grand que la mesure accordée, quelques-uns même qui n’étaient point marqués. Or, tout calice marqué qui excède la mesure légitime, atteste les vues intéressées de l’agent qui l’a étalonné ; et, quand le calice n’est pas même marqué, il y a fraude manifeste de la part de tous, en premier lieu de celui qui reçoit trop d’eau, et ensuite de la part du fermier. Dans certains châteaux d’eau, à des calices qui portaient la marque d’une mesure légitime, on avait immédiatement adapté des tuyaux d’un diamètre plus grand : d’où il résultait que l’eau, n’étant pas resserrée dans la longueur voulue, mais seulement pressée dans un court espace, remplissait facilement le tuyau plus large qui touchait au calice. Il faut donc, toutes les fois que l’on étalonne un calice, pousser la précaution jusqu’à marquer aussi les tuyaux, dans la longueur prescrite par le sénatus-consulte que nous avons cité : car, s’il en est ainsi, le régisseur, sachant qu’il ne peut adapter au calice que des tuyaux marqués, ne pourra alléguer aucun prétexte.

113. Quand on place des calices dans un château d’eau, on doit avoir soin de les mettre au même niveau ; il ne faut pas que l’un soit plus bas, et l’autre plus haut : le premier prendrait plus d’eau, et le second en aurait moins, parce que l’eau s’échappe toujours avec plus de force par l’ouverture inférieure. Les tuyaux de certains particuliers avaient même été posés sans calices : ces tuyaux sont appelés libres, et ils sont élargis ou resserrés, selon le bon plaisir du fontainier.

114. Voici encore, chez les fontainiers, une fraude qui est intolérable. Une concession est-elle transmise à un nouveau propriétaire ? ils pratiquent une nouvelle ouverture dans le château d’eau, et laissent subsister l’ancienne, d’où ils tirent de l’eau qu’ils vendent à leur profit. C’est pour l’intendant un des premiers abus à réprimer : car sa charge embrasse non-seulement la surveillance des eaux mêmes, mais encore la conservation des châteaux d’eau, qui sont endommagés par des percements fréquents et arbitraires.

115. Il faut aussi ôter aux fontainiers les profits qu’ils appellent points. Sur une grande étendue, et dans plusieurs directions, la ville de Rome est parcourue par des tuyaux cachés sous le pavé. Je me suis aperçu que ces tuyaux avaient été percés çà et là par un agent appelé a punctis, et que dans leur parcours ils fournissaient de l’eau, par des tuyaux particuliers, à tous ceux qui voulaient en acheter. Ce trafic était cause qu’il ne restait plus qu’un faible volume d’eau pour les usages publics. En mettant fin à cet abus, on en a recouvré une quantité que je pourrais évaluer d’après celle du plomb qui provient de l’enlèvement des tuyaux de cette espèce.

116. Il me reste à parler de la conservation des aqueducs ; mais, auparavant, je dirai quelques mots des corporations qui ont été créées pour cet objet. Il y en a deux : l’une appartenant au public, l’autre à César. Celle du public est la plus ancienne. Léguée par Agrippa à l’empereur Auguste, elle fut, comme nous l’avons dit, cédée par celui-ci au public : elle compte 240 hommes environ. Celle de César, qui est de 440 hommes, fut organisée par Claude, lorsqu’il amena des eaux à Rome.

117. Chacune de ces corporations comprend différentes sortes d’agents : des régisseurs, des gardiens de châteaux d’eau, des inspecteurs, des paveurs, des faiseurs d’enduits, et d’autres ouvriers. Quelques-uns doivent résider hors de la ville, pour les travaux qui, sans être considérables, exigent, du moins, une prompte exécution. Tous ceux qui sont dans la ville, et qui ont leurs postes près des châteaux d’eau ou des lieux de spectacle, donneront leurs soins à tous les ouvrages, surtout dans les circonstances imprévues, afin que l’on puisse, en cas de nécessité, faire passer une grande quantité d’eau de plusieurs régions dans une seule. Les nombreux agents de ces deux corporations étaient habituellement occupés à des travaux particuliers, soit par la cupidité, soit par la négligence des administrateurs. Pour les assujettir à une certaine discipline, et à un service public, nous prescrivons la veille ce qui doit être fait le lendemain, et il est tenu un registre des travaux de chaque jour.

118. La corporation qui appartient au public reçoit ses émoluments du trésor, et cette dépense trouve sa compensation dans le revenu provenant du droit de concession. Ce droit est payé par les propriétés situées à proximité des aqueducs, des châteaux d’eau, des lieux de spectacle et des bassins ; et le revenu, qui s’élève à près de 250 000 sesterces, souvent aliéné, et variable, versé naguère dans les coffres de Domitien, puis rendu au trésor public, grâce à l’équité du divin Nerva, fut enfin soumis, par nos soins, à des règles fixes, qui ne laissent plus de doute sur les lieux qu’on doit assujettir à l’impôt. La corporation appartenant à César reçoit sa solde du fisc, qui fournit aussi le plomb et tous les objets de dépense concernant les aqueducs, les châteaux d’eau et les bassins.

119. Maintenant que nous avons expliqué ce qui regarde ces corporations, nous allons, ainsi que nous l’avons annoncé, parler de la conservation des aqueducs, objet qui méritait plus de surveillance et de soins, puisque ces édifices sont la principale marque de la grandeur romaine. Ils sont sujets à de nombreuses et à de grandes réparations, auxquelles on doit se hâter de pourvoir avant qu’elles donnent lieu à des ouvrages si considérables ; et il faut le plus souvent, y apporter une sage économie, sans trop se fier à ceux qui demandent à exécuter les travaux ou à les augmenter. C’est pourquoi l’administrateur des eaux doit s’appuyer non-seulement sur la science des hommes spéciaux, mais encore sur sa propre expérience ; et, au lieu de se contenter des architectes qui dépendent directement de lui, il faut qu’il ait recours à la probité et au talent de plusieurs autres, afin de pouvoir se prononcer sur les ouvrages qu’il convient d’exécuter ou de différer, et distinguer ceux qui doivent être faits par entreprise, de ceux qu’il veut confier à ses propres ouvriers.

120. Ces réparations sont occasionnées, ou par les ravages de la vétusté, ou par la cupidité des propriétaires, ou par la violence des tempêtes, ou par la mauvaise exécution de l’ouvrage, défaut trop souvent remarqué dans nos récentes constructions.

121. C’est ordinairement de la vétusté ou des tempêtes qu’ont le plus à souffrir les parties d’aqueducs soutenues par des arcades, ou appliquées aux flancs des montagnes ; et les arcades les plus endommagées sont celles qui traversent les rivières : ce sont des ouvrages qui demandent, dans leurs réparations, beaucoup de soin et de célérité. Il y a moins à craindre pour les conduits souterrains, qui ne sont exposés ni à la gelée, ni aux chaleurs. Parmi les dégradations qui y surviennent, il en est auxquelles on peut remédier sans changer le cours de l’eau, et d’autres qui exigent qu’on le détourne : c’est, par exemple, lorsqu’il faut travailler dans l’intérieur même du canal.

122. Deux choses nécessitent des réparations dans les canaux : ou le limon s’y amasse, se durcit, et forme une croûte qui resserre le passage de l’eau ; ou bien les enduits se détruisent, et il en résulte des fuites d’eau qui dégradent inévitablement les parois des conduits, et leurs substructions. Les piliers d’arcades eux-mêmes, ceux qui sont construits en tuf, s’écroulent sous leur énorme fardeau. Il faut éviter de réparer en été les canaux mêmes des aqueducs, afin de ne pas ôter l’eau dans la saison où l’on en a le plus grand besoin. C’est au printemps ou en automne que ces travaux seront faits, et avec la plus grande célérité, toutes choses étant disposées à l’avance pour que l’eau ne soit arrêtée que pendant le moins de jours possible. Tout le monde comprend que les aqueducs ne doivent être livrés que l’un après l’autre pour ces sortes de réparations : si plusieurs canaux étaient simultanément mis à sec, l’eau manquerait dans la ville.

123. Les travaux qu’on peut exécuter sans interrompre le cours de l’eau sont principalement les constructions en maçonnerie, qui doivent se faire dans une saison convenable, et de manière à être solides. Le temps le plus favorable à ces constructions commence aux calendes d’avril, et finit à celles de novembre ; mais il est utile de les suspendre pendant les grandes chaleurs de l’été, la maçonnerie ayant besoin d’une température modérée, pour absorber assez d’humidité, se lier, et faire corps. Un soleil trop ardent n’est pas moins nuisible au travail que la gelée ; et aucun ouvrage ne réclame une exécution plus parfaite que ceux qui doivent résister à l’eau. Il faut donc exiger pour chacun de ces ouvrages la fidèle observation de la règle, que tous les ouvriers connaissent, et que peu d’entre eux respectent.

124. Il n’est personne, à mon avis, qui ne comprenne que les parties des aqueducs les plus rapprochées de Rome, c’est-à-dire en deçà du septième milliaire, et construites en pierre de taille, doivent être gardées avec le plus de soin. Ce sont, en effet, des ouvrages immenses, supportant chacun plusieurs canaux, qu’il serait impossible d’interrompre sans priver la ville de la plus grande partie de ses eaux. On peut cependant encore triompher des difficultés de ce genre : l’ouvrage en reconstruction doit être élevé au niveau du cours d’eau interrompu, de manière à recevoir des canaux garnis de plomb, qui suppléent au canal démoli dans toute la longueur du vide qu’il laisse, et permettent à l’eau de couler comme auparavant. Mais, attendu que presque tous les aqueducs traversaient des propriétés particulières, et qu’il semblait difficile d’y préparer les matériaux pour les réparations à faire, à moins qu’il n’intervînt quelque mesure d’autorité qui mît les entrepreneurs des travaux à l’abri de toute opposition de la part des propriétaires, on rendit le sénatus-consulte ci-après :

125. « Les consuls Q. Élius Tubéron et Paullus Fabius Maximus ayant fait un rapport sur la nécessité de réparer les canaux, les voûtes et les arcades des eaux Julia, Marcia, Appia, Tepula et Anio, et demandé au sénat ce qu’il lui plaisait d’ordonner sur cette affaire, il a été arrêté que, lorsque ces canaux et ces arcades, qu’Auguste César a promis au sénat d’entretenir à ses frais, seraient en réparation, la terre, la glaise, la pierre, la brique, le sable, le bois, et tous autres matériaux nécessaires à ce travail, lesquels, se trouvant à proximité, dans les propriétés des particuliers, pouvaient en être extraits et enlevés, moyennant une indemnité fixée par un arbitre équitable, seraient fournis par ces propriétés, en seraient extraits, pris et enlevés ; que, pour le travail des réparations, les particuliers laisseraient pratiquer, toutes les fois qu’il serait nécessaire, et moyennant indemnité, des sentiers et des chemins sur les propriétés. »

126. Quant aux dégradations, elles viennent, le plus souvent, de la cupidité des propriétaires, qui portent toute espèce de préjudice aux aqueducs. D’abord ils occupent, par des édifices ou par des arbres, les espaces qui, aux termes des sénatus-consultes, doivent rester libres le long des canaux. Le plus grand dommage est causé par les arbres, dont les racines percent même les voûtes et les parois des conduits ; puis viennent les chemins, que les propriétaires pratiquent aux limites ou dans l’intérieur de leurs domaines, en passant même sur les aqueducs ; enfin, l’accès est enlevé à la surveillance. Tous ces désordres sont l’objet du sénatus-consulte que je transcris ici :

127. « Les consuls Q. Élius Tubéron et Paullus Fabius Maximus ayant exposé que les chemins réservés le long des aqueducs qui se rendent dans la ville, sont occupés par des monuments, des édifices et des arbres, et ces consuls ayant demandé au sénat ce qu’il lui plaisait d’ordonner à ce sujet, il a été arrêté que, pour les réparations des canaux et de leurs voûtes, dont les dégradations mettent en souffrance les travaux publics, il sera laissé quinze pieds libres de chaque côté des fontaines, des arcades et des murs de substructions, et cinq pieds libres de chaque côté des conduits souterrains et des canaux qui, soit dans la ville, soit au dehors, sont contigus à des édifices, de sorte qu’on n’aura plus à l’avenir le droit de placer en dedans de ces limites ni monuments, ni maisons, ni arbres ; que tous les arbres qui se trouvent actuellement dans l’espace réservé seront arrachés, à moins qu’ils ne touchent à quelque habitation et ne soient enfermés dans des édifices. Quiconque sera en contravention à ce décret payera, pour chaque délit, une amende de dix mille sesterces, dont la moitié sera donnée comme récompense à l’accusateur qui aura le mieux prouvé les faits ; l’autre moitié sera versée au trésor. Les intendants des eaux connaîtront des affaires de cette espèce, et les jugeront. »

128. Ce sénatus-consulte, qui déjà paraît très-sage au seul point de vue de l’intérêt public, en réservant ces espaces libres, le paraîtra plus encore, si l’on considère que nos ancêtres, dans un admirable esprit d’équité, ne voulurent point faire tort aux particuliers de cette quantité de terrain attribuée par la loi au domaine public. Loin de là, quand ils établissaient des conduites d’eau, si le propriétaire avait trop de répugnance à ne vendre qu’une partie de son champ, ils l’achetaient tout entier, et le revendaient, après en avoir pris ce qui leur était nécessaire pour régler, quant aux limites, les droits de la république et ceux des particuliers. Cependant la plupart des propriétaires, non contents de faire des anticipations de terrain, portèrent la main sur les aqueducs, dont ils percèrent çà et là les parois ; et ce délit fut commis tant par ceux qui avaient obtenu des concessions, que par d’autres, qui, encore aujourd’hui, profitent des moindres tolérances pour s’emparer de l’eau. Quelles seraient les conséquences de pareils abus, s’ils n’eussent été réprimés par les dispositions énergiques d’une loi générale, qui menace de peines sévères les contrevenants ? Je transcris ici le texte même de cette loi :

129. « Le consul T. Quinctius Cispinus a légalement convoqué le peuple, et le peuple a légalement délibéré, en assemblée dans le Forum, devant la tribune aux harangues, près du temple du divin Jules César, la veille des calendes de juillet. À la tribu Sergia échut le droit de voter la première ; et, au nom de celle-ci, Sextus Varron, fils de Lucius, vota le premier. Quiconque, après la promulgation de la présente loi, aura méchamment et, de propos délibéré, percé ou fait percer, rompu ou fait rompre les canaux, conduits souterrains, voûtes, tuyaux, tubes, châteaux d’eau, et bassins des eaux publiques qui sont amenées à Rome, ou aura empêché ces eaux, en tout ou en partie, de suivre leur cours, de se répandre, de couler, de parvenir, d’être conduites dans la ville, ou bien de jaillir, de se distribuer, et de se rendre dans les châteaux d’eau et bassins, soit à l’intérieur de Rome, ou dans les édifices qui sont ou seront contigus à la ville, soit dans les jardins ou dans les propriétés dont les maîtres ou les possesseurs auront obtenu ou obtiendront une concession, sera condamné à une amende de cent mille sesterces au profit du peuple romain. Quant à celui qui aura commis un de ces délits furtivement, mais sans intention criminelle, il devra réparer, refaire, reconstruire, replacer toutes choses en leur premier état, et démolir sur-le-champ, et sans fraude, ce qu’il aura construit. À cette fin, celui qui est ou sera intendant des eaux, ou, à son défaut, le préteur chargé de juger les différends entre les citoyens et les étrangers, devra recourir à une amende pécuniaire, ou à des gages, ou à la contrainte personnelle ; et même l’intendant, ou ce préteur, aura, en son propre nom, le droit et le pouvoir d’exercer toute contrainte, et de prononcer les peines pécuniaires, la tradition des gages, ou la contrainte personnelle. Si quelqu’un de ces dommages est causé par un esclave, c’est le maître qui payera au trésor public les cent mille sesterces. Si le terrain qui doit rester libre est délimité autour des canaux, conduits, souterrains, voûtes, tuyaux, tubes, châteaux d’eau et bassins des eaux publiques qui sont ou seront amenées à Rome, nul ne pourra, après la promulgation de la présente loi, rien opposer, ni construire, ni enclore, ni fixer, ni établir, ni poser, ni placer, ni labourer, ni semer dans ce lieu, ni même y rien amener, si ce n’est pour les constructions ou les rétablissements autorisés ou exigés par cette même loi. Celui qui enfreindra cette disposition sera soumis à la même peine, et le droit et les fins de poursuite seront en toutes ces choses, et pour tous, ce qu’ils seraient et ce qu’ils devraient être, si le contrevenant eût rompu ou percé un canal, ou même une voûte. Pour que rien n’empêche d’y faire paître des troupeaux, et d’y faucher le foin, il sera pourvu, par les soins des intendants des eaux, maintenant et à l’avenir, à ce que, près des sources, arcades, murs, canaux et conduits souterrains, situés dans cette délimitation, les arbres, vignes, buissons, épines, murs de clôture, plantations de saules et de roseaux, soient enlevés, coupés, arrachés, déracinés, conformément aux ordres de ces mêmes intendants, qui devront exiger des gages, ou prononcer une amende et la contrainte personnelle, droit et pouvoir dont ils useront avec équité. Quant aux vignes et aux arbres qui sont renfermés dans l’enceinte des maisons de campagne et des édifices, ou dans des murs de clôture, et quant aux murs mêmes que les intendants des eaux, après examen de l’affaire, auront permis de ne pas faire disparaître, et sur lesquels on aura inscrit ou gravé les noms des intendants qui auront accordé cette permission, la présente loi n’empêche nullement qu’ils subsistent. Elle ne déroge en rien, non plus, à toutes les permissions accordées par les intendants, de prendre ou de puiser de l’eau aux sources, canaux, conduits, soit souterrains, soit placés sur des arcades, pourvu que l’on n’emploie ni roue, ni calice, ni machine ; et qu’il n’y soit pratiqué aucun puits, ni aucun percement nouveau. »

130. Les contempteurs d’une loi aussi utile méritent, il faut l’avouer, les peines qu’elle inflige ; mais, comme ils ont été longtemps abusés par la négligence des intendants, on a dû les ramener à la règle par des voies de douceur : aussi avons-nous fait tous nos efforts pour empêcher que les délinquants fussent connus. Ceux même qui, après avoir été avertis, ont eu recours à la bonté du prince, peuvent nous regarder comme l’auteur du bienfait qu’ils ont obtenu. Mais, si je forme un vœu pour l’avenir, c’est qu’il ne devienne point nécessaire d’appliquer la loi : car, dussé-je causer des mécontentements, la conscience de mon devoir me la ferait exécuter.


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NOTES
SUR LES AQUEDUCS DE LA VILLE DE ROME.




1. Administratum per principes civitatis nostræ viros. Ce passage a fait croire à plusieurs commentateurs que Frontin était né à Rome ; mais Virgile, qui était d’un village voisin de Mantoue, ne pouvait-il pas, à une certaine époque de sa vie, dire également de Rome, comme de sa patrie adoptive, civitas nostra ? — Voyez la Notice, page 5.

2. Et adfutorum decreait usum. Il y a ici une altération évidente du texte. M. Dederich lit : « Quoties imperitia præcessit ejus, ad cujus erebro decurritur usum. » Cette autre leçon : « Et ad illorum decurrit usum, » que le critique allemand indique, mais sans l’adopter, serait peut-être préférable.

3. Forma. Ce mot est, en cet endroit, synonyme de formula, de norma.

4. Succedentium. L’édition de Joconde porte, et M. Rondelet a maintenu antecedentium, leçon qui est contradictoire à tout le passage.

5. A quoto milliario cœpisset. Le mille romain contenait mille pas de cinq pieds, ce qui équivalait à 1479 mètres 26 centimètres. À partir du milliaire d’or, colonne qui fut dressée, par ordre d’Auguste, au milieu du Forum (ou, selon l’opinion de Poleni, à partir de chacune des portes de la ville), chaque mille était marqué, sur les principales routes, par une pierre ou borne milliaire numérotée.

6. Quantum substructione, quantum opere arcurato. On entend par substructions des ouvrages en massif de maçonnerie, établis, soit au-dessous du rez-de-chaussée, comme les fondations des murs, soit au-dessus de terre, mais sans arcades, pour soutenir à un certain niveau quelque autre construction, un canal, par exemple. — Opus arcuatum est un ouvrage en arcades destiné, dans le cas dont il s’agit, à supporter un, deux, et qu’à trois conduits, lorsqu’il se présente des vallées à franchir, et qu’il est nécessaire de maintenir un niveau ou une pente réglée. Plusieurs aqueducs romains avaient deux et même trois rangs d’arcades, quand les accidents de terrain l’exigeaient. Tel est encore, en France, celui qu’on appelle vulgairement le Pont du Gard.

Portés soit par des substructions, soit par des arcades, les aqueducs étaient simples, doubles ou triples, selon qu’ils consistaient en un, deux ou trois conduits. On voit encore près de Rome les restes d’un triple aqueduc qui amenait, sur une certaine étendue (Voyez § 19), les eaux Julia, Tepula et Marcia. Piranesi en a donné le dessin (Le Antichità romane, t. i, tav. xi, fig. 1, et ibidem, tav. xxxviii, fig. 1), que M. Rondelet a reproduit dans l’atlas qui accompagne sa traduction.

7. Altitudinem. Cette hauteur n’est point celle des arcades, comme l’a pensé Keuchen ; c’est le niveau de chacune des eaux à l’endroit où elle arrive dans la ville, avant d’être distribuée dans les châteaux d’eau.

8. Modulorumque rationem. En architecture, on entend par module (modulus, petite mesure) une mesure arbitraire qu’on prend pour établir les rapports de proportion entre les parties d’un ouvrage. C’est ordinairement la moitié du diamètre de la colonne ; et l’on fixe le nombre des modules qui doivent être contenus dans la colonne, dans son dé, dans son entablement, etc., et dans tout l’ensemble de l’édifice.

En ce qui regarde la conduite et la distribution de l’eau, on a adopté le nom de module pour désigner la mesure des tuyaux. Comme on le verra plus loin, il y a une échelle de modules qui a eu pour base, soit le doigt, soit l’once, soit le quinaire (Voyez §§ 24 et 25). On a confondu quelquefois d’une manière absolue le module avec le tuyau, et c’est à tort, car le premier est la mesure de l’orifice du second ; si on les identifie quelquefois dans le langage de la pratique, il faut au fond maintenir la distinction. C’est au moyen du calice (Voyez § 36) que la mesure est déterminée.

On se sert encore du même mot, par analogie, pour l’indication du diamètre des médailles et des monnaies.

9. Publicis operibus. Poleni pense que les ouvrages ou travaux publics comprenaient, outre les théâtres, les palais, etc., les bains, et les ateliers de foulons, qui exigeaient sans cesse une grande quantité d’eau.

10. Muneribus. Les spectacles, ou jeux, dont parle Frontin étaient principalement les naumachies, nom qui devint commun à ces batailles navales et aux lacs creusés exprès sur lesquels on les donnait.

11. Lacubus. Le manuscrit du Mont-Cassin porte lacibus toutes les fois que ce mot se représente au même cas, et l’édition de Wesel (1841) adopte cette terminaison ; cependant les plus savants latinistes ne reconnaissent que l’autre forme.

Ces bassins étaient des réservoirs destinés à une foule d’usages : on y prenait de l’eau pour les divers ateliers ou fabriques, pour abreuver les chevaux et le bétail, éteindre les incendies, etc. On les avait prodigieusement multipliés au temps des empereurs : il y a des savants qui en portent le nombre à plus de neuf cents. Au dire de Pline le Naturaliste (liv. xxxvi, ch. 24), Agrippa en établit à lui seul sept cents pendant son édilité ; en outre, cent six fontaines jaillissantes, cent trente châteaux d’eau, la plupart magnifiquement ornés, et surmontés de trois cents statues de marbre ou d’airain, et de quatre cents colonnes de marbre.

12. Nomine Cæsaris. L’eau accordée à ce titre était mise à la disposition de l’empereur, et réservée à certains usages et à des lieux désignés par le prince. Nomine Cæsaris équivaut donc à Cæsari.

13. Ab urbe condita per annos ccccxxxxi. D’après ce passage et les chapitres suivants de Frontin, il n’y aurait point eu d’aqueducs à Rome jusqu’à l’an 441 ; et suivant Pline (liv. xxxi, ch. 24), l’eau Marcia aurait été amenée par le roi Ancus Marcius. Poleni pense qu’il faut s’en rapporter à notre auteur, et Raphaël Fabretti (Dissertationes de aquis et aquæductibus veteris Romæ, c. ccxxxvii) explique, ou du moins cherche à prouver l’erreur de Pline.

14. Fontium memoria cum sanctitate adhuc exstat, et colitur. Le culte des eaux est attesté par plusieurs auteurs. Hésiode compte près de quarante fleuves ou cours d’eau divinisés. Pline dit (liv. xxxi, ch. 2) que leur nom a grossi la liste des dieux ; enfin Tacite (Annales, liv. xiv, ch. 22) rend compte en ces termes d’une profanation de Néron : « Un désir d’une recherche outrée valut à Néron péril et déshonneur ; il alla nager dans la fontaine Marcia, dont les eaux sont conduites à Rome ; on pensa qu’en y plongeant son corps, il avait profané cette eau sacrée et la sainteté du lieu : aussi une maladie grave s’ensuivit, et confirma le courroux des dieux. » (Trad. de C.-L.-F. Panckoucke.)

15. Sicut C. Ammaranius Apollinaris. Il est d’autant plus facile de constater ici une altération de texte, que cet Apollinaris n’est connu de personne. Au lieu de ce mot, M. Dederich lit sicut Camœnarum et Apollinis et Juturnæ. Il faudrait, d’après cette leçon, traduire ainsi la phrase : « Car on croit que ces sources ont, comme celles des Muses, d’Apollon, et de Juturne, la vertu de rendre la santé aux malades. »

16. Viam Appiam… usque ad urbem Capuam muniendam curavit. L’expression munire viam n’a pas toujours eu le même sens. Ainsi que le fait observer M. Naudet (Mémoires de l’Académie des sciences morales et politiques, t. iv, p. 829 et suiv.), au temps d’Appius Cécus on ne pouvait entendre par là que la construction, et non le pavé des routes, puisque Tite-Live rapporte (liv. xli, ch. 27) que l’an de Rome 579, pour la première fois, les censeurs firent paver de grandes pierres les rues de la ville ; c’est donc seulement après cette époque que l’on a pu employer indifféremment munire pour sternere viam. Cependant on trouve dans le recueil de Gruter une antique inscription ainsi conçue :

appivs. clavdivs.

c. f. caecvs.
viam. appiam. stravit.
et. aqvam.
in. vrbem. addvxit.

Alors, en admettant l’authenticité de cette inscription, nous serions autorisés à croire que sternere signifierait empierrer, caillouter, aussi bien que paver les routes.

17. Abdicavit se censura. Tite-Live (liv. ix, ch. 29) fait connaître la cause de cette abdication.

18. Hortorum Torquatianorum et… L’édition de Wesel ajoute Plautianorum.

19. Salinæ. Au sud-ouest de Rome, sur la rive gauche du Tibre. Voyez le plan de Piranesi (Le Antichità romane, t. i, tav. 38), où l’on peut suivre le parcours de tous les aqueducs, depuis leur entrée dans la ville, jusqu’aux lieux où ils aboutissaient. Nous y renvoyons une fois pour toutes, notamment en ce qui regarde les chapitres v-xv.

20. Ex manubiis de Pyrrho captis. « Sous le nom de manubia, il faut comprendre non-seulement l’argent, mais tout ce que les questeurs retiraient de la vente des esclaves et de toute espèce de butin, même de l’aliénation des terres conquises dans cette guerre. » (Niebuhr, trad. de M. de Golbéry, t. vi, p. 326.)

21. De consummando ejus aquæ opere… Il y a ici une lacune que M. Dederich remplit par ces mots : Frequentibus autem Romanorum bellis prætermisso, demum post nonum annum rursus Minutius Prætor rem retulit, restitution que les vestiges des manuscrits ne justifient pas complètement.

22. Extra portam… Corradin ajoute Reatinam, et M. Dederich Baranam.

23. Prætor inter cives et peregrinos. Ce prêteur était, pour cette raison, appelé peregrinus, ce qui le distinguait du prætor urbanus.

24. In urbem perduceret. Au lieu des mots qui suivent dans le texte, jusqu’à eam aquam inclusivement, l’édition de Wesel porte : Qui lapide quadrato ampliores ductus excitavit, perque illos aquam, quam acquisiverat reipublicæ commodo, trium millium opera fabrorum duxit, etc.

25. Sestertium iv et octogies. Huit millions quatre cent mille sesterces valaient, jusqu’au temps d’Auguste, 1,711,850 fr. M. Dederich lit sest. millies octingenties.

26. Ad milliarium xxxviii sinistrorsus. Poleni écrit xxxvi prétendant que, du trente-sixième milliaire de la voie Valérienne, où l’eau Marcia était prise, l’aqueduc aurait fait un trop grand détour pour aller jusque vers le trente-huitième de la voie Sublacensis. Cette raison ne nous a pas paru suffisante pour nous éloigner des manuscrits (du Mont-Cassin et d’Urhin) et des anciennes éditions, qui portent ad milliarium trigesimum octavum.

27. Intra passuum cc Après ces mots, M. Dederich restitue ainsi le texte : « Intra spatium passuum cc fontium infinita multitudine sub fornicibus petræis scatenti, stat immobilis stagni modo, colore perviridi. »

28. Anno post Urbem conditam dccxix.. Les fastes placent en l’an de Rome 721 le consulat d’Auguste et de L. Volcatius, au lieu de l’attribuer à l’année 719, que nous trouvons dans Frontin. Cette différence de deux années se reproduit à chacune des époques données par notre auteur postérieurement à l’an 500 de la fondation de Rome.

29. Diverticulo. À l’exemple de M. Dederich, j’ai intercalé ce mot dans le texte, où le sens le réclamait.

30. Tepulæ rivum intercepit. Agrippa fit servir l’aqueduc de la Tepula à la conduite de l’eau Julia, depuis l’endroit où celle-ci, dont la source était la plus éloignée des deux, le rencontrait dans son parcours. Alors les deux canaux furent placés l’un sur l’autre, et portés par les mêmes massifs de maçonnerie et les mêmes arcades, probablement jusque dans la ville. On voit encore sur les anciens remparts, sur les portes, sur les arcs de triomphe, et dans la campagne de Home, plusieurs restes de deux, et même de trois canaux ainsi superposés.

31. Exclusa ergo est Crabra. J’ai rétabli le mot est, d’après Joconde et le manuscrit du Vatican, qui porte vero au lieu de ergo. M. Dederich lit exclusi ergo Crabram, et… reddidi. L’eau Crabra, avant d’être amenée à Rome, alimentait la citadelle de Tusculum. On a découvert en 1817 la galerie antique qui conduisait cette source à la ville. Voyez Niebuhr, trad. de M. de Golbéry, t. iii, p. 338.

32. Hanc originem pictura ostendit. Pline (liv. xxxi, ch. 25) donne une autre origine au nom de cette eau : « Juxta est Herculaneus rivus, quem refugiens Virginis nomen obtinuit. » Ce récit est plus poétique assurément, mais moins vraisemblable que celui de Frontin, qui est circonstancié, et s’appuie sur le témoignage du monument et du tableau qu’on trouvait encore de son temps près de la source. Cassiodore (Ep. vii, 6) dit que l’eau Vierge est ainsi appelée, parce qu’elle est parfaitement pure ; mais cette opinion peut paraître conjecturale, de la part d’un auteur du vie siècle.

Encore aujourd’hui l’acqua Vergine est la meilleure eau de Rome. Elle se répand par la belle fontaine de Trevi, commencée sous le pontificat de Clément XII, par l’architecte Nicolas Salvi, et achevée sous Benoît XIV.

33. Concipitur ergo via Collatia ad milliarium viii. Pline (ubi supra) dit : « Idem (Agrippa) et Virginem adduxit ab octavi lapidis diverticulo duobus millibus passuum Prænestina via. » Fabretti et Poleni ont prouvé, par leurs travaux topographiques, que Pline et Frontin étaient d’accord, attendu que la source est entre les deux routes, à la distance fixée par ces deux auteurs.

34. Opus Naumachiæ. La naumachie d’Auguste était dans la quatorzième région de Rome. C’était simplement un lac ou étang creusé dans le sol, et sans autre amphithéâtre que la terre résultant de la fouille, navale prœlium circa Tiberim cavato solo (Suetonius, in Augusto, c. xliii). Plus tard il y eut des naumachies entourées de gradins, comme les cirques.

35. Ex lacu Alsietino. C’est aujourd’hui le lac Martignano.

36. Quod opus Claudius magnificentissime consummavit. Suétone (Vie de Claude, ch. xx) fait mention de ces grands travaux ; et Pline (liv. xxxvi, ch. 24) s’exprime ainsi : « Tous les aqueducs des époques antérieures le cèdent à celui que commença Caligula, et que termina Claude. Les eaux des sources Curtia, Cærulea et Anio Novus, ont été amenées à Rome d’une distance de quarante milles, et élevées au niveau des sept collines. On alloua pour cet ouvrage cinquante-cinq millions cinq cent mille sesterces. Si l’on considère attentivement quelle quantité d’eau il a fourni au public pour les bains, les réservoirs, les maisons, les canaux, les jardins, les faubourgs, les maisons de campagne ; si l’on songe aux arcades construites pour lesamener de si loin, ainsi qu’aux montagnes percées, et aux vallées comblées, on avouera que le monde entier n’offre point de merveilles plus étonnantes. » (Trad. de M. Ajasson de Grandsagne.)

37. Dedicavitque. Ceux qui faisaient les frais d’un édifice public avaient le droit d’en perpétuer le souvenir, au moyen d’une inscription indiquant leur nom, la nature et le but de leur entreprise. On lit encore sur l’arc de triomphe dont on a fait la Porte-Majeure, cette inscription, qui rappelle l’ouvrage de Claude, relativement à l’eau Vierge et au Nouvel Anio :

ti. clavdivs. drvsi. f. caisar. avgvstvs. germanicvs.

pontif. maxim.
tribvnicia. potestate. xii. cos. v. imperator. xxvii.
pater. patriae.
aqvam. clavdiam. ex. fontibvs. qvi vocabantvr.
cærvlevs. et. cvrtivs.
a. milliario. xxxxv.
item. aniensem. novam. a. milliario. lxii.
sva. impensa. in. vrbem. perdvcendas. cvravit.

38. Alias omnes præcedit. Le sens que j’ai donné à ces mots s’appuie sur ce passage du § 91 : « Quum editissimus veniat (Anio Novus) et in primis abundans. » L’Italien Orsini traduit ed ha la precedenza su tutte le altre acque. M. Dederich lit alias omnes perdit.

39. Claudia concipitur… ad milliarium xxxviii. Pline (ubi supra) met cette source à quarante milles de Rome, et l’inscription citée plus haut (note 37) la porte à quarante-cinq milles. Peut-être y a-t-il erreur de la part de Frontin ou de ses copistes, ou plutôt de la part des ouvriers chargés de graver l’inscription sur la pierre. Peut-être aussi, et cela paraît encore plus probable, les auteurs de l’inscription ont-ils calculé la distance sur le parcours de l’aqueduc dans toutes ses sinuosités, tandis que Frontin n’a considéré que le nombre des milles marqués sur la voie Sublacensis. On sait que les Romains faisaient décrire à leurs aqueducs beaucoup d’angles en zigzag, soit pour gagner le niveau nécessaire dans les accidents de terrain, soit pour modérer l’impétuosité du cours de l’eau, à laquelle ils donnaient habituellement un pour cent de pente.

40. Augustæ fons. Cette eau Auguste est celle dont il est question dans le § 12. Elle perdait son nom une fois qu’elle était réunie à l’eau Marcia. Il ne faut pas la confondre avec l’Alsiétina, qu’on appelait aussi Auguste, eau très-abondante, mais de mauvaise qualité. Voyez § 11.

41. Aniu Novus… ad milliarium xlii. L’inscription porte lxii, ce qui fait une différence de vingt milles. Nous l’expliquerons comme celle qui a été signalée dans la note 39. Les ouvriers qui ont gravé l’inscription ont pu, au moyen d’une simple transposition de lettres, faire du nombre xlii celui de lxii ; ou bien cette inscription rappelle le nombre des milles parcourus par le canal, et Frontin celui des milles de la route.

42. Piscina limaria. Fabretti a donné le dessin de ces piscines ou bassins épuratoires (Dissert., p. 126), et Poleni l’a reproduit. M. Rondelet l’a également donné dans son atlas.

43. Tot aquarum tam multis necessariis molibus pyramides. Dans cette comparaison des pyramides d’Égypte et des monuments de la Grèce avec les aqueducs de Rome, Frontin donne l’avantage à ces derniers édifices, sous le point de vue de la grandeur, comme de l’utilité de l’ouvrage. Denys d’Halicarnasse (liv. iii), Pline (liv. xxxvi, ch. 24), Cassiodore (Epist., liv. vii, lett. 6), et plusieurs autres, s’accordent à regarder les aqueducs comme les monuments qui attestaient le mieux la magnificence des Romains. Le poëte Rutilius ne les a pas oubliés dans son Itinéraire :

Quid loquar aerio pendentes fornice rivos,
Qua vix imbriferas tolleret Iris aquas ?
Hos potius dicas crevisse in aidera montes,
Tale giganteum Græcia laudat opus.
Intercepta tuis conduntur flumina muris ;
Consumunt totos celsa lavacra lacus.
Nec minus et propriis celebrantur roscida venis,
Totaque nativo mœnia fonte sonant.
Frigidus æstivas hinc temperat halitus auras ;
Innocuamque levat purior unda sitim.
(Lib. I. v. 97.)

La longueur totale des aqueducs était de plus de 420 kilomètres. Ils fournissaient, d’après le relevé fait par Frontin, 14,018 quinaires d’eau, équivalant, selon le calcul de M. de Prony, à 785,000 mètres cubes, ou à 40,900 pouces de fontainier, c’est-à-dire une quantité d’eau plus que triple de celle que fournit à Paris le canal de l’Ourq, valeur moyenne. Ajoutons à cela plus de 10,000 quinaires que Frontin recouvra sur les détournements frauduleux, et le produit de cinq aqueducs qui furent encore construits après Frontin. Procope en a effectivement compté quatorze. Aujourd’hui il ne reste de ces immenses ouvrages que trois aqueducs, qui ont été successivement restaurés par les papes, et qui portent les noms d’Acqua Vergine, d’Acqua Felice et d’Acqua Paola. La première donne 65,782 mètres cubes d’eau en vingt quatre heures, et alimente la fontaine de Trevi (note 32) ; l’Acqua Felice, provenant des anciennes eaux Claudia et Marcia, et d’autres, donne 20,537 mètres cubes d’eau en vingt-quatre heures, et se distribue en plus de vingt-cinq fontaines, parmi lesquelles on remarque celle de Moïse ; l’Acqua Paola, formée d’eaux recueillies près de Bassano, d’Arcolo, et dans le lac Bracciano, donne en vingt-quatre heures 94,181 mètres cubes d’eau, et alimente les fontaines de la place Saint-Pierre, celles du palais pontifical, etc. Les autres aqueducs sont en ruine.

44. Formas. Ce mot est pris ici dans le sens de imagines. Fabretli (§ 219) le traduit par ichnographiam ; c’est le plan horizontal et géométral.

45. Facere curavimus. Un latiniste regrette de ne pas lire faciendas au lieu facere ; mais on trouve dans d’autres auteurs des exemples de cette construction : « Quanquam (Domitianus) bibliothecas incendio absumptas impensissime reparare curasset. » ( Suetonius, in Domit., c. xx.)

46. Protegendi muniendique exigant curam. L’édition de Poleni porte perterrendi, ac muniendi ii exigant curam. J’ai adopté la leçon de M. Dederich, autorisée par le manuscrit de la Bibliothèque nationale.

47. Pressura. Cette pression n’est autre chose que la force résultant de la pente donnée au canal.

48. Altissimus est Anio Novus. Piranesi a fait des nivellements d’après lesquels il a évalué en palmes romains la hauteur de chacune des eaux à son arrivée dans Rome, hauteur qu’il a calculée en prenant pour point de départ le sol du quai du Tibre, près de l’embouchure de la cloaque Maxime, et en s’élevant jusqu’au fond de chacun des canaux. En voici le tableau, que j’emprunte à M. Rondelet, avec la conversion des palmes en mètres :

HAUTEUR EN
palmes romains. mètres.
Nouvel Anio
213,125 47,52
Claudia
212,708 47,42
Julia
178,125 39,71
Tepula
171,465 38,23
Marcia
168,125 37,48
Vieil Anio
112,917 25,17
Virgo
47,792 10,43
Appia
37,542 8,37
Alsiétina, hauteur approximative
»  » 5,00


Je dois faire observer que M. Rondelet, dans son calcul de conversion, attribue au palme romain une valeur de 222 millim. 96, tandis que M. de Prony, dans l’Annuaire du Bureau des longitudes (année 1840 et autres), ne lui donne que 212 millim. 05.

49. Ex his sex… contextis piscinis excipiuntur. Les six eaux qui se rendaient dans ces piscines étaient le Vieil Anio, la Marcia, la Tepula, la Julia, la Claudia et le Nouvel Anio.

50. Conjunctim infra terram euntes. Leçon de M. Dederich, remplissant une lacune du texte de Poleni.

51. Post hortos Pallantianos. Ces jardins étaient situés entre les voies Collatine et Prénestine, au sud-est de la ville. Voyez le plan de Piranesi.

52. Marcia… in rivum qui vocatur Herculaneus, dejecit. Piranesi a donné (Antiq. rom., t. i, tav. 38, fig. 2) le profil du conduit et du réservoir par lesquels une partie de l’eau Marcia passait dans le canal dit Herculien. M. Rondelet l’a copié.

53. Citra iv milliarium. Il y a dans le texte une lacune qui a été diversement remplie par les commentateurs. Corradin de Allio lit, d’après les indications du manuscrit du Mont-Cassin : « Anio Vetus circa iv milliarium intrat in viam, qui a Latina in Lavicanam inter arcus trajecit. » La leçon de M. Dederich est : « Anio Vetus circa iv milliarium infra Novi, que a via Latina in Lavicanam itur, etc. »

54. Secundum frontem Septorum. Les septes étaient de vastes portiques destinés à servir d’abri au peuple pendant les comices. Ils étaient situés dans la région dite de la voie large. On distinguait les septa Julia et les septa Agrippiana. — Voyez à cet égard l’ouvrage de M. Dézobry, Rome au siècle d’Auguste, t. Ier, Description de Rome, nos 46 et 177.

55. Origines. L’édition de Poleni porte ordines. J’ai préféré la leçon de l’édition de Wesel.

56. Vires. La valeur relative des modules, sous le rapport de leur capacité.

57. Uncia in… observatur. M. Dederich a rempli ainsi cette lacune : « Unciæ in popularibus rationibus adhuc observantur. »

58. Quia anguli deteruntur. Pour l’intelligence de ce passage, relatif aux deux sortes de doigts, il faut observer que le doigt rond était un cercle inscrit dans le doigt carré, ou un cercle ayant pour diamètre le doigt linéaire. Par parties angulaires, nous entendons les surfaces comprises entre les contours du carré et du cercle. Ainsi, dans cette figure, dont j’emprunte la disposition à Poleni,

AB représente le doigt linéaire, ABCH le doigt carré, EFDG le doigt rond, et s, v, x, z, les parties angulaires, que Fronlin regarde, à tort, comme formant exactement les trois quatorzièmes du doigt carré, et les trois onzièmes du doigt rond. Ces valeurs ne sont qu’approchées : Frontin les a calculées en adoptant 3 comme le rapport de la circonférence au diamètre. Dans cette hypothèse, si l’on prend le doigt carré pour unité, le doigt rond est égal au quart de 3, ou a . La différence de ces deux surfaces, c’est-à-dire l’ensemble des parties angulaires, est donc 1 moins , ou . Ce résultat est évidemment les du doigt carré, et les du doigt rond. En réalité, les rapports de ces trois surfaces sont incommensurables ; mais l’approximation donnée par Frontin peut suffire en architecture.

59. Plumbea lamina plana, quinque digitorum latitudinem habens, etc. Vitruve pensait que l’on devait désigner les tuyaux par des mots tirés du nombre de doigts qu’avait en largeur la feuille de plomb avant d’être courbée : « Ex latitudine autem lamnarum quot digitos habuerint, antequam in rotundationem flectantur, magnitudinum ita nomina concipiunt fistulæ. Namque quæ lamna fuerit digitorum quinquaginta, cum fistula perficietur ex ea lamna, vocabitur quinquagenaria, similiterque reliquæ. » (lib. vii, c. 7.) Cette opinion, que Frontin ne partage point, comme on le voit quelques lignes plus bas, était aussi celle de Pline : « Denaria fistula appellatur, cujus laminæ latitudo, antequam curvetur, digitorum decem est ; dimidioque ejus quinaria. » (Lib. xxxi, c. 31.)

60. Quinque quadrantum. Comme il s’agit ici du doigt, quadrans signifie un quart de doigt. Avant d’aller plus loin, il est à propos d’indiquer la valeur des nombres fractionnaires qui vont se représenter souvent dans le texte.

Les Romains donnaient le nom d’as à une unité quelconque, à un entier reconnu divisible, tel que la livre, le pied, le jugerum, une certaine monnaie, le setier (sextarius), et le quinaire. L’as se divise en douze onces, et l’once en vingt-quatre scrupules. Les divers multiples de l’once, ainsi que ses diverses fractions, avaient des noms particuliers, qui s’appliquaient aussi à toute espèce d’objets divisibles. Voici le tableau de cette nomenclature, avec les valeurs décimales correspondantes de l’as et de ses parties :

NOMS des sous-divisions de l’as ou unité. VALEURS DES SOUS-DIVISIONS DE l’AS
en onces ou 12mes d’as. en scrupules ou 288mes d’as. en fractions décimales de l’as.
As ou unité
12 288 1,00000
Deunx
11 264 0,91667
Dextans
10 240 0,83333
Dodrans
9 216 0,75000
Bes
8 192 0,66667
Septunx
7 168 0,58333
Semis
6 144 0,50000
Quincunx
5 120 0,41667
Triens
4 96 0,33333
Quadrans
3 72 0,25000
Sextans
2 48 0,16667
Sescuncia
1 36 0,12500
Uncia
1 24 0,08333
Semuncia
12 0,04167
Duella
8 0,02778
Sicilicus
6 0,02083
Sextula
4 0,01389
Scripulum
1 0,00347


61. Et bessem scrupuli. M. Rondelet a ainsi vérifié ce calcul : « On démontre en géométrie que la superficie d’un cercle est égale au carré de son rayon multiplié par 3 ; d’où il résulte que, pour avoir le diamètre d’un cercle de même superficie qu’un carré, il faut prendre le double de la racine de cette superficie divisée par 3, ce qui donne pour le diamètre du tuyau rond 1 doigt, ou 37 scrupules, savoir :

Pour une once
24
Pour la demie
12
Pour un scrupule
1
En tout
37, comme le trouve Frontin.

Les capacités étant entre elles comme les carrés des diamètres des tuyaux, celle du module d’une once sera à celle du quinaire comme le carré de 1 doigt est au carré de 1 doigt, comme le carré de 16 est au carré de 15, et enfin comme 256 est à 225, dont la différence, qui est 31, est plus grande que le huitième de 225, qui représente le tuyau quinaire qui se divisait en 288 scrupules, ce qui donne la proportion 225 : 256 :: 288 : 327 ; et, prenant 288 pour unité, on aura, pour la capacité du tuyau d’une once, un quinaire , qui ne diffère presque pas de 39.

L’once vaut
24 scrupules ;
La demie
12
Plus
3
En tout
39.

62. Excipiuntur in castellum. Il s’agit sans doute ici des châteaux où les particuliers concessionnaires prenaient l’eau, privata castella, qu’il ne faut pas confondre avec les châteaux d’où se distiribuaient les eaux destinées au public, castella publica. Frontin en fait la distinction au § 3.

63. Nec jam in solidum capacitatem ampliat. Ce n’est point un nombre entier, solidus numerus, qui vient faire la différence entre la capacité du quinaire et celle du senaire, puisque ce module n’excède le premier que de 5 onces ; il en est de même des autres modules.

64. Digitorum quadratorum exiguo minus viginti. En effet, si l’on multiplie 25, carré de 5, par , on a 19 doigts.

65. Capacitati quinariæ quadrantem. « Le diamètre du duodénaire devait être de 3 doigts, et sa capacité de 5 quinaires (art. xliv). Les fontainiers lui donnaient 18 scrupules, ou de doigt de plus ; et comme les capacités des tuyaux sont entre elles comme les carrés de leur diamètre, celle de ces deux modules devait être comme le carré de 3 est au carré de 3, à peu de chose près, comme 24 est à 25.

La capacité du duodénaire étant 5,76 quinaires, on a la proportion 24 : 25 :: 5, 76 : 6, c’est-à-dire que le module des fontainiers fournissait de quinaire de trop, ou un peu moins d’un quart. » (Rondelet.)

66. Capacitate quinariis tribus et semuncia. « Le diamètre du vicenaire devait être de 5 doigts, et son produit de 16 quinaires. Les fontainiers ne lui donnant que 4 doigts, les produits de ces deux modules devaient être comme le carré de 5 est au carré de 4, comme 25 est à 20, comme 100 est à 81 ; ce qui donne la proportion 100 : 81 :: 16 : 12, ou 12 quinaires 276 scrupules ; ce qui donne une différence de 3 quinaires 11 scrupules, c’est-à-dire scrupule de moins que Frontin. » (Rondelet)

67. Quod quum ratione approbetur. M. de Prony a vérifié de cette manière le calcul de Frontin : «  et étant, respectivement, le nombre légal, et le nombre augmenté par les fontainiers, des quinaires contenus dans un des modules avec lesquels on leur livre l’eau ; et les nombres respectifs, légaux et diminués par eux, des quinaires contenus dans le module avec lequel ils débitent ; le résultat de la double fraude, ou le nombre de quinaires qu’ils gagnent en changeant et en et , a pour valeur . Si est le vicenaire, on a (Voyez le note 76) 0,81 ; et si, avec cette valeur, on emploie successivement celles qui conviennent aux modules de 100 et 120, savoir, 81,49 ; 92,05 ; et 97,78 ; 163,56 ; on aura 26,04 et 84,36, nombres sensiblement équivalents à ceux de Frontinus. »

68. In summa moduli sunt xxv. Ces 25 modules étaient, comme on l’a vu (§§ 27 et 28), partagés en deux séries. L’une avait pour point de départ le quinaire, et prenait son accroissement par l’addition d’un quart de doigt au diamètre, jusqu’au vicenaire inclusivement. L’autre série commençait au module de vingt-cinq, qui était ainsi appelé parce que son orifice était de 25 doigts carrés, et finissait à celui de 120, représentant de la même manière 120 doigts carrés.

69. Sextarii ratio ad cyathos. Le cyathe était le du setier, et le setier le du muid, unité des mesures romaines pour les choses sèches, et équivalant à 8 litres 63 centilitres.

70.Est autem calix modules æneus. Par les calices se trouvent réalisées, dans la pratique, les proportions ou quantités relatives appelées modules, dans la distribution des eaux. C’est par les calices que les tuyaux de concession prennent leur origine dans les châteaux d’eau. Voyez, plus bas, §§ 105, 106, 112 et 113.

71. Non timeri potest laxari. Au lieu de timeri, qui offre en cet endroit, il est vrai, une construction d’une latinité un peu suspecte, M. Dederich lit temere ; et, terminant ce chapitre par coartari, il commence le suivant par formulas modulorum, qui sunt, etc.

72. In ipsis est annotatum, et… Lacune dans le texte. Les mots unciæ modules habet sont une restitution proposée par Poleni, qui cependant ne l’a pas admise dans son texte. M. Dederich, après les mots adnotatum, et…, supprime tout le reste du paragraphe.

73. Plus quam quinariæ octavam. Le huitième du quinaire est de 36 scrupules. Or, une once et demie plus 3 scrupules, font un total de 39 scrupules.

74. Dodrantem, semunciam, sicilicum. C’est-à-dire 234 scrupules ; le calcul en donne 234.

75. Capit quinariæ septuncem, semunciam, sextulam. Cette quantité équivaut à 184 scrupules de quinaire ; le calcul en donne 184.

Le total donné par Frontin s’obtient ainsi :

7 onces réduites en scrupules font  168
La once  12
La sextule 4
En tout 184

76. Perimetri digitos tres, etc. Tous les calculs de Frontin, jusqu’au § 63, ont été vérifiés par M. Rondelet, qui les a trouvés presque tous exacts : les erreurs ne portent que sur des quantités très-faibles, souvent même inappréciables dans la pratique.

Pour mettre sous les yeux tout le système des modules cités par Frontin, et en faire saisir promptement les rapports, j’ai cru devoir reproduire à la page 496 le tableau composé par M. de Prony (Mémoires de l’Acad. des sciences, t. ii, p. 451, année 1817). On y remarquera qu’il a substitué, comme il l’annonce lui-même (ibid., p. 450), aux parties de l’unité désignées par les mots deunx, dextans, dodrans, etc., les mots équivalents d’onces et de scrupules. L’exactitude de ces substitutions peut être vérifiée par le tableau des sous-divisions de l’as que nous avons donné plus haut (note 60). Dans le but de faciliter les rapprochements, M. de Prony a placé dans les trois dernières colonnes à droite du tableau, les nombres fractionnaires décimaux équivalents des nombres fractionnaires duodécimaux de Frontin. Au moyen de cette disposition, on a, sur chaque ligne horizontale, deux expressions des dimensions et de l’aire de l’orifice de chaque module.

TABLEAU DU SYSTÈME DES MESURES ROMAINES
APPLICABLES À LA DISTRIBUTION DES EAUX.
Nota. — L’expression surface en quinaire désigne le nombre de fois que l’aire d’un orifice contient l’aire d’un cercle dont le diamètre de doigt. Les lettres initiales n. u. indiquent les modules qui n’étaient pas en usage au temps de Frontinus.
CLASSEMENT et noms des modules. DIMENSIONS DES ORIFICES en nombres fractionnaires duodécimaux, d’après les sous-divisions romaines de l’as. DIMENSIONS des orifices en nombres fractionnaires décimaux.
diamètre. circon-férence. surface
en
quinaires.
diamètre. circon-férence. surface
en
quinaires.
Doigts. Onces ou 12es de doigt. Scrupules ou 24es d’once. Doigts. Onces ou 12es de doigt. Scrupules ou 24es d’once. Quinaires. Onces ou 12es de quinaire. Scrupules ou 24es d’once. Doigts et parties décimales. Doigts et parties décimales. Quinaires et parties décimales.
1re DIVISION.
Uncia
1 4 0 4 2 6 1 1 1.33333 4,18878 1,13773
Digitus quadratus in rotundum redactus
1 1 13 3 6 13 0 9 18 1,12847 3,54519 0,081250
Digitus rotundus
1 0 0 3 1 17 0 7 16 1,00000 3,14159 0,64000
2e DIVISION.
Fistula
quinaria
1 3 0 3 11 3 1 0 0 1,25000 3,92708 1,00000
Fistula
senaria
1 6 0 4 8 13 1 5 6 1,50000 4,71181 1,43750
septenaria, n. u.
1 9 0 5 6 0 1 11 12 1,75000 5,50000 1,95833
octonaria
2 0 0 6 3 8 2 6 18 2,00000 6,27778 2,56250
denaria
2 6 0 7 10 6 4 0 0 2,50000 7,85417 4,00000
duodenaria, n. u.
3 0 0 9 5 2 5 9 0 3,00000 9,48611 5,75000
apud aquarios
3 0 18 9 7 11 6 0 0 3,75000 9,62118 6,00000
quinum denum
3 9 0 11 9 8 9 0 0 3,75000 11,7778 9,00000
vicenaria
5 0 0 15 8 12 16 0 0 5,00000 15,70833 16,00000
apud aquarios
4 6 0 14 1 15 12 11 12 4,50000 14,13717 12,95383
3e DIVISION.
Aire de l’orifice, 25 d. q. fistula vicenum quinum
5 7 17 17 8 18 20 4 12 5,64236 17,72917 20,37500
30 doigts q., fistula tricenaria
6 2 4 19 5 0 24 5 8 6,18056 19,41667 24,44444
35 n. u.
tricenum quinum
6 8 3 20 11 18 28 6 6 6,67708 20,97917 28,52083
40
quadragenaria
7 1 16 22 5 0 32 7 4 7,13889 22,41667 32,59722
45 n. u.
quadragenum quinum
7 8 20 23 9 8 36 8 0 7,56944 13,77778 36,66667
50
a quinquagenaria
7 11 18 25 0 18 40 9 0 7,97917 25,06250 40,75000
55 n. u.
quinquagenum quinum
8 4 10 26 3 12 44 9 20 8,36806 26,29167 44,81944
60
sexagenaria
8 8 21 27 5 12 48 10 16 8,73958 27,45833 48,88889
65 n. u.
sexagenum quinum
9 1 4 28 6 22 52 11 12 9,84722 28,57639 52,95833
70
septuagenaria
9 5 8 29 8 0 57 0 12 9,44444 29,66667 57,04167
75 n. u.
septuagenum quinum
9 9 6 30 8 8 61 1 8 9,77083 30,69445 61,11111
80
octogenaria
10 1 2 31 8 8 65 2 6 10,09028 31,69445 65,18750
85 n. u.
octogenum quinum
10 4 20 32 8 4 69 3 4 10,40278 32,63056 69,26389
90
nonagenaria
10 8 11 33 7 14 73 4 0 10,70486 33,63194 73,33333
95 n. u.
nonagenum quinum
11 0 0 34 6 16 77 5 0 11,00000 34,55556 77,41667
100
centenaria
11 3 10 35 5 10 81 5 20 11,28472 35,45139 81,48611
113
apud aquarios
11 11 22 37 8 3 92 0 14 11,99306 37,67744 92,04861
120
centenum vicenum
12 4 8 38 10 0 97 9 10 12,36111 38,83333 97,78472
200
apud aquarios
15 11 20 50 2 2 163 6 16 15,98611 50,22180 163,55556

77. Semunciam, sextulam, scripulum. Jusqu’ici chaque mot latin exprimant une fraction a été traduit littéralement. À partir de ce paragraphe, j’en ai réduit un grand nombre à des expressions plus simples et plus claires, que l’on peut comparer et vérifier, comme il a été dit dans la note précédente, au moyen du tableau des mesures romaines donné plus haut (Voyez la note 60). Ainsi, au lieu de traduire les trois mots ci-dessus par une demi-once, un sixième et un scrupule, j’écris dix-sept scrupules ; en effet,

La demi-once valant  12 scrupules,
Le sixième d’once  4
Le scrupule 1
On a en tout 17 scrupules.

78. Fistula tricenaria. Comme dans le paragraphe précédent, il s’agit ici de doigts carrés ; et il en est de même encore dans les paragraphes suivants, jusqu’au 63e inclusivement.

79. Plus in distributione, quam in accepto computabantur quinariæ mcclxiii. Voici le tableau synoptique de la quantité d’eau reçue et distribuée au moyen de chacun des aqueducs, d’après Frontin, qui en donne le détail dans les paragraphes suivants, 65-73.

DÉSIGNATION des AQUEDUCS. NOMBRE DES QUINAIRES
REÇUS dans les aqueducs et reconnus par les règlements. CONSTATÉS dans la distribution. ENTRANT dans les aqueducs d’après le jaugeage de Frontin.
Appia 
841 704 1,825
Vieil Anio 
1,441 1,610 4,398
Marcia 
2,162 1,935 4,690
Tepula 
400 445 445
Julia 
649 803 1,206
Vierge 
752 2,504 2,504
Alsiétina 
392 392 »
Claudia 
2,855 1,588 4,607
Anio neuf 
3,263 4,048 4,738
En tout. 12,755 14,029 24,413
Je dois faire observer que les 392 quinaires qui figurent dans les deux premières colonnes ne devraient rigoureusement être portés que dans la seconde, si l’on s’en tenait aux termes du § 71, où il est dit Alsietinæ conceptionis modus nec in commentariis adscriptus est ; mais si l’on additionnait les quinaires inscrits dans les registres pour les huit autres aqueducs, on trouverait 12,363, nombre inférieur de 392 à celui que Frontin donne lui-même ici, fuere ergo in commentariis in universo quinariarum xii millia dcclv. Or, ces 392 sont reconnus par l’auteur dans la distribution (Alsietina erogat quinarias cccxcii) : il est donc probable que ce nombre était également reconnu, sinon dans les registres du prince, du moins par les fontainiers et les intendants, comme faisant partie du volume d’eau reçu dans les aqueducs.

Il faut aussi remarquer que le total de 14,018 quinaires donné par Frontin à l’eau distribuée, est inférieur de onze unités à celui que nous avons fait d’après les nombres partiels assignés par l’auteur aux neuf aqueducs ; mais il a pu se glisser une erreur dans les calculs de Frontin, ou plutôt sous la main des copistes.

80. Intra Spem Veterem. Le temple de la Vieille Espérance était au sud-est de Rome. Voyez le plan de Piranesi.

81. Infra terram ad caput pedibus l. Ceci est assez d’accord avec ce qui est dit au § 5, sur les conduits souterrains de l’Appia.

82. Ad hortos Epaphroditianos. On ne trouve dans les anciens auteurs aucune mention de ces jardins.

83. Modus quinariarum dcclii minus. Cela ne peut s’entendre que d’une fraction entre 751 et 752 quinaires ; autrement le nombre total de 12,755 éprouverait un changement.

84. Ad milliarium ii. Les éditions antérieures à celle de Wesel portaient ad mill. vii, ce qui semble d’autant plus étrange, à côte des mots prope urbem, que l’eau Vierge n’était prise qu’à huit milles de Rome.

85. In agro, qui nunc est Cejonii Commodi. Le nom de Cejonius Commodus était très-distingué à Rome, comme on le voit dans Spartien (Ælius Verus) et dans Capitolin (Verus imperator). On trouve dans les Fastes, l’an 106 de l’ère chrétienne, un consul du nom de Cejonius Commodus Verus : c’est l’année de la mort de Frontin.

86. Deinde circa Careias ex Sabatino. La ville ou bourgade de Caréies était située au nord-ouest de Rome, à la quinzième borne milliaire de la voie Claudienne, sur la rive gauche de l’Aro, petit fleuve qui sort du lac Sabatinus, aujourd’hui Lago di Bracciano. — Voyez Cluvier, Italia antiq., et la table de Peutinger.

87. Temperaverunt. Ce mot ne signifie point ici mêler, mais régler, déterminer, selon le besoin ou la volonté, la quantité d’eau qu’on veut prendre.

88. Mensuris blandiri. Cette expression semble trahir un sentiment dont Frontin se défend, le plaisir de trouver en défaut ses prédécesseurs, et d’insister sur leur négligence. On dirait de même vitiis blandiri, d’un peintre qui se plairait à exagérer les imperfections d’une figure, pour la caricaturer.

89. In Marciæ supplementum. Cf. le § 12.

90. Quarum acquisitionem non avide me amplecti. Nouvelle protestation contre l’intention qu’on pourrait prêter à l’auteur. Cf. la note 88.

91. Obstat quod, ipso actis mensuris. L’édition de Deux-Ponts portait obstant… quod ipsis… mensuris. J’ai suivi la leçon de M. Dederich.

92. A Cœlio Rufo. Poleni pense qu’il s’agit ici du célèbre auteur Célius Rufus, ami de Cicéron, et dont parlent Suétone (de Claris rhetoribus) et Quintilien (Insti. orat., liv. ii, ch. 1). Ce qui confirme le savant commentateur dans son opinion, c’est que Célius Rufus, ayant été successivement questeur, tribun du peuple, édile curule, et prêteur de la ville, a dû se trouver, plus que tout autre, dans le cas de prononcer un discours sur les eaux et les aqueducs. Il y a d’ailleurs, dans le recueil de la correspondance de Cicéron (Lett. fam., liv. viii, lett. 6), une lettre de Célius ou l’on trouve ce passage : « Dici non potest quomodo hic omnia jaceant. Nisi ego cum tabernariis et aquariis pugnarem, veternus civitatem occupasset. »

93. Utinam non par offensas probaremus. Cf. la dernière phrase du Mémoire de Frontin (§ 130) : In relique vero opto, ne executio legis necessaria sit, etc.

94. Ita est… Lacune dans le texte. Les manuscrits n’offrent rien d’assez positif pour autoriser une restitution.

95. Semis. Ce demi-quinaire est négligé par Frontin dans le total de 9,955 qu’il a donné plus haut, ou bien une autre moitié de quinaire a été omise dans l’une des quantités suivantes. La même chose se représente dans les paragraphes subséquents.

96. Castris. Il serait difficile de préciser le sens de ce mot. On peut cependant entendre ici par camps, des casernes ou des corps-de-garde occupés par un certain nombre de soldats. Quelquefois c’était une sorte de guérite destinée à un seul homme, cavalier ou fantassin. On trouve dans Publius Victor (XIVe région de Rome) castra equitum singulorum duo.

97. Euripo. Les Romains, tels que les Lucullus, les Hortensius, qui n’épargnaient rien pour le luxe de leurs jardins d’agrément, y faisaient venir, souvent à frais énormes, au moyen d’aqueducs, des filets d’eau vive auxquels ils aimaient à donner des noms fastueux de fleuves : c’étaient des Nils, des Euripes, etc. Cicéron (de Legibus, lib. ii, c. 1) a blâmé ces prétentions des riches : « Ductus vero aquarum quos isti Nilos et Euripos vocant, quis non, quum haec videat, irriserit. »

Le nom d’Euripe fut consacré par l’usage pour désigner des canaux d’eau courante, et même des bassins ou des fossés d’eau stagnante, tels que celui dont César entoura le grand Cirque, pour empêcher les animaux destinés aux combats de tenter une évasion. Le passage suivant de Pline (liv. viii, ch. 7) est assez clair : « Pompeii quoque altero consulatu, dedicatione templi Veneris Victricis, pugnavere in circo viginti, aut, ut quidam tradunt, decem et septem (elephanti). Universi eruptionem tentavere, non sine vexatione populi circumdati claustris ferreis. Qua de causa Cæsar dictator, postea simile spectaculum editurus, Euripis arenam circumdedit : quos Nero princeps sustulit, equiti loca addens. »

Le même auteur rapporte que M. Scaurus fit voir à Rome, lors des jeux qu’il donna à l’occasion de son édilité, cinq crocodiles et un hippopotame, dans un bassin creusé pour cette circonstance, temporario Euripo. Lampride, en parlant des prodigalités et des débauches d’Héliogabale, dit (ch. xxiii) : « Fertur in Euripis vino plenis navales circenses exhihuisse. »

L’Euripe dont parle ici Frontin appartenait probablement à un service public, puisqu’il recevait 460 quinaires.

98. Ad Nervam imperatorem. Ces mots désignent, non M. Cocceius Nerva, mais son successeur Nerva Trajan, sous le règne duquel Frontin réorganisa l’administration des eaux.

99. Marcia reddita ampto opere a Cœlio in Aventminum usque perducitur. Cf. §§ 19 et 76.

100. Cui par nihil, et nihil secundum. Pour avoir une nouvelle occasion de louer Trajan, l’auteur fait de Rome un pompeux éloge, que Juste-Lipse a rapproché de ces deux vers de Martial :

Terrarum dea, gentiumque Roma,
Cui par est nihil, et nihil secundum.
(Epigr. lib. II, ep. 8.)

101. Alia jam munditiarum facies.Voyez plus bas, § 111, note 128.

102. Si putei exstructi objecti sint. J’ai traduit putei d’après la note suivante de Barbaro, commentateur de Vitruve : « Æstuaria, quibus respirare posset perfluens aqua, et vis spiritus relaxaretur, ne conclusus aer cursum aquee moraretur. » Cf. Vitruve, liv. vii, ch. 7, et les notes de Perrault.

103. Purissimo defluens lacu. L’Anio, qui prenait sa source près de Treba Augusta, dans le pays des Èques, traversait trois petits lacs appelés Simbruina stagna, au-dessus de Sublaqueum, aujourd’hui Subiaco. — Voyez Pline, liv. iii, ch. 12 ; et Cluvier, Italia antiqua.

104. Quo tempore, etc. Les éditions antérieures à celle de Wesel portent : « Quo tempore exit gratior aquarum sinceritas, et exigitur, » ce qui est beaucoup moins clair.

105. Inferior. Je lis comme M. Dederich ; les autres éditions donnent interior, leçon que Poleni a peine à expliquer.

106. Supra Trebam Augustam.Voyez la note 103.

107. Præscriberte titulo. L’itinéraire d’Antonin fait mention d’une aqua Trajana.

108. Vectigalis.Voyez la note 134.

109. In domos principuim civiatis dabatur. Cette faveur était sans doute accordée aux premiers de la ville comme une récompense de services, ou pour tout autre motif, qui n’infirmait en rien les droits absolus du peuple.

110. A censoribus permissum. Cicéron (de Legibus, lib. iii, c. 3) établit ainsi les droits des censeurs : « Censores populi ævitates, soboles, familias, pecuniasque censento ; urbis templa, vias, aquas, ærarium, vectigalia tuento ; populique partes in tribus distribuunto, etc. » Les premiers censeurs, considérés comme magistrats spéciaux, furent créés l’an de Rome 311. Tibère les supprime. Les édiles, qui avaient été institués l’an 160 de Rome, subsistèrent jusqu’à Constantin.

111. Tutelam autem aquarum singularum locari. Il y avait une adjudication particulière pour chacun des aqueducs ; et cela était juste, à cause de la grande disproportion de leurs parcours, et de la différence de leur construction.

112. C. Licinio et Q. Fabio consulibus. D’après les Fastes, ce serait l’an 638 de Rome ; M. Dederich lit C. Licinio Cæsulla et Q. Fabio censoribus.

113. Apud Atteium Capitonem. C’est sans doute cet Atteius Capiton qui fut intendant des eaux l’an 13 de notre ère, sous le consulat de C. Julius Nepos et de Munatius Plancus.

114. Per vicos singulos. Par le mot vicus, nous entendons ici un quartier, une partie de région. C’est un massif de maisons borné par les rues, les places, etc., tel que l’indique Tacite (Ann., liv. xv, ch. 43) par ces mots relatifs à la reconstruction de Rome, après l’incendie qui eut lieu sous Néron : « Erecta, non, ut post Gallica incendia, nulla distinctione, nec passim, sed dimensis vicorum ordinibus, et latis viarum spatiis. » Parmi les significations de ce mot données par Pompéius Festus, on peut s’arrêter à celle-ci (liv. xix) : « Id genus ædificiorum definitur, quæ continentia sunt his oppidis, quæ itineribus regionibusque distributa inter se distant, nominibusque dissimilibus discriminis causa sunt dispartita. »

Enfin Publius Victor nous apprend que la première région (Porta Capena) comptait neuf quartiers (vici) ; la seconde (Cœlimontium) sept, etc. C’est donc à tort que l’on a souvent traduit par le mot quartier, regio et vicus, indifféremment. Cf. Économie politique des Romains, par M. Dureau de la Malle, t. Ier, p. 388.

115. Munerum. Ce mot ne peut signifier ici les spectacles, comme dans le § 3 et passim. On ne voit nulle part qu’Agrippa ait été intendant des spectacles, tandis que Pline (liv. xxxvi, ch. 24) et Frontin lui-même (§9, 10, 98, 104) nous apprennent qu’il fit don à l’État des frais occasionnés par les travaux d’utilité et d’embellissement qu’il avait entrepris et achevés pendant son édilité et son consulat. Munerum paraît trop bien lié à operum suorum. — Voyez la note 11.

Il est possible, mais moins probable, que le mot munera ait rapport aux concessions d’eau faites par Agrippa aux particuliers. Poleni et Orsini ont soupçonné ce sens, et l’ont indiqué tout en se prononçant pour celui de spectacles.

116. Curatorem facit Messalam Corvinum. Messala est véritablement le premier intendant ou curateur des eaux : les fonctions qui avaient été conférées précédemment à Agrippa ne portaient pas un caractère officiel. Il avait été chargé, ou plutôt il s’était chargé lui-même de veiller à la conservation de ses propres œuvres, et à la marche régulière de l’administration à laquelle il avait donné naissance.

117. V. F. Abréviation de la formule verba fecerunt.

118. D. E. R. Q. F. P. D. E. R. I. C. Abréviation de la formule De ea re quid fieri placeret, de ea re ita censuerunt (patres conscripti).

119. Accensos. Les fonctionnaires ainsi appelés étaient des huissiers ou appariteurs, qui accompagnaient le consul et d’autres magistrats d’un ordre élévé, et convoquaient le peuple aux assemblées : de là leur fut donné le nom d’accensi (ab acciendo, i. e. vocando). Voyez Varron, de Lingua latina, lib. v.

On désignait aussi par le mot accensi les soldats surnuméraires destinés à remplacer ceux qui étaient morts, ou ceux qu’on renvoyait du service (ab accensendo, i. e. quia ad censum adjiciebantur). Voyez Festus, liv. i.

120. Itemque, quum viarum curatores… publicisque. Plusieurs commentateurs ont pensé que toute cette phrase appartenait au sénatus-consulte qui remplit le paragraphe précédent. Cette formule itemque se retrouve au § 104.

121. Servio Asinio Celere… Quinctiliano consulibus. M. Dederich remplit cette lacune avec le mot Nonio, qu’il place avant Quinctiliano, auquel il le fait rapporter. Les fastes ne font aucune mention de ce consulat : on peut en conclure que Servius Asinius Céler et Quinctilianus étaient des consuls subrogés (suffecti).

122. Modus quem acquiri diximus. Frontin parle ici des dix mille quinaires qu’il a recouvrés. Voyez § 64.

123. Procuratorem eiusdem officii libertum Cæsaris. Cet intendant adjoint, ou procurateur, fut sans doute institué pour suppléer l’intendant, ou le seconder dans l’exercice de sa charge, qui était devenue plus importante et plus pénible, depuis que Claude avait amené à Rome le Nouvel Anio et la Claudia.

124. Adhibitis libratoribus. Dans la mise à exécution des décisions de l’autorité, en matière de concessions, les niveleurs étaient chargés, en outre des opérations de nivellement, de mesurer et d’étalonner l’orifice, ou calibre, des calices, ainsi que les tuyaux qui devaient y être immédiatement adaptés (Voyez §§ 112 et 113). Il pouvait être fait des concessions de toute espèce de modules en usage, et chaque module était réalisé par un calice. Cf. la note 70.

125. Communem accepissent. Cf. le § 27, où il est dit : « Quum plures quinariæ impetratæ, ne in viis sæpius convulneretur una fistula, excipiantur in castellum, ex quo singuli suum modum recipiunt. »

126. Nunc omnis aquæ, etc. Ce passage ne laisse aucun doute sur la nécessité où l’on était de renouveler la concession, même pour les bains qui changeaient de propriétaires. La cause de cette formalité était l’accroissement du nombre de ces établissements.

127. Ii, ad quos res pertineret… Cette lacune jette peu d’obscurité sur le sens. Poleni pense qu’on pourrait y suppléer ainsi : « Ii, ad quos res pertineret, consulere interim possint rebus suis. » M. Dederich fait la restitution : « Ii, ad quos res pertineret, dispertirent (id est, ii, ad quos ea cura, id munus, aquæ dispertiendæ pertineret, eam dispertirent). »

128. Ad utilitatem cloacarum abluendarum. L’établissement des cloaques, canaux souterrains qui étaient les réceptacles de toutes les immondices de Rome, remonte au temps des rois. La cloaque Maxime, ouvrage d’une grandeur extraordinaire, fut commencée par Tarquin l’Ancien, et achevée par Tarquin le Superbe. Tant qu’elles ne furent nettoyées que par les eaux pluviales, elles se trouvèrent souvent encombrées, et il en résultait une horrible infection dans les rues de la ville : de là l’infamis aer dont parle Frontin (§ 88). Mais lorsque Agrippa y eut fait déverser le trop-plein des sept aqueducs qui existaient de son temps ; que l’on eut construit de nouveaux conduits du même genre, et établi de ce côté un service régulier de salubrité, on admira, ainsi que les aqueducs, les splendidas Romæ civitatis cloacas (Cassiodore), operum onmium dictu maximum (Pline, liv. xxxvi, ch. 15). Voyez, sur la cloaque Maxime, l’article de M. Dézobry, Rome au siècle d’Auguste, t. iii, p. 108.

129. Facile laxiorem in proximo fistulam impleret. L’hydraulique donne sur ce sujet les résultats suivants : Les ajutages adaptés aux orifices d’écoulement peuvent, suivant leur forme, diminuer ou augmenter la dépense, ou ne pas la modifier. S’il arrive que la veine passe dans l’ajutage sans le toucher, il n’en résulte aucune influence sur la dépense ; si elle adhère à l’ajutage, celui-ci étant cylindrique, et de même diamètre que l’orifice, la dépense est augmentée dans le rapport de 100 à 133 ; enfin, en donnant à l’ajutage un diamètre un peu plus grand, on peut augmenter la dépense dans le rapport de 100 à 150.

130. Inferior plus trahit. La quantité d’eau dépensée par un orifice percé à la paroi d’un réservoir, dépend évidemment de la vitesse d’écoulement. On estimerait avec une approximation satisfaisante cette dépense pour un temps donné, en calculant le volume d’un cylindre qui aurait pour section droite la section contractée de la veine fluide, ou les de l’aire de l’orifice, et pour longueur, l’espace que parcourait, pendant le temps donné, un corps animé de la vitesse dont il s’agit. Or, étant cette vitesse, celle que les corps reçoivent, par chaque seconde, de l’action de la pesanteur, la distance verticale du centre de gravité de l’orifice au niveau du liquide, on déduit de considérations sur les forces vives, et des lois sur la chute des corps, . Ainsi, les vitesses d’écoulement, et par suite les dépenses, sont proportionnelles aux racines carrées des profondeurs des orifices. Cette conséquence théorique est, du reste, confirmée par la pratique.

131. A punctis. Les points étaient d’abord de petits modules, moduli exiles, qui servaient à la distribution de l’eau, du temps où elle était peu copieuse à Rome (supra, § 25). Ce nom est resté à tous les petits tuyaux que l’on adaptait, légitimement ou non, aux maîtresses conduites ; et l’ouvrier qui pratiquait ces percements était appelé a punctis, pointeur.

132. Villicos, castellarios, circitores, etc. Les dénominations des diverses catégories d’ouvriers sont souvent remplacées dans Frontin par le nom générique d’aquarii. Circitores désigne ceux qui visitaient à chaque instant les aqueducs, et signalaient les fuites d’eau, ainsi que toutes les dégradations qui survenaient. On donnait le même nom, dans les camps, à des officiers de confiance chargés de visiter les postes, de surveiller les sentinelles, et de rapporter ce qu’ils trouvaient de contraire au service. Voyez Végèce, liv. iii, ch. 8 : ce sont aujourd’hui les officiers de ronde.

133. Tectores. L’intérieur du canal d’un aqueduc était revêtu d’un enduit ou ciment impénétrable, appelé opus tectorium.

134. Quod impendium exoneratur vectigalium reditu ad jus aquarum pertinentium. Étant renfermé dans des limites qui ne nous permettent pas de commentaires sur les taxes et impôts dont les prises d’eau étaient frappées, nous renvoyons le lecteur à l’ouvrage de M. Dureau de la Malle, sur l’Économie politique des Romains, t. ii, p. 475 et suiv.

135. Ea constant ex… M. Dederich a rempli cette lacune par hortis ædificiisve, restitution assez clairement indiquée par le manuscrit du Mont-Cassin.

136. In Domitiani loculos. Domitien s’appropriait, comme on voit, une bonne partie du revenu des eaux, et n’accordait pas sans peine, et sans se faire prier, les concessions qui relevaient du droit de l’empereur. Voici la demande qui lui fut adressée par Martial :

Est mihi, sitque precor longum te præside, Cæsar,
Rus minimum : parvi sunt et in urbe lares.
Sed de valle brevi, quas det sitientibus hortis,
Curva laboratas antlia tullit aquas.
Sicca domus queritur nullo se rore foveri,
Quum mihi vicino Martia fonte sonet.
Quam dederis nostris, Auguste, penatibus undam,
Castalis hæc nohis, aut Jovis imber erit.
(Epigr. lib. IX, ep. 19.)

137. Ex fisco.Fiscus était le trésor du prince, et ærarium le trésor de l’État. Il en était ainsi du temps de Frontin, car on trouve, parmi les louanges que Pline le Jeune (Panég., ch. xxxvi) donne à Trajan, les paroles suivantes, qui font parfaitement sentir cette distinction : « At fortasse non eadem severitate fiscum, qua ærarium cohibes : immo tanto majore, quanto plus tibi licet de tuo, quam de publico credis. »

138. Rem enixiore cura dignam. Comparatif qui fait allusion à l’administration relâchée des prédécesseurs de Frontin.

139. Magnitudinis Romani imperii.Voyez la note 43.

140. A Kalendis aprilibus in kalendas novembres. Ces dates correspondent aux seize derniers jours de mars et d’octobre.

141. Plumbatis canalibus. C’étaient des canaux de bois garnis de plomb, et non des tuyaux de plomb (fistules plumbæ).

142. Itinera, actus.Itinera signifie des chemins ou sentiers quelconques, et par actus on entend spécialement des chemins pour les bêtes de somme et les voitures : « Actus jus est agendi vel jumentum, vel vehiculum. » (Justinianus, Instit., lib. ii, tit. 3) ; « Actus est ubi et armenta trajicere, et vehiculum ducere liceat. » (Modest., lib. xii) ; « Actus via duplex est, qua occurrentia sibi invicem vehicula commeare possunt. » (Adr. Junius, in Nomencl.)

143. Vicinales vias, agrestesque. Les chemins appelés vicinales sont ceux que tracent les particuliers sur les limites de leurs propriétés, et qui servent également aux propriétaires voisins ; les viæ agrestes étaient des chemins pratiqués dans l’intérieur des propriétés, soit pour l’agrément, soit pour l’exploitation. Telle est, du moins, l’explication qu’en a donnée Poléni, après avoir consulté tout ce qui a été écrit sur cette matière.

144. Monumentis. On entend ici par monuments, les tombeaux, colonnes, pyramides, obélisques, etc., consacrés à la mémoire des personnes ou des événements.

145. Per quæ et opera publica corrumpuntur. M. Dederich lit et quæ par ea opera rei publicæ corumpantur.

146. Si continentia ædificia. Sous-entendu essent. M. Dederich lit intra contin. ædif. Il est probable que Frontin entend par ædificia, l’ensemble des constructions appartenant à une propriété, y compris les murs d’enceinte, ce qui paraît suffisamment indiqué quelques lignes plus bas : Arbores, etc… inclusæ ædificiis.

147. H.-S. dena millia. Au temps d’Auguste, le sesterce valait un peu plus de vingt de nos centimes : dix mille sesterces font 2,037 fr. 92 c.

1&8. Per… latera passim. M. Dederich remplit ainsi cette lacune : Per fistularum vulneratarum latera.

149. T. Quinctius Crispinus cos. Les commentateurs pensent qu’il s’agit ici de celui qui fut consul avec Néron Claudius Drusus, l’an 745 de Rome.

150. Populum jure rogavit, papulusque jure scivit. Formule depuis longtemps en usage chez les Romains : Cedo illa legitima : coss. populum. jure. rogaverunt ; hoc enim a majoribus accepimus jus rogandi, populusque. jure. scivit. (Cicéron, Philippique ière, ch. 24.)

151. Pro rostris ædis divi Julii. Il y avait deux tribunes aux harangues, l’ancienne et la nouvelle (les rostres anciens et les nouveaux). Celle-ci était placée devant le temple de J. César, à l’endroit où l’on avait célébré les funérailles du dictateur. Suétone nous apprend qu’Auguste fut loué successivement, après sa mort, à chacune de ces deux tribunes (Oct. Aug. ch. c).

152. P. K. julias. Les éditions antérieures à celle de Wesel portent A. D. P… julias. Je lis, selon la conjecture de Poleni, adoptée par M. Dederich, pridie kalendas julias, leçon que les manuscrits indiquaient assez clairement par les lettres P. R., dont la dernière aura été changée par les copistes.

153. c millia. Il n’est pas rare de trouver, comme en cet endroit, l’omission de sestertiorum.

154. Clam. À la dérobée, pour se procurer de l’eau, mais non pour le plaisir de faire du mal.

155. Terminatus. Ce mot désigne en général un lieu, un espace renfermé dans des limites. Il s’agit sans doute, en cet endroit, de l’espace de quinze pieds, ou de cinq pieds, qui, aux termes du sénatus-consulte (Voyez § 127), devait rester libre de chaque côté des aqueducs, et appartenir à l’État. Partout où cet espace était délimité, c’est-à-dire marqué par des bornes fixes, il était défendu aux particuliers d’y rien déposer qui pût faire obstacle à la circulation, ou gêner les ouvriers au moment de la réparation des canaux. La suite de ce passage indique même que toutes précautions étaient prises pour que l’on eût la faculté de faire paître les troupeaux, ou de récolter du foin dans ces sortes d’enclos de l’État, faculté ou droit qui, selon toute apparence, était vendue à l’enchère, et constituait un nouveau revenu pour le trésor.

156. Opponito, molito, etc. Dans l’édition de Poleni, tous ces verbes sont à l’indicatif, opponit, molit, etc. J’ai adopté la leçon de M. Dederich comme offrant un latin plus correct, et parce que la forme impérative est presque toujours usitée dans les lois anciennes.

157. Fenum secare… curatores. Lacune à laquelle M. Dederich supplée ainsi : Fenum secare sentes prohibeant, par curatores, etc.